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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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leur famille. Anthony s’approcha du feu.
La salle était froide et le vieux bâtiment parcouru de courants d’air glacés.
Godwyn lui servit une tasse de cidre. Profitant qu’Anthony se désaltérait, le
jeune moine déclara : « Père prieur, c’est mon anniversaire
aujourd’hui. J’ai vingt et un ans.
    — C’est exact, dit Anthony, je me rappelle très bien ta
naissance, j’avais quatorze ans. Ma sœur, Pétronille, criait comme un verrat
qui a reçu une flèche dans le ventre. » Il leva son gobelet en guise de
salut et regarda son neveu avec tendresse. « Te voilà un homme,
maintenant ! »
    Considérant le moment venu, Godwyn se lança. « Cela
fait dix ans que je suis au prieuré.
    — Si longtemps que ça ?
    — Oui. J’y ai fait mes études, puis mon noviciat.
Ensuite, j’ai prononcé mes vœux.
    — Mon Dieu !
    — J’espère ne pas vous avoir donné de raison de rougir
de moi, à vous-même ou à ma mère.
    — Nous sommes tous les deux très fiers de toi.
    — Merci. » Godwyn déglutit. « À présent, je
voudrais aller étudier à Oxford. »
    La ville d’Oxford était un centre d’études renommé depuis
des lustres. L’enseignement y était prodigué par de grands maîtres de la
théologie, de la médecine et de la loi. Prêtres et moines y débattaient avec
les professeurs et les autres étudiants. Au siècle précédent, les maîtres
avaient été regroupés en une compagnie, ou université, qui avait reçu du roi
l’autorisation de tenir des examens et d’attribuer aux élèves des diplômes
reconnaissant leurs mérites. Le prieuré de Kingsbridge y avait une filiale
connue sous le nom de Kingsbridge College, où huit moines pouvaient étudier
tout en continuant à mener leur vie de dévotion et d’abnégation.
    « Oxford ! s’écria Anthony, et une expression
d’inquiétude et de dégoût se répandit sur ses traits. Mais pour quoi ?
    — Pour étudier. N’est-ce pas ce que les moines sont
censés faire ?
    — Je ne suis pas passé par Oxford et ça ne m’a pas empêché
d’être élu prieur de ce monastère. »
    Certes, mais il lui arrivait de se trouver en porte-à-faux
par rapport aux obédienciers qui étaient tous passés par l’université avant
d’occuper des fonctions de responsabilité sous son égide, tels le sacristain et
le trésorier, ou encore les médecins. Ces moines instruits se distinguaient par
leur esprit délié et leur habileté à argumenter. En comparaison, Anthony
donnait parfois l’impression de proférer des insanités aux réunions
quotidiennes du chapitre. Godwyn désirait ardemment acquérir le vif esprit de
logique et la confiance en soi de ces moines qui avaient étudié à Oxford. Ne
pouvant dire à son oncle qu’il ne voulait pas lui ressembler, il se contenta
d’insister laconiquement : « Je veux apprendre.
    — Pour tomber dans l’hérésie ? s’exclama Anthony
avec dédain. Les étudiants d’Oxford remettent en question les enseignements de
l’Église !
    — Pour mieux les comprendre.
    — C’est inutile et dangereux. »
    Godwyn se renfrogna. La vigueur de son oncle ne laissait pas
de l’étonner. Jusqu’à ce jour, celui-ci n’avait jamais paru concerné par les
problèmes d’hérésie. Quoi qu’il en soit, ce qui intéressait Godwyn au premier
chef n’était pas le débat théologique. « Je pensais que ma mère et
vous-même nourrissiez des ambitions pour moi ; que vous vouliez me voir
progresser, accéder à des fonctions de responsabilité et, qui sait, me voir un
jour nommé prieur.
    — Plus tard, oui. Mais tu n’es pas obligé de quitter
Kingsbridge pour cela. »
    En fait, Anthony redoute que je ne le surpasse. Voilà
pourquoi il freine mes progrès ! devina Godwyn dans un éclair de lucidité.
Il craint de perdre tout contrôle sur moi si je pars à la ville.
    Il s’en voulut de ne pas avoir envisagé l’éventualité que le
prieur puisse s’opposer à son projet. « En vérité, je ne souhaite pas
étudier la théologie, ajouta-t-il.
    — Ah bon ? Et quoi donc, alors ?
    — La médecine. C’est une part essentielle de notre
travail ICI. »
    Anthony pinça les lèvres en une moue de désapprobation qui
n’était pas sans rappeler l’expression habituelle de Pétronille. « Le
monastère n’a pas les moyens de supporter les frais afférents à tes études,
répliqua-t-il. Te rends-tu compte qu’un livre coûte au bas mot quatorze
shillings ? »
    La repartie

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