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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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la
bride un cheval de trait portant leur bagage, mais il voulait profiter de la
chance qui lui était offerte d’admirer une architecture aussi variée. Qui
pouvait dire si l’occasion se représenterait ? Cependant, dans ses moments
de grande sincérité, il admettait qu’un autre motif l’incitait à ne pas forcer
l’allure : la peur de ce qui l’attendait à Kingsbridge.
    Il rentrait dans son pays afin de rencontrer une Caris qui
ne serait évidemment plus la même que celle qu’il avait quittée neuf ans plus
tôt ; qui aurait changé physiquement et mentalement. Certaines religieuses
devenaient obèses, le seul plaisir qui leur restait dans la vie consistant à
manger. Connaissant Caris, il l’imaginait davantage se privant de nourriture
dans une extase de renoncement. N’aurait-elle plus que la peau sur les
os ? Était-elle habitée par la religion au point de prier tout au long du
jour, en se flagellant pour des péchés qu’elle n’avait pas commis ? Et si
elle était morte ?
    Telles étaient les angoisses de Merthin, bien qu’il sache au
fond de lui que Caris ne serait ni obèse ni possédée par l’idée du salut. Quant
à penser qu’elle était morte, impossible ! Il aurait eu vent de la
nouvelle de la même manière qu’il avait appris le décès d’Edmond. Non, à coup
sûr, elle aurait comme autrefois un corps menu et une tête claire. Son esprit
serait toujours aussi vif et déterminé. Une chose, cependant, ne laissait pas
d’inquiéter Merthin : l’accueil qu’elle lui réserverait. Que pensait-elle
de lui à présent ? Appartenait-il à un passé trop lointain pour qu’elle
s’en préoccupe, de la même façon, par exemple, que lui-même ne se préoccupait
plus de Griselda ? Se languissait-elle de lui au fond de son âme ? Il
n’aurait su le dire et c’était bien cette ignorance qui était véritablement la
source de son émoi.
    Ils firent voile jusqu’à Portsmouth et poursuivirent leur
voyage avec un groupe de marchands qu’ils abandonnèrent une fois arrivés au gué
de Mude. Leurs compagnons continuaient vers Shiring alors qu’eux-mêmes devaient
traverser la rivière pour rejoindre la route de Kingsbridge. Quel dommage
qu’aucun signe n’en indique la direction ! pensa Merthin tout en entrant
dans l’eau à cheval, la rivière étant peu profonde à cet endroit. Combien de
marchands poursuivaient ainsi tout droit jusqu’à Shiring sans même imaginer
qu’une ville aussi importante que Kingsbridge se trouvait à proximité.
    C’était une chaude journée d’été. Un soleil éclatant
brillait dans le ciel quand il aperçut enfin au-dessus des arbres la tour de la
cathédrale. Elle ne s’était pas écroulée. Les travaux de consolidation
effectués sous la direction d’Elfric avaient tenu onze ans. C’était déjà ça,
pensa-t-il. Il déplorait seulement qu’on ne voie pas le monument du gué :
les visiteurs seraient bien plus nombreux à se rendre à Kingsbridge.
    En trottant vers la ville, il fut saisi d’une anxiété si
violente que la nausée faillit l’obliger à descendre de monture pour vomir. Il
tenta de se raisonner. Que pouvait-il arriver de pire ? Que Caris n’ait
plus de sentiment pour lui ? Finalement, il n’en mourrait pas.
    Aux abords de Villeneuve, il remarqua plusieurs bâtiments
récents. Les faubourgs s’étaient tellement étendus que la splendide demeure
construite pour Dick le Brasseur aux confins de Kingsbridge se trouvait
désormais englobée dans la nouvelle ville.
    La vue de son pont lui fit oublier momentanément son
appréhension. Il s’élevait en une arche élégante de la berge jusqu’à l’île au
milieu de la rivière pour rejaillir plus loin et enjamber le deuxième bras. La
pierre blanche étincelait au soleil. Hommes et chariots s’y croisaient dans les
deux sens. À ce spectacle, le cœur de Merthin se gonfla de fierté. L’ouvrage
remplissait toutes ses espérances : il était beau, utile et solide. Et
c’est moi qui l’ai imaginé ! se dit-il avec bonheur.
    Quelle ne fut sa surprise, en s’approchant du premier pont,
de découvrir que la maçonnerie se délitait autour du pilier central. D’affreux
croisillons métalliques de renfort apposés n’importe comment à l’endroit des
fissures témoignaient qu’Elfric était passé par là. La vue des sombres traînées
de rouille en dessous des clous acheva de le consterner. Il se crut ramené onze
ans en arrière, au jour où il avait

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