Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
efficacement qu’entourée d’êtres apaisés, elle se redressa.
    — Sidonie dit vrai. Marthe fut moi, et je fus elle, des siècles durant. Et nombre d’entre vous ont souffert de son joug. Mais pas autant que moi, emmurée dans sa noirceur et ma détresse. Elle s’en est servie pour m’imposer sa loi et ma propre vengeance. Mais, pendant que je guéris ces hommes, réfléchissez, toi Algonde, toi Mathieu, toi Sidonie, toi Enguerrand, vous deux Janisse et Gersende, avez-vous jamais été vraiment en danger auprès d’elle, quand elle eût pu vous tuer cent fois ? Demandez-vous pourquoi.
    Ils ne répondirent pas, ébranlés dans leurs certitudes.
    Plantine leur sourit.
    — Serais-je là, moi, Plantine, sous cette apparence, si elle vivait encore ? Vous savez que non. Alors, écartez-vous tous, à l’exception de toi, Mathieu. Il est temps que je répare ses crimes d’hier, vous ne croyez pas ?
    Traînant sa jambe douloureuse et confiant en le jugement d’Elora, Mathieu vint s’asseoir près du baron, dans ce sang figé par le froid. Le baron avait cessé de s’agiter, devenu trop faible. Seuls des gémissements de douleur perçaient son inconscience.
    Plantine posa une main sur le visage décharné, l’autre sur l’avant-bras de Mathieu, par-dessus le bandage écarlate.
    —  Ouïmaona inemaïchoï, se mit-elle à chanter en boucle, d’une voix irréelle.
    Alors ils cessèrent de douter.
    Dans un halo mauve pailleté d’or, semblable à ce regard d’amour que Plantine levait vers le ciel, ils virent se cicatriser les chairs et se reconstituer la peau, remplaçant la douleur par un bien-être inégalé.
    Lorsque Plantine ôta ses doigts, Mathieu avait une nouvelle main au bout de son bras et le baron n’avait pas seulement récupéré son visage. Il était aussi rajeuni de traits.
    — Qui es-tu ? demanda-t-il en s’asseyant, ébloui davantage de cette dextre que Mathieu se réappropriait, que de sa propre apparence dont il n’avait pas vu les plaies.
    Autour d’eux, la communauté, incapable de parler, semblait flotter entre rêve et réalité.
    Présine avait regagné leur confiance.
    Elle sourit.
    — Je suis une femme libre qui demande pardon pour le mal que son ombre a fait, répondit Plantine tandis qu’il se relevait, aidé de Sidonie.
    Elle les laissa s’étreindre, sans bouger, les yeux rivés à ceux du baron qui s’étaient rallumés d’un sursaut de méfiance par-dessus les épaules de sa femme.
    — Tous ici ont eu la même pensée durant ton évanouissement, Jacques de Sassenage, et je te répondrai comme à eux. Marthe n’est plus et ne reviendra jamais. Mais je suis coupable de ses crimes pour n’avoir pu les empêcher. De tous ses crimes, sauf de celui que tu me prêtes.
    — Explique-toi, réclama le baron en se détachant de son épouse.
    — C’est bien Marthe qui défit l’escorte de Jeanne de Commiers et l’arracha de sa voiture…
    — Mais c’est l’épervier de Mélior qui fut responsable de sa trépanation, enchaîna Présine, en posant la main sur l’épaule de sa fille. Comme il attaqua Mathieu ou Hélène. Je revenais de Saint-Just-de-Claix lorsque je l’ai vu piquer sur Jeanne, si sauvagement qu’elle s’est effondrée.
    — Marthe l’a crue morte et s’en servit pour se faire craindre et obéir de Sidonie, ajouta Plantine.
    — Quant à moi, acheva Présine, j’ai emporté Jeanne dans mes bras jusqu’à l’abbaye où j’ai remis le flacon pyramide à sœur Albrante pour qu’elle puisse la sauver. La suite, vous la connaissez, baron.
    Il hocha la tête, satisfait, enclin comme les autres à pardonner.
    — On dit qu’une créature sublime fait des miracles par ici. En auriez-vous encore un, même au rabais ? demanda Briseur en fendant le cercle.
    Le ventre barré d’un bandage sommaire et sanguinolent, il était soutenu par Constantin et Khalil qui s’étaient précipités sur l’autre navire pour le récupérer. La griffe de la Harpie n’avait guère cisaillé que le bourrelet de graisse à sa ceinture, mais il était en proie aux mêmes affres que ses compagnons. Le poison le rongeait.
    — Plantine…, la salua-t-il d’un air suppliant, mis au fait de son identité dans le canot qui le ramenait.
    Sans hésiter, la fée apposa ses mains sur la plaie.
    Mounia, restée jusque-là en retrait, accorda au baron le temps de faire jouer sa mâchoire et de la constater plus mobile encore qu’avant, tandis qu’à quelques pas

Weitere Kostenlose Bücher