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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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votre chapelet.
    Ils firent comme on le leur demandait. Avant le début des leçons de l’après-midi, ils avaient le temps de réciter dix Je vous salue, Marie.

    *****
    Après avoir consacré la récréation à la prière et à l’édification de leur âme, les congréganistes éprouvèrent un peu de difficulté à se concentrer pendant les deux heures de leçon. La pause fut donc la bienvenue. Même si elle ne durait qu’une quinzaine de minutes, plusieurs sortirent afin de se dégourdir un peu les jambes.
    En mettant les pieds dehors, Raymond reconnut la petite silhouette sous le grand chêne, le seul arbre de la cour.
    — L’abbé Verville prêche très bien, déclara l’adolescent alors qu’il rejoignait son confrère.
    — Tu as raison, nous avons de la chance de l’avoir parmi nous.
    Le visage de Louis rougit. Faire partie des plus jeunes l’exposait à subir les brimades des plus âgés... ou alors à devenir l’objet d’un intérêt plus trouble. Son allure d’angelot tiré d’une peinture ancienne lui méritait plus que sa part d’attention.
    — Si je n’en avais pas déjà un, je lui demanderais de devenir mon conseiller spirituel, ajouta Raymond.
    Quel pieux mensonge ! Le corps émacié du prêtre et son visage trahissant une dyspepsie perpétuelle le rendaient plus lugubre encore que le curé de la paroisse Saint-Roch.
    — Vois-tu un professeur du Séminaire ? demanda Louis.
    — Non. Comme je suis un externe, revenir ici en soirée serait peu pratique. Monseigneur Buteau me guide depuis quelque temps.
    Le titre devait en imposer un peu à ce garçon. Les professeurs de collège ne pouvaient l’emporter en prestige sur un prélat, fut-il domestique.
    — Nous devons y retourner, la classe commencera sous peu, murmura Louis.
    Déjà, des écoliers pénétraient dans la grande bâtisse. Le duo leur emboîta le pas.

    *****
    «Oui, j’allais laisser passer inaperçue cette grande journée, écrivit
    Raymond
    dans
    son
    journal
    ce
    soir-là.
    Quelques lignes, du moins pour fixer cette date. Ce midi, j’ai été reçu congréganiste. »
    Un moment, il demeura immobile, le crayon levé, tenaillé par l’envie d’évoquer la présence de Louis, la conversation sous l’arbre solitaire. Impossible, ses cahiers d’écolier noircis de son écriture ronde ne devaient pas se confondre avec les journaux intimes des jeunes filles de son âge. Y
    étaler ses émois ne servirait les intérêts de personne, surtout pas les siens.
    «Je suis à jamais consacré à Marie, continua-t-il, je l’ai choisie comme patronne et Mère, je lui ai promis de lui être fidèle. Puissé-je toujours bien remplir cette promesse. »
    Ce paragraphe serait du meilleur effet. Raymond éteignit la lumière électrique pendue au plafond et entreprit de se dévêtir dans l’obscurité. Puis, étendu sous le drap et la couverture, les bras le long du corps, il tenta de se remémorer le sermon de l’abbé Verville. L’exercice lui était familier, il résumait de mémoire la plupart des prédications de monseigneur Buteau. Tout alla bien jusqu’à «cette maman céleste».
    Alors, la nuque de Louis prit forme dans son esprit, une image très nette, plus nette peut-être que dans la réalité.
    De nouveau, il eut envie de s’incliner vers l’avant. Dans son rêve éveillé, sa tête allait la rejoindre la chair rose, il sentait sur ses lèvres la caresse des cheveux blonds. Dans l’obscurité, la bouche de l’adolescent s’agitait un peu, comme dans de doux baisers. Son visage se déplaçait, comme s’il atteignait l’oreille de l’enfant imaginaire, et ses dents firent le mouvement de mordre légèrement.
    Lorsque la langue pointa un peu, Raymond tenait sa main droite serrée sur son sexe turgide jusqu’à lui faire mal, une douleur mariée à celle, lancinante, de la cuisse marquée par les pointes en cuivre. La semence gicla dans la paume de sa main gauche, posée sur le gland.
    Le garçon, occupé à faire disparaître les traces de son péché, constata que Chariot n’avait pas pointé ses cornes.
    Au contraire, son petit scénario lui apparaissait très tendre.
    Presque beau et pur. Son sentiment ne relevait pas du domaine du diable.
    « Décidément, se dit-il en se recouchant, je dois être un terrible pervers. »
    Au lieu de retourner sous le drap, il s’allongea sur le sol, face contre terre. Plutôt que dans une oreille nacrée, la langue se promena sur des planches souillées. De toute la nuit,

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