Toute l’histoire du monde
prêchèrent en Palestine puis, tout naturellement, dans les communautés juives de la diaspora.
Dans l’Empire, ils eurent du succès.
Il faut savoir qu’un certain nombre de Gréco-latins, lassés de leurs religions traditionnelles, étaient tentés de se convertir au judaïsme. Dans la Bible, on les appelle les « craignant-Dieu ». Le judaïsme acceptait (et accepte toujours) des convertis issus d’autres peuples que le peuple hébreu.
Cependant, la plupart des « craignant-Dieu » étaient arrêtés sur ce chemin par l’obligation de se faire circoncire. La circoncision, qui consiste chez les mâles à couper la prépuce de la verge, était considérée comme absolument obligatoire par les rabbins. Or elle semblait inacceptable aux Grecs et aux Romains. Leur civilisation, qui exaltait les beaux corps, ne pouvait la comprendre. Rares étaient donc les « craignant-Dieu » qui devenaient juifs.
C’est sur ce point que les juifs disciples de Jésus se séparèrent des autres juifs.
L’artisan de cette divergence était pourtant rabbin (en même temps que citoyen romain) : le fameux Paul ou Saul, dont nous avons déjà parlé. Il eut l’idée de demander aux disciples de renoncer à imposer la circoncision aux païens qui voulaient se convertir. Le prophète Isaïe n’avait-il pas écrit, des siècles auparavant, que « la vraie circoncision était celle du cœur » ? Sa proposition fut acceptée par les apôtres, lors de ce qu’on appelle le concile de Jérusalem.
À partir de ce moment, vers 50, le christianisme commença de diverger du judaïsme. Mais, en l’an 67, quand Néron voulut trouver des boucs émissaires pour leur faire porter la responsabilité de l’incendie de Rome, l’empereur-poète ne distinguait certainement pas les chrétiens des autres juifs. C’est pourtant à cette occasion que furent crucifiés Paul et Pierre, le chef des disciples.
Paul avait écrit dans sa lettre aux Corinthiens :
« L’amour est patient, l’amour est serviable ; il n’est pas envieux, ne fanfaronne pas, ne se gonfle pas, ne cherche pas son intérêt, ne s’irrite pas, ne tient pas compte du mal, ne se réjouit pas de l’injustice, mais se réjouit de la vérité. L’amour supporte tout, croit tout, espère tout. »
Page admirable, certes, écho de l’enseignement de Jésus ; mais, nous l’avons dit, l’hymne à l’amour était déjà commun chez les Prophètes et dans la Bible (le Cantique des Cantiques). Cependant, progressivement, les chrétiens d’origine païenne devinrent beaucoup plus nombreux dans les communautés de disciples que ceux d’origine juive.
Surtout, les penseurs chrétiens furent tous des Grecs ou des Latins, dont le célèbre Augustin, évêque d’Hippone en Afrique romaine, qui écrivit les Confessions où l’on peut lire cette phrase magnifique en latin : Non jam amabam , sed jam amare amabam , plus belle encore traduite en français : « Je n’aimais pas encore, mais j’aimais à aimer. »
Ainsi les Romains en arrivèrent-ils à savoir distinguer les chrétiens des israélites ; le christianisme, entièrement juif pendant des années, était sorti du judaïsme.
Beaucoup de Gréco-latins se convertirent, et les communautés chrétiennes devinrent plus nombreuses que les communautés juives de la diaspora. Elles s’en distinguèrent, et bientôt s’opposèrent à elles. Ce mouvement fut accentué par la destruction de Jérusalem accomplie par Titus, en l’an 70. Jérusalem, centre du judaïsme, était aussi le centre du judéo-christianisme. Jérusalem détruite, le centre du christianisme devint naturellement la capitale de l’Empire, où étaient morts Pierre et Paul. L’évêque de Rome devint alors le chef de l’Église, désormais différente de la Synagogue et bien plus « missionnaire » ou prosélyte.
Dès le II e siècle, le gouvernement impérial se mit à persécuter les chrétiens. Ce ne fut toutefois pas une extermination systématique. Au début, les empereurs se montrèrent très prudents. On connaît à ce sujet une lettre du gouverneur romain d’Asie Mineure, Pline le Jeune, qui conseille la modération à son chef (et ami) l’empereur Trajan. Puis les persécutions devinrent plus sanglantes. Mais toujours elles restèrent davantage des sortes de « pogroms » que des persécutions de type nazi. (On appelle « pogroms » les massacres de juifs perpétrés dans la Russie des tsars, avec la bienveillance de la
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