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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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aveugles au danger qu’elles-mêmes encouraient.
    Au château, l’atmosphère était sombre. Ceux des serviteurs
chargés de chercher du bois ou de l’eau, de nourrir les chevaux, d’aiguiser les
armes, de cuire le pain ou d’abattre le bétail continuaient d’accomplir ces
tâches quotidiennes, mais les employés aux écritures, les hommes d’armes, les
messagers demeuraient assis à ne rien faire, attendant des nouvelles de la
chambre du malade.
    Les corbeaux saluèrent l’arrivée des voyageurs par un
croassement sarcastique quand ils franchirent le pont intérieur conduisant au
donjon. C’était là, se rappela Merthin, qu’avait vécu, des siècles auparavant,
le comte Thomas, fils de Jack le Bâtisseur et de dame Aliena, dont son père,
sieur Gérald, prétendait descendre en ligne directe. Il compta les marches menant
à la grande salle en prenant soin de poser ses pieds dans les creux laissés par
des milliers de bottes, et très certainement par celles de ses ancêtres. S’il
éprouvait une certaine émotion à fouler les mêmes pierres qu’eux, il n’était
pas obnubilé, comme Ralph, par la volonté de restaurer sa famille dans sa
gloire passée.
    Caris grimpait l’escalier devant lui. Le balancement de ses
hanches lui arracha un sourire involontaire et il regretta de ne pouvoir passer
toutes ses nuits avec elle. Cela dit, les rares occasions où il leur était
donné de se retrouver en tête-à-tête en devenaient d’autant plus excitantes.
Hier, par exemple, ils avaient fait l’amour toute une partie de ce doux
après-midi de printemps, dans une clairière inondée de soleil, pendant que
leurs chevaux paissaient plus loin, indifférents à leur passion.
    Leur relation n’était pas courante, mais Caris était une
femme d’exception : prieure ayant charge d’âmes, elle remettait en
question bon nombre des enseignements de l’Église ; religieuse ayant
prononcé ses vœux perpétuels, elle faisait fi de la chasteté et s’adonnait à sa
passion charnelle aussi souvent qu’elle le pouvait ; guérisseuse révérée
de tous, elle rejetait la médecine que pratiquaient les moines. Et Merthin de
se dire que s’il avait voulu mener une vie conforme aux traditions, il aurait
dû jeter son dévolu sur une femme plus soucieuse de bienséance.
    Une nombreuse assemblée se pressait dans la grande salle du
château au milieu des serviteurs occupés à étendre sur le sol de la paille fraîche,
à allumer le feu, à dresser la table pour le dîner. Tout au bout de la longue
pièce, près de l’escalier menant aux appartements privés du comte, était assise
une jeune fille d’une quinzaine d’années élégamment vêtue. À l’arrivée du
couple, elle se leva et se dirigea vers eux d’un pas princier. À sa haute
taille et à son corps admirable, Merthin devina que c’était la fille de dame
Philippa. « Je suis damoiselle Odila, se présenta-t-elle avec une hauteur
héritée de sa mère. Vous devez être mère Caris. Je vous remercie d’être venue
prendre soin de mon père. » Ses paupières rougies et fripées par les
larmes démentaient son calme.
    Merthin dit : « Je suis le prévôt de Kingsbridge,
Merthin le Pontier. Comment se porte le comte William ?
    — Il est au plus mal et mes deux frères sont bien
faibles eux aussi. » Merthin se souvint alors que le comte et la comtesse
avaient deux garçons d’environ dix-neuf et vingt ans. « Ma mère prie ma
dame la prieure de venir les voir tout de suite.
    — Je vous suis ! » répondit Caris. Mais elle
prit le temps d’extraire de son sac une bande de tissu propre pour s’en couvrir
le nez et la bouche avant d’emboîter le pas à Odila.
    Merthin s’installa sur un banc et se mit en demeure
d’examiner les lieux de son œil averti. Comment cette foule s’organisait-elle
pour dormir ici la nuit ? Si ses rapports intimes avec Caris n’étaient
qu’occasionnels, il tenait néanmoins à ne rien ignorer des moyens lui
permettant d’assouvir sa passion. Lesquels, malheureusement, ne seraient guère
nombreux dans ce bâtiment construit selon le plan traditionnel. Cette vaste
pièce, le vestibule, était probablement l’endroit où tout le monde mangeait et
dormait. L’escalier menait sans doute à une terrasse sur laquelle donnait la
chambre du comte et de la comtesse. Les châteaux plus récents disposaient
d’appartements en enfilade destinés à la famille et aux invités. À l’évidence,
ce luxe

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