Un long chemin vers la liberte
régions.
L ’ ANC a introduit dans le plan un cours d ’ initiation à la politique, pour ses membres dans tout le pays. Il s ’ agissait de conférences destinées non seulement à éduquer mais aussi à maintenir la cohésion de l ’ organisation. Elles étaient données secrètement par les responsables des branches locales. Ceux qui y assistaient faisaient les mêmes conférences dans leurs communautés. Au début, elles n ’ étaient pas systématiques, mais après quelques mois on a mis au point un programme.
Il y avait trois grands cours : « Le monde dans lequel nous vivons », « Comment nous sommes gouvernés » et « La nécessité du changement ». Dans le premier cours, nous discutions des différents types de systèmes politiques et économiques dans le monde et en Afrique du Sud. C ’ était un tour d ’ horizon du développement du capitalisme et du socialisme. Nous parlions, par exemple, de la façon dont les Noirs sud-africains étaient opprimés en tant que race et en tant que classe économique. Les conférenciers étaient pour la plupart sous le coup d ’ une interdiction et, moi-même, j ’ ai souvent donné des conférences le soir. Cette organisation avait l ’ avantage de permettre aux bannis de rester actifs et de maintenir les adhérents en contact avec ces responsables.
Pendant ce temps, les membres de la direction sous le coup d ’ une interdiction se rencontraient souvent entre eux et organisaient des réunions avec les responsables en poste. L ’ ancienne et la nouvelle direction se coordonnaient très bien et la prise de décisions était collective comme auparavant. Parfois, on avait l ’ impression que rien n ’ avait changé sauf que nous devions nous retrouver clandestinement.
Le Plan-M était conçu avec les meilleures intentions mais on l ’ a appliqué avec des succès modestes et jamais sur une grande échelle. Les résultats les plus impressionnants ont de nouveau été dans l ’ Eastern Cape et à Port Elizabeth. L ’ esprit de la Campagne de défi s ’ est poursuivi dans l ’ Eastern Cape bien après avoir disparu ailleurs et les militants ont saisi le Plan-M comme un moyen de continuer à défier le gouvernement.
Le plan a rencontré de nombreux problèmes : il n ’ était pas toujours correctement expliqué aux adhérents ; il n ’ y avait pas d ’ organisateurs payés pour aider à son application et à son fonctionnement ; et il y avait souvent des discussions à l ’ intérieur des branches locales qui empêchaient d ’ arriver à un accord pour la mise en œuvre du plan. Certains responsables de province s ’ y opposaient parce qu ’ ils croyaient qu ’ il remettait en cause leur pouvoir. Pour d ’ autres, le gouvernement ne semblait pas prêt à prendre une mesure d ’ interdiction et ils n ’ ont pas pris les précautions nécessaires pour en atténuer les effets, Quand le poing de fer du gouvernement s ’ est effectivement abattu, ils n ’ étaient pas préparés.
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Au cours de la Campagne de défi, ma vie a suivi deux chemins parallèles : mon activité dans la lutte et mon travail comme avocat. Je n ’ ai jamais été organisateur à plein temps pour l ’ ANC ; il n ’ y en avait qu ’ un, Thomas Titus Nkobi. Le travail que j ’ accomplissais devait avoir lieu en dehors des heures pendant lesquelles j ’ étais avocat. En 1951, après avoir terminé mon stage chez Witkin, Sidelsky et Eidelman, je suis entré au cabinet Terblanche et Briggish. Après mon stage, je n ’ étais pas encore avocat en titre mais je pouvais rédiger des plaidoiries, envoyer des citations à comparaître, entendre des témoins – tout ce qu ’ un avocat doit faire avant qu ’ une affaire aille devant le tribunal.
Après avoir quitté Sidelsky, je me suis renseigné sur beaucoup de cabinets – il n ’ y avait, bien sûr, pas de cabinets d ’ avocats noirs. Je m ’ intéressais particulièrement à l ’ échelle des honoraires et j ’ ai été scandalisé de découvrir que la plupart des cabinets les plus chics demandaient des honoraires plus élevés aux Africains pour des affaires pénales ou civiles qu ’ à leurs clients blancs bien plus riches.
Après avoir travaillé pendant un an chez Terblanche et Briggish, je suis entré dans le cabinet Helman et Michel. C ’ était un cabinet libéral et un des rares à demander des honoraires raisonnables aux Africains. En outre, on s ’ y vantait
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