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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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remarqua Fernand.
    Ce genre d’arrangement domestique n’aurait jamais cours dans une demeure où régnait Eugénie sans partage.
    Même
    à
    Saint-Michel-de-Bellechasse,
    les
    domestiques
    devaient attendre la fin du repas des maîtres avant de se sustenter à leur tour.
    — Chez maman, elle mange avec la famille sans afficher la moindre gêne. Ce soir, elle se tient dans la cuisine pour vous impressionner favorablement.
    — Oh ! Je le suis, mais cela ne tient pas à sa présence, ou à son absence, à cette table.
    A vrai dire, le notaire se sentait plus jaloux qu’impressionné.

    Ses hôtes étaient mariés depuis cinq ans et ils se couvaient toujours mutuellement des yeux. Après la même durée, Eugénie lui refusait l’accès à sa couche.
    — Et de votre côté, Thalie, les choses se passent-elles bien ?
    questionna-t-il pour éviter de sombrer dans la morosité.
    — Vous savez, on ne connaît pas grand-chose au moment de recevoir un diplôme. J’apprends de mon mieux. Appuyée par les docteurs Caron et Courchesne, je serai peut-être vraiment compétente un jour.
    Elle eut momentanément envie d’évoquer les malheurs des premières de classe. Plutôt, elle demanda :
    — Mon petit patient a-t-il bien récupéré de sa blessure?
    — Antoine ne doit même plus se souvenir de cet accident. A présent, le seul malheur de son existence, c’est que l’avoine ne mûrit pas assez vite.
    — Est-ce sérieux, son enthousiasme pour l’agriculture ?
    — Une passion...
    Pendant un petit laps de temps, l’homme évoqua les travaux de son aîné sur la ferme.
    — Que ferez-vous quand il va grandir ? demanda Flavie. Je sais bien que l’agriculture est un métier respectable, mais pour votre fils...
    Elle aussi trouvait vertigineuse la distance entre la Haute-Ville et une étable. Elle s’embourgeoisait lentement sans offrir la moindre résistance.
    — Je pensais le voir étudiant au Petit Séminaire un jour.
    Ce sera peut-être au Collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Mais je pèserai de tout mon poids pour que ce soit en tant qu’élève du cours classique, pas de la formation en agriculture. Qui sait, on le verra peut-être un jour notaire à la campagne.

    *****

    À neuf heures, la présence de Thalie démontra toute son utilité. Cartes à la main, le quatuor était concentré sur le bridge. Au cours des années précédentes, Elisabeth avait consacré de nombreuses heures à enseigner divers jeux de cartes à Flavie. Aujourd’hui, cette dernière plissait le front et se tirait d’affaire sans mal. Son partenaire, Fernand, la félicitait de ses bons coups et faisait semblant de ne pas remarquer les mauvais.
    — Je sais bien que ce jeu demande toute notre attention, remarqua Mathieu. Mais pouvons-nous parler un peu affaires ?
    — Ce n’est pas une ruse pour nous faire perdre ?
    demanda le notaire avec un air faussement sévère.
    — Non, ma sœur et moi sommes bien au-dessus des astuces de ce genre, répondit-il dans un sourire. Mais une petite chose me préoccupe.
    Il abattit une carte, provoquant un froncement de sourcils de sa partenaire.
    — Il y a quelques jours, mon cousin Edouard m’a invité à assister à une partie de baseball des Bulldogs. Ce mauvais prétexte lui a permis de réitérer sa grande demande.
    — L’achat de ta part du magasin ?
    — Exactement. Crois-tu que ce serait une bonne décision de vendre ?
    — Si c’est pour acheter deux ou trois maisons comme celle-ci, tu ne ferais pas une mauvaise affaire. D’un autre côté, à en juger par les dividendes que reçoit Eugénie tous les mois de janvier, la conserver sera tout aussi rentable.
    Fernand se concentra un peu sur son jeu. Quand il reporta son attention sur la conversation, Mathieu dit encore :

    — Je lui ai fait une réponse du même genre. Je suppose qu’il harcèle sa sœur de la même façon pour obtenir sa part.
    — Eugénie, non. Mais je pense qu’il insiste aussi auprès de ma belle-mère.
    Le jeune homme hocha la tête. Il laissa le jeu se poursuivre de longues minutes, puis glissa, mine de rien :
    — Edouard possède tout juste la moitié du commerce, mais il se comporte comme s’il était le seul propriétaire. Ne conviendrait-il pas de réunir tous les actionnaires ?
    Fernand le regarda d’un œil amusé. Mathieu se montrait un mauvais comédien. Diplômé en droit, il connaissait très bien les usages en la matière.
    — Il vous adresse un bilan annuel dûment vérifié par un

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