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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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mon héritage à ma guise ?
    Nerveusement, Edouard posa sa boisson, afin de dissimuler le tremblement de sa main.
    — Tu es ma mère ! Je croyais que cela comptait un peu pour toi.
    La scène rappelait une dispute entre des amoureux. Le charmant petit garçon qu’il avait été revint à la mémoire d’Elisabeth. Toute sa vie, il lui avait témoigné une affection indéfectible. Maintenant, il se sentait trahi.
    — Cela ne change rien entre nous. J’ai eu l’occasion de conclure une transaction avantageuse, j’en ai profité.
    — Tu sais bien que je t’aurais consenti le même prix. Si c’est bon pour lui, ça l’est pour moi. Mais tu as tout conclu de manière secrète. D’ailleurs, je l’ai deviné tout à fait par hasard. Une relation d’affaires m’a laissé entendre que tu te livrais à de grands travaux. Tu ne m’aurais rien dit?
    Jamais ?
    Sa curiosité éveillée, Edouard avait profité de l’obscurité afin de juger lui-même de l’ampleur de l’entreprise. Cela avait suffi pour lui permettre de deviner d’où venait l’argent.
    Quelques questions lui avaient donné une certitude.

    Personne ne pouvait emprunter plusieurs milliers de dollars dans une ville comme Québec sans que cela se sache.
    Le silence s’installa entre eux, pesant.
    —Je sais bien qu’au fil des ans, à la pension, tu t’es liée à lui, formula-t-il encore. L’irréprochable Mathieu, volontaire pour aller
    à
    la
    guerre,
    étudiant
    sérieux,
    époux
    fidèle.
    Tout ce que je ne suis pas, en fait.
    Il ne servait à rien de nier. Elisabeth ressentait une véritable affection pour le jeune homme torturé par ses affreux souvenirs. Mais au fond, le seul domaine où elle le trouvait supérieur à son fils n’avait pas été évoqué. Alors qu’Edouard s’était amusé aux dépens d’une jeune fille de la Basse-Ville, Clémentine, Mathieu avait quant à lui épousé Flavie. Elle s’était identifiée successivement à ces deux jeunes filles d’origine modeste.
    — Que vas-tu chercher là ? Cela n’a rien à faire avec ma transaction, mentit-elle. J’avais besoin d’argent, j’en ai parlé à mon notaire, il m’a proposé un prix.
    — Sans m’en dire un mot, car tu savais que je serais prêt à égaler son offre.
    Ou Elisabeth disait la vérité, ou plutôt une partie de la vérité, ou alors elle rompait pour toujours les liens avec ce garçon qu’elle avait élevé avec tant d’amour.
    — Je ne voulais pas te dévoiler toute l’histoire, pour ne pas entacher le bon souvenir que tu gardes de Thomas. Ton père était un homme bien, n’en doute pas. Si tu me promets de ne rien révéler à quiconque, je vais m’expliquer.
    Le jeune homme fronça les sourcils et la contempla avec des yeux de braise.
    — ... Dis toujours.
    — Promets d’abord.
    — Bon, promis, je ne dirai rien.

    — Mathieu n’est pas le fils d’Alfred, mais celui de Thomas.
    L’information laissa son interlocuteur muet. Au moins, constata-t-elle, au lieu d’une sourde colère, la surprise se peignait sur son visage.
    — Tu sais que Marie a été sa secrétaire pendant une courte période.
    — Elle qui a l’air si sévère, si réservée. Elle cache bien son jeu.
    Il la voyait subitement en aguicheuse, la séductrice attirée par la fortune de son patron.
    — Édouard, ne dis pas des choses comme cela, sinon je pars tout de suite.
    La colère mettait maintenant le rouge aux joues de la femme. Ce genre de soupçon, si fréquent, lui levait le coeur.
    — Tu sais très bien comment une petite employée peut se laisser conter fleurette et finir par céder pour ne pas perdre son gagne-pain, gronda-t-elle bientôt. Je ne veux pas accabler ton père, que j’ai beaucoup aimé. Mais dans cette histoire, Marie est une victime, pas une séductrice.
    Elle n’irait pas jusqu’à prononcer le mot «viol». Ce n’était pas nécessaire.
    — Et Alfred, dans cette histoire ? demanda Edouard d’une voix hésitante après un long silence.
    — Il a voulu aider une jeune fille pour laquelle il avait une réelle affection. Puis, cela lui donnait... tu me comprends.
    — Une couverture, compte tenu de son mode de vie.
    La femme acquiesça d’un geste de la tête. Après toutes ses années au couvent, son arrivée dans la famille Picard lui avait permis un apprentissage rapide des vicissitudes de l’existence.
    — Tu ne me diras pas que Thalie est aussi ma demi-sœur, j’espère.
    — Ça non ! Elle est bien la fille d’Alfred.

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