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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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une proclamation publique du
« vœu des sénateurs et des dieux ». La résolution fut cependant
adoptée à une large majorité – des sénateurs seulement, les dieux
s’abstenant de voter – même si l’aval du Sénat ne représentait désormais qu’une
valeur symbolique. Cette reconnaissance me fit plaisir, car elle déplut au pape
de Rome, comme je le découvris quelques jours plus tard, à l’occasion d’une
audience que m’arrangea Festus auprès de ce personnage.
    Dès mon arrivée à la cathédrale de Gélase, la basilique
Saint-Jean de Latran, je fus reçu par l’un des cardinaux que j’avais aperçus
auparavant à Ravenne. Tout en m’escortant vers la chambre d’audience, il
m’enjoignit avec la plus grande gravité :
    — N’oubliez pas de vous adresser au souverain pontife
en lui réservant le titre de gloriosissimus patricius…
    —  Je n’en ferai rien, rétorquai-je.
    La réplique manqua de le faire s’étrangler d’indignation et
de surprise, mais je n’y prêtai pas attention. Durant mon expérience d ’exceptor au service de Dom Clément, j’avais écrit suffisamment de lettres à d’autres
évêques pour connaître la formule utilisée en pareil cas, « Votre
Autorité ». Je n’avais pas l’intention d’en utiliser d’autre pour
celui-là.
    —  Auctoritas, fis-je donc, je vous apporte les
salutations de mon souverain, Flavius Teodoricus Rex. J’ai l’honneur d’être son
représentant en cette cité et je vous offre mes services pour lui faire part de
toute communication que vous pourriez souhaiter…
    — Transmettez-lui mon salut en retour, me coupa-t-il d’un
ton glacial.
    Et tout de suite il commença de rassembler ses robes d’un
geste auguste, comme pour mettre fin à ce bref entretien.
    Gélase était un grand vieillard sec comme un squelette, au
teint pâle et parcheminé, mais sa tenue démentait l’austérité de son physique
d’ascète. Ses vêtements neufs et volumineux, riches de soieries lourdement
brodées, étaient fort éloignés de la simple robe de bure marron portée par tous
les ecclésiastiques que j’avais connus, du moine le plus obscur au patriarche
de Constantinople.
    Lorsque ce dernier me revint en tête, je me souvins de la
querelle qui l’opposait à Gélase et dis :
    — Mon roi serait gratifié au-delà de toute expression, Auctoritas, s’il apprenait que vous et le patriarche Akakiós aviez résolu votre
différend.
    — Je n’ai là-dessus pas le moindre doute, lâcha-t-il
les dents serrées. Cela faciliterait d’autant sa reconnaissance par l’empereur.
Mais par Dieu, au nom de quoi Teodoricus aurait-il besoin de cela ?
N’a-t-il pas obtenu l’aval de ces pusillanimes et serviles sycophantes de
sénateurs ? Je devrais accabler d’anathème tous les membres chrétiens de
ce corps maudit. Peu importe, si Teodoricus veut vraiment me complaire, il n’a
qu’une seule chose à faire, se joindre à moi pour dénoncer Akakiós et son laxisme
envers les nocifs monophysites.
    — Vous savez bien, Auctoritas, que Théodoric se
refuse à intervenir dans les affaires religieuses.
    — Eh bien pour ma part, je refuse à un évêque de rang
inférieur le droit de tolérer une croyance parasite.
    — Inférieur ?
    Avec tout le tact dont j’étais capable, je lui fis remarquer
qu’Akakiós avait accédé au statut de patriarche bien avant que Gélase atteigne
le sien.
    — Et alors ? Comment osez-vous nous
comparer ? Il ne représente que Constantinople ! Je règne sur Rome
tout entière ! Et ce bâtiment (il désigna la basilique où nous nous
trouvions) est l’Église Mère de toute la Chrétienté !
    Je demandai mielleusement :
    — Est-ce pour cela que vous avez adopté un costume
aussi voyant ?
    — Pourquoi pas ? éructa-t-il, comme s’il avait
ressenti ma critique de façon cinglante. Ceux dont la grâce et la vertu sont
uniques se doivent d’arborer une tenue à l’avenant.
    Comme je ne répliquais rien, il ajouta :
    — Mes diacres les cardinaux, qui me donnent
actuellement toutes les preuves d’une dévotion grandissante envers leur pape,
seront récompensés par des embellissements équivalents de leur tenue.
    Voyant que je ne disais toujours rien, il poursuivit d’un
ton pédant :
    — Il y a déjà longtemps que je le pense, le christianisme
doit trancher visiblement d’avec le paganisme… Par le costume, par les rituels,
dans tout l’apparat ecclésiastique. Pas étonnant que

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