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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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importante, due au hasard de ses balades, c’est… Brahms, qui passait par là, et que Zweig, malgré sa timidité, a abordé sans hésiter. Le grand musicien allemand, Viennois d’adoption, est une des idoles de la ville et Zweig a obtenu très facilement un autographe, qui sera le début d’une grande collection.
     
    Brahms le fait courir, le moindre concert, la moindre pièce de théâtre attisent sa curiosité, il connaît par cœur les programmes lyriques et musicaux, la liste des pièces que donnent le Burg ou le Hof ou quelque autre des dix ou vingt théâtres de Vienne. Partageant avec ses camarades son argent de poche pour s’acheter des livres et des journaux, non seulement autrichiens mais français et anglais, qui relatent la vie culturelle, il est à l’affût de tout événement comme de toute sensation artistique. La musique, le théâtre et la littérature sont pour le jeune homme, si triste et morose en classe, une passion, presque une fièvre.
     
    Il a de la chance : il n’aime pas le sport, qui aurait pu tout autant dévorer son temps libre, et l’empêcher de lire, lire et lire. Au lycée, trois tours du préau en marche rapide étaient jugés suffisants pour établir chez les garçons un esprit sain dans un corps sain… Ses parents, qui n’entendaient rien négliger pour parfaire l’éducation de leurs deux fils, leur ont fait prendre des cours de danse et de patinage : à Vienne, un jeune homme bien élevé doit savoir danser dans les bals et sur la glace. Mais Stefan sécha les cours, et transforma en livres les sommes que ses parents lui donnaient pour aller valser. Résultat : à dix-neuf ans, il ne sait pas nager, il n’est jamais monté sur une bicyclette, ne pratique ni le tennis, ni aucun jeu de balle, ni même la course, sauf quand il est en retard pour ses cours. Bien que son époque commence à s’intéresser au sport et vante ses bienfaits physiques, il appartient à une génération qui s’est très bien portée de n’avoir jamais pratiqué aucun exercice, de n’avoir jamais dispersé une énergie précieuse. Aussi Stefan Zweig est-il un jeune homme très mince mais peu musclé, pâlot, et dont les longues mains blanches ne savent que feuilleter un livre ou tenir un porte-plume.
     
    Avec ses amis du lycée, il a découvert la vie de café à la pré-adolescence. Moins aérée qu’une sortie à bicyclette dans la campagne autour de Vienne, moins efficace pour les muscles qu’une séance de gymnastique, renfermée, enfumée, rythmée par les innombrables cafés ou chocolats crémeux qu’il y consomme, c’est la vie qu’il préfère. Le Beethoven, le Rathaus ou le Reyl, sont leurs lieux de rendez-vous, les adolescents s’y rendent comme à un club. Tradition viennoise par excellence, il ne leur est jamais interdit d’y choisir une table et de s’y installer, à côté de jeunes gens plus âgés ou de messieurs. C’est peut-être le seul endroit de Vienne où les générations se mélangent. On y compte quelques femmes en chapeau. Stefan s’y plaît, il se sent tranquille, détendu, libre, dans cette atmosphère conviviale, où chacun peut fumer, rêver, boire, discuter ou lire, sans que personne vienne l’importuner. Il joue aussi aux échecs – un jeu qui le fascine et qu’il pratiquera toute sa vie –, lit de A à Z les journaux viennois, Le Mercure de France, le Burlington Magazine ou la Neue Rundschau, exposés sur une table ou pendus à une patère de bois. Très jeune, les rubriques culturelles des revues n’ont pas de secrets pour lui, il connaît par cœur le nom des critiques, et celui des nouveaux poètes, acteurs ou musiciens. Pour se décontracter les muscles, après tant d’heures passées assis sur les banquettes de cuir ou de velours de son « club », il lui arrive de jouer une partie de billard, le seul exercice qu’il s’autorise, dans l’arrière-salle non moins enfumée et sombre.
     
    S’il a détesté le lycée, sa discipline et ses maîtres fastidieux, il est comme un poisson dans l’eau à l’université où le nombre réduit des cours et la liberté d’y assister ou non, le fait de pouvoir étudier ce qui seul l’intéresse, l’ont définitivement séduit. Mais c’est aux cafés qu’il a été le plus heureux à Vienne, là où la vraie vie a commencé. A dix-neuf ans, il les fréquente plus que les amphithéâtres. La coutume est si profondément ancrée dans les mentalités, de voir les hommes de tous âges et

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