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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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reviendrait
vivant. Ils attaquèrent un poste avancé du camp wisigoth, s’attardant sur place
pour piller les tentes. Ils avaient l’air de vulgaires maraudeurs, tout juste
préoccupés de rapines.
    Certains sautèrent même de leurs
montures pour se lancer à la poursuite de volailles caquetantes et de moutons
bêlants. Roderic, qui observait de loin la scène, se tourna vers ses
courtisans :
    — Mes amis, voilà l’occasion
rêvée de prendre un peu d’exercice. Nous allons donner à ces chiens de païens
une leçon dont ils se souviendront en enfer, la seule résidence qui leur
convienne. Théodomir m’avait prévenu qu’il avait affaire à des créatures
effrayantes. Je me demande s’il n’a pas voulu délibérément me priver d’une
victoire sur les Vascons, avec la complicité d’Akhila, son âme damnée, en
m’obligeant à aller à la rencontre de ces brigands. Contemplez ces soldats
redoutables, ce sont des voleurs de grand chemin, tellement affamés qu’ils
abandonnent leurs destriers pour faire la guerre à des volailles ! Dieu
nous fait un signe, sus à l’ennemi !
    Le monarque et les nobles de son
entourage chargèrent les Berbères qui, conformément aux ordres reçus,
feignirent la panique et se firent tailler en pièces jusqu’au dernier. Le soir,
lors du banquet auquel il avait convié tous les principaux dignitaires du
royaume, le souverain n’en finissait pas de raconter aux convives le moindre
détail de cette escarmouche :
    — Vous avez vu ce que valent
ces diables d’Ismaélites. Ils s’enfuient comme des lapins à l’approche de nos
hommes. Nous avons vingt mille cavaliers et fantassins, ils sont, tout au plus,
sept mille et leurs chefs, s’ils en ont, n’ont aucune autorité sur eux. Demain,
les eaux du fleuve [13] seront rouges de leur sang. Dans ces conditions, il est inutile d’engager toute
l’armée. J’attaquerai avec ma garde personnelle et la cavalerie. Les
contingents levés à Toletum resteront à l’arrière, sous le commandement
d’Akhila, pour garder le camp.
    Quand Roderic fut seul avec
Sindered, l’archevêque lui demanda s’il était bien prudent de tenir à l’écart,
sans surveillance, le fils de son prédécesseur.
    — C’est un calcul délibéré de
ma part. Je veux l’humilier publiquement en l’empêchant de combattre à mes
côtés. Dans quelques jours, toute l’Hispanie retentira du bruit de mes exploits
et je n’entends pas qu’il soit associé, d’une manière ou d’une autre, à ma
victoire. Il passera pour un couard et ses partisans l’abandonneront. À ce
moment-là, je pourrai me débarrasser définitivement de lui en l’accusant
d’hérésie. Ce sera alors à toi d’agir et de le faire enfermer dans un couvent
pour qu’il expie, au pain et à l’eau, ses fautes et ses manquements aux
enseignements des saintes Écritures. N’est-ce pas bien vu, évêque ?
    — Si tu as des preuves qu’il
propage des doctrines contraires à l’enseignement de l’Église, celle-ci –
je m’en porte garant – n’aura aucune pitié pour lui.
    — Sindered, c’est à toi de
fabriquer ces preuves. Je ne comprends rien à la théologie et à toutes vos
querelles sur la nature du Christ ou le rôle du Saint-Esprit. Tes clercs sont
assez retors pour le piéger et l’amener à professer en public des opinions
erronées. Ne te dérobe pas à cet ordre. Ton zèle sera le gage de ta loyauté et
je saurai la récompenser comme il se doit.
    — J’y réfléchirai. Pour
l’heure, permets-moi de me retirer afin de prier pour le succès de nos troupes.
     
    Tôt le lendemain, les deux armées se
rangèrent en ordre de bataille. Tarik Ibn Zyad, après avoir conféré avec ses
officiers, choisit de rester sur la défensive – il devait continuer à
donner l’impression qu’il avait peur – et de laisser l’adversaire prendre
l’initiative de l’attaque. Ses hommes auraient à supporter le choc de la
cavalerie wisigoth. C’était un pari pour le moins audacieux car il risquait de
mettre un terme à son entreprise comme le lui firent remarquer ses commandants.
Il se contenta de hausser les épaules et de leur opposer un sourire
énigmatique. Pour galvaniser l’ardeur des Berbères, il les harangua :
    — Alignez bien vos rangs comme
un édifice solidement construit. Mettez devant les hommes pourvus de boucliers
et, en seconde ligne, ceux qui sont à découvert. Serrez les dents car c’est le
seul moyen de faire rebondir

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