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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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naturellement conçue à l’origine comme un
réceptacle, un récipient doté d’une cavité semblable aux lèvres d’un
coquillage, et faite pour être remplie.
    À ce moment-là je n’étais pas Veleda, et ne me sentais en
aucun cas absorbé par cette sensation, pas même de façon inconsciente, dans les
profondeurs de mon esprit. Ma féminité ne se sentait donc pas violée, polluée
et profanée. Je me sentis cette nuit-là comme un simple observateur regardant
la scène de l’extérieur, assistant au rut de Strabo sur une personne inerte et
sans réaction particulière… exactement comme à l’époque où le vil Frère Pierre
avait abusé de façon répétée du jeune Thorn, pas encore formé et alors dénué de
toute compréhension des choses du sexe.
    Rien de tout cela, inutile de le préciser, n’effaça la
détresse, l’indignité et l’outrage de cette nuit. Mais je sais que l’apathie
ennuyée que j’affichais dut grandement gêner le plaisir que Strabo pouvait
escompter. Il y eut aussi quelque chose de palpable, qui rabaissa encore sa
fierté de conquérant et de dominateur. Une fois son premier assaut consommé, il
s’écarta de moi, fouailla rudement mon entrejambe, examina sa main et
tonna :
    — Mais c’est de la marchandise avariée ! Tu es
étroite, ja, mais tu n’es plus vierge ! Petite salope de
tricheuse ! Il n’y a aucune trace de sang !
    Je me contentai de lui renvoyer un regard froid.
    — Tu as bien trahi la confiance de ton frère, à ce que
je vois ! Même s’il n’y a pas eu grand monde à passer avant moi, il y a bel
et bien eu quelqu’un. Je sais que tu es restée étroitement cloîtrée durant ton
séjour à Novae [6] , mais tu as passé un bon moment sur la route,
depuis. Qui donc a cueilli le fruit de ta virginité ? Hein, qui ? Ce Saio Thorn avec lequel tu voyageais ?
    Cette pensée me fit éclater de rire. Et cette réaction
inattendue sembla le déconcerter plus encore que la découverte de ma
défloration.
    —  Vái ! Foutue petite traînée ! Mais
ton cher compagnon est bel et bien mort, maintenant. Et je veillerai à ce que
tu ne puisses plus faire de tendres rencontres, désormais. À compter de ce
jour, tu vas apprendre à trouver ton plaisir avec moi ! Et la leçon
commence maintenant !
    Il me souleva, me retourna, et dès que je fus en appui sur
les genoux et les coudes, il me pénétra par derrière, entrant et sortant bien
plus violemment que la première fois. Comme horrifiés d’être témoins de ce
sacrilège, ma chaîne de cou et ses trois pendentifs se balançaient follement,
tandis que je me trouvais secoué d’avant en arrière. Mais peu m’importait la
trépidation de ces amulettes. Je méprisais désormais par-dessus tout la fiole
du lait de la Vierge, qui n’avait su ni soulager la douleur de mon juika-bloth, ni soigner le vieux Wyrd, ni guérir Amalamena, et qui même à l’instant
présent ne faisait absolument rien pour atténuer ma détresse. Ce qui me
préoccupait bien plus, en revanche, c’était la résistance de la bande ajustée
autour de mes hanches, qui serrait mon organe mâle contre mon ventre. Si
Strabo, dans sa frénésie, venait à déplacer cette bande et que mon membre viril
se mît à pendre – même petit et flasque, vu les circonstances –, mon
agresseur pourrait difficilement continuer d’ignorer sa présence.
    Mais cela n’arriva pas. Ni cette fois, ni les suivantes. Car
ce ne fut pas la seule nuit où j’eus à subir ses nauséabondes attentions. Je ne
pense même pas qu’il se soit agi d’une négligence de sa part ; je crois au
contraire que, décidément, il souhaitait que je continue à porter cette bande
autour de mes hanches. Comme je ne m’étais jamais plaint, n’avais jamais crié
ni imploré sa pitié, quelle que soit l’horreur des actes auxquels il se livrait
sur moi, ou qu’il me forçait à accomplir, je crois que me laisser porter ce
témoignage de ma pudeur était son seul moyen de se persuader qu’il la violait
effectivement. Il ne put donc jamais découvrir quel genre de créature il était
en train d’essayer en pure perte d’avilir. Dans son esprit, il ne cessa jamais
d’assouvir son désir aux dépens de la jeune, belle et désirable princesse
Amalamena. Dans ma tête, je ne cessai d’être Thorn, et je me jurai de lui faire
un jour amèrement regretter le traitement subi.
    Une fois d’ailleurs, une seule fois, je le lui dis en face,
et ce fut sincère.

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