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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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plus grande impatience. Mais il ne parut nullement heureux
de me voir. Il tenait par les rênes le cheval de Swanilda, sellé et chargé de
son bât : je supposai donc qu’elle devait être là aussi, patientant à
l’intérieur avant de nous faire ses adieux une fois que nous serions tous
rassemblés.
    —  Háils, Lombric ! J’ai de bonnes nouvelles
pour toi. Si tu es toujours prêt à partir à l’aventure, Thor et moi t’invitons
à te joindre à nous.
    Loin de me remercier avec effusion ou de se lancer dans une
série de cabrioles d’allégresse, il dit simplement :
    — Dame Swanilda…
    — Elle ne viendra pas avec nous.
    —  Ne, fit-il, d’un ton étranglé.
    Il pointa du doigt l’intérieur du sombre bâtiment,
répétant :
    — Dame Swanilda…
    — Je sais, coupai-je. Nous allons devoir lui faire nos
adieux.
    — Vous savez ? reprit-il dans une sorte de petit
cri aigu, et ses yeux s’exorbitèrent.
    — Enfin, mais qu’est-ce qui ne va pas avec toi ?
demandai-je, impérieux.
    — Avec moi ? répondit-il d’une voix chevrotante,
montrant toujours les profondeurs de l’entrepôt.
    Perplexe, j’entrai. Il me fallut quelques instants pour
m’habituer à l’obscurité. Alors seulement, je vis ce que Lombric avait voulu
dire. D’une haute poutrelle d’angle pendait un enchevêtrement de harnais de
cuir. Très tendu, car ses courroies inférieures enserraient le cou du petit
corps suspendu.

 
13
    Tirant instantanément mon épée, je coupai net les lanières
de cuir et recueillis son corps mou dans mes bras ; mais je compris
aussitôt qu’il était trop tard pour la ramener à la vie. Installant doucement le
corps encore chaud sur une botte de foin, je dis, moitié pour moi-même et
moitié à Lombric, qui tournoyait autour de moi :
    — Comment un être vivant peut-il quitter le soleil de
cette belle journée et venir s’infliger un tel châtiment dans cet endroit humide
et malodorant ?
    — Sans doute a-t-elle pensé que vous approuveriez, fit
une voix rude. (Meirus nous avait rejoints.) Swanilda était toujours disposée à
faire tout ce qui était susceptible de vous plaire.
    C’était évident et, plutôt que de démentir, je cherchai
refuge dans l’équivoque :
    — N’aurait-elle pas plutôt accompli ce que vous aviez
prédit, Boueux ? Pourquoi m’accuser, alors que vous auriez pu l’en
empêcher ?
    Loin de battre en retraite, il demeura fermement campé sur
ses jambes.
    — Je n’ai entrevu que la rupture de son affection pour
vous. Je n’ai en rien discerné de quelle façon ça se produirait… par ce geste
d’attachement ultime. Ou d’abnégation. Elle vous quittait, Saio Thorn.
Mais pour quoi ?
    — Pour son devoir ou sa destinée, peut-être, fit une autre
voix, douce mais un peu voilée. Un homme en mission ne doit pas être contraint
de tramer le poids inutile d’une simple…
    — Silence, Thor ! aboyai-je, et Meirus foudroya le
nouvel arrivant d’un de ses plus sombres regards.
    Nous gardâmes alors le silence un instant, les yeux fixés
sur le pauvre petit cadavre. Je repris la parole, à nouveau surtout pour
moi-même :
    — Je la renvoyais à Novae, et seule. J’avais oublié ce
qu’elle m’avait dit un jour. Que sans un maître ou une maîtresse, elle ne
serait qu’une misérable proscrite, une orpheline. Je suppose que c’est ce qui
l’a poussée à…
    Levant les yeux, je vis ceux de Thor posés sur moi,
moqueurs, presque provocateurs. Je m’obligeai alors à une réaction plus
endurcie, plus virile.
    — Bref, quelle qu’en soit la raison, complétai-je sur
un ton détaché, j’aurais préféré… qu’elle n’en fasse rien…
    Ma voix menaçant alors de se briser, je me tournai vers
Meirus :
    — Voyez-vous, en tant que chrétienne, ce qu’elle vient
de commettre est un impardonnable péché contre la volonté, la grâce et le
jugement de Dieu. Elle doit être enterrée sans prêtre, ni rite, ni absolution.
Juste dans l’opprobre, et enfouie dans une terre non consacrée, sans nulle
marque sur sa tombe.
    —  Tsephúwa ! [37] cracha Meirus avec mépris,
vitupérant de façon particulièrement ordurière. Vous pourrez penser ce que vous
voulez du judaïsme, Maréchal, jamais il n’a eu la cruauté du christianisme.
Laissez-moi disposer de cette malheureuse défunte. Je veillerai à la faire
inhumer avec compassion, décence et dignité, ce qui n’aura rien de chrétien.
    — Je vous en suis reconnaissant,

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