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Toulouse-Lautrec en rit encore

Toulouse-Lautrec en rit encore

Titel: Toulouse-Lautrec en rit encore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Alaux
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pressant comme un talisman. De ses yeux en amande, elle manifesta son étonnement.
    — Je vous l’ai dit : je l’ai confiée à M. Labatut qui a dû la ranger quelque part.
    — Elle est sans doute chez notre chère concierge. J’y vais de ce pas, déclara Théo d’une voix énergique.
    La secrétaire pinça ses lèvres si peu épaisses rien qu’à l’évocation de Micheline Labatut.
    — Puis-je vous faire observer, monsieur Trélissac, objecta Denise, très collet monté, que Mme Labatut n’est pas notre concierge, mais simplement la veuve de notre regretté René.
    — Je sais, je sais… se contenta de répliquer Théo. Et je doute fort qu’elle occupe les lieux encore longtemps.
    Denise Combarieu parut soulagée par l’intuition de l’assistant de Cantarel :
    — À la bonne heure ! ne put s’empêcher d’ajouter la secrétaire au chemisier de soie beige.
    Quand Miss Combarieu eut quitté le bureau de Dorléac, Théo murmura :
    — Il y a comme du crêpage de chignons dans l’air !
     
    Rue du Rempart-Saint-Étienne, à Toulouse, Fernand Coustot jouissait d’une grande pièce mal éclairée qui donnait sur un bâtiment moderne habillé de briques. Le bureau de son adjoint, Albin Couderc, n’était guère plus lumineux ; toutefois il était orné d’un tentaculaire ficus qui courait vers la fenêtre comme on appelle au secours.
    Aux murs étaient épinglées des cartes postales que le temps avait passablement jaunies. On pouvait reconnaître le cirque de Gavarnie, la butte Montmartre ou encore le phare de l’île de Sein.
    Coustot avait convoqué les deux fils Labatut le même jour, à la même heure. Jules était entre les mains de Couderc, Jean lui faisait face. L’un comme l’autre subissait le flot des questions qu’enchaînaient les deux policiers, passés experts dans l’art d’obtenir les aveux.
    Roué, la mine débonnaire mais le cerveau toujours en ébullition, Fernand Coustot menait la danse :
    — Avez-vous une idée sur les circonstances qui ont poussé votre père à attenter à ses jours ?
    — J’sais pas, moi ! bafouilla l’aîné des Labatut. Le pater a toujours eu des idées noires…
    — Quelles idées ?
    — Il disait qu’il se ferait sauter le caisson si on le déshonorait !
    — Pourquoi ? Avait-il des raisons de douter de vous ?
    — Non, monsieur le commissaire, mon frère et moi, on a toujours été réglo. Pas d’embrouilles avec qui que ce soit…
    — Sauf que vous n’avez jamais pu garder un boulot au-delà d’un mois ! De quoi vivez-vous ?
    — Jules et moi, on est saisonniers. À l’automne, on fait les vendanges à Gaillac, l’hiver, on taille la vigne jusqu’à Fronton. L’été, on ramasse les pommes du côté de Montauban ou de Moissac…
    — Et la nuit ?
    — La nuit ? La nuit, on dort, monsieur le commissaire.
    — Moi, j’ai comme l’impression que, la nuit, vous relevez les compteurs, place Belfort ou du côté du canal.
    Jean Labatut baissait la tête. Il faisait coulisser une chevalière en or, dont le blason n’était autre qu’une tête de mort, sur les deux phalanges de son annulaire tout en fixant ses souliers vernis.
    — Votre père était-il au courant de vos activités d’apprenti proxénète ?
    — C’est pas ma faute, commissaire, si ma copine ne trouve pas de boulot et si elle est obligée de faire le trottoir pour payer son loyer ! tenta de se justifier le garçon en prenant des airs de petite frappe rebelle.
    — Ne m’obligez pas à dire tout ce que je sais sur vos activités nocturnes. Que vous le vouliez ou pas, les mailles du filet se resserrent. Je peux vous coffrer pour proxénétisme aggravé dans la minute qui suit !
    Coustot ouvrit le tiroir droit de son bureau, s’empara d’une enveloppe contenant une série de clichés où l’on reconnaissait aisément le gabarit de Jean Labatut entouré de quelques créatures courtement vêtues. Il les déposa en éventail sur le sous-main en simili cuir qui humanisait quelque peu son bureau dépourvu de tout objet personnel.
    — Faut-il que je vous répète ma question ? Votre père était-il au courant de votre statut de maquereau ?
    — Non, je ne crois pas… bredouilla le garçon qui fit craquer ses doigts en nouant ses deux mains baguées.
    — À supposer qu’il l’ait su ou l’ait deviné, c’était suffisant pour qu’il se sente « déshonoré ». Et qu’il passe à l’acte. Non ?
    — Mon père avait

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