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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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pieds mêmes de Godwyn.
    Face à ce désastre qu’il n’avait pas imaginé, celui-ci était
paralysé d’horreur. En voulant démontrer l’impuissance de Carlus, il avait
profané les saintes reliques ! Il ne pouvait détacher le regard de ce
crâne immobile qui le fixait en retour de ses yeux évidés.
    Quel châtiment redoutable lui serait-il réservé pour un
crime d’une telle ampleur ?
    Pourrait-il seulement se racheter ?
    Ayant lui-même orchestré l’incident, Godwyn était moins
sidéré que le reste de l’assistance. Il fut donc le premier à reprendre ses
esprits. Dressé au-dessus des reliques, les deux bras levés au ciel, il cria de
manière à couvrir le vacarme : « Que tout le monde s’agenouille et
prie ! »
    Les personnes placées devant obtempérèrent, très vite
imitées par toute l’assemblée. Godwyn entonna un cantique connu de tous, auquel
les moines et les religieuses joignirent leurs voix. Au son de ce chant qui
emplissait l’église, il redressa le reliquaire, apparemment intact. Puis, se
mouvant avec une lenteur théâtrale, il prit le crâne dans ses deux mains et,
tremblant d’une crainte superstitieuse qu’il parvint à celer, il le replaça à
l’intérieur de la châsse tout en récitant une prière en latin.
    Comme Carlus tentait péniblement de se relever, Godwyn
indiqua à deux religieux de l’aider. « Frère Siméon... mère Cécilia...
voulez-vous raccompagner le sous-prieur ? » Sur ces mots, il ramassa
un os par terre.
    Son effroi était grand : car c’était lui, et non
Carlus, qui était à blâmer pour l’abomination qui venait de se produire.
Craignant le courroux du saint, il cherchait à se convaincre qu’il avait agi
avec des intentions pures.
    Il n’oubliait pas pour autant son objectif principal :
convaincre l’assistance tout entière qu’il était un homme efficace, un chef
capable de diriger les opérations en situation de crise. Comprenant le danger
qu’il y avait à laisser s’éterniser l’horreur et l’effroi, il se hâta de
rassembler les reliques.
    « Frère Thomas, frère Théodoric, venez
m’aider ! » dit-il. Comme Philémon faisait un pas en avant, il
l’écarta d’un geste : seuls les hommes consacrés à Dieu pouvaient poser la
main sur les saints ossements.
    Soutenu par frère Siméon et par mère Cécilia, Carlus
quittait la cathédrale en boitillant, le laissant maître indiscuté de la
situation.
    Il ordonna à Philémon et à un autre serviteur du monastère
nommé Otho de redresser l’autel. Ce qu’ils firent aussitôt. Otho ramassa les
chandeliers, Philémon le crucifix orné de pierreries, puis tous deux, avec
révérence, replacèrent les objets de culte sur l’autel avant d’aller récupérer
les cierges éparpillés.
    Les reliques réunies dans la châsse, Godwyn tenta en vain
d’en rabattre le couvercle. Las, les charnières s’étaient tordues dans la
chute. L’ayant refermée du mieux qu’il le pouvait, il la reposa
cérémonieusement sur l’autel.
    Son but, pour l’heure, consistait à démontrer que Thomas
était le moine le mieux à même de remplir les fonctions de prieur. S’en
rappelant à temps, Godwyn ramassa le saint livre que frère Siméon avait porté
pendant la procession et le lui tendit. Thomas comprit ce qu’il avait à faire.
Ouvrant le missel à la page requise, il entama la lecture des versets. Les
moines et les religieuses se mirent en rang de part et d’autre de l’autel et
Thomas, chantant un psaume, alla se placer en tête de la procession.
    Et l’office reprit jusqu’à son terme.
    *
    À peine Godwyn eut-il quitté la cathédrale qu’il fut saisi
de tremblements. On avait frôlé la catastrophe ! Grâce au ciel, personne
ne semblait se douter qu’il en était l’auteur, à en juger par les commentaires
passionnés des moines, sitôt qu’ils eurent regagné le cloître. Adossé à un pilier,
Godwyn s’efforçait de retrouver son calme, tout en prêtant l’oreille à leurs
conversations. Si d’aucuns considéraient la désacralisation des reliques comme
le signe que Dieu ne voulait pas de Carlus comme prieur – réaction qu’il avait
espérée –, la majorité de la congrégation exprimait sa compassion pour
l’aveugle, ce qui ne faisait pas son affaire. Il prenait soudain conscience
qu’en agissant de la sorte, il avait bien failli donner l’avantage à Carlus.
Ayant recouvré ses esprits, il partit d’un pas vif vers l’hospice, décidé

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