Un paradis perdu

autre chose.
     
    1 Le président Garfield mourut à Elberon, le 19 septembre de la même année, victime d'une septicémie, complication de ses blessures.
     
    2 Condamné à mort le 22 janvier 1882, il fut exécuté le 30 juin.
     
    3 Cornelis de Witt, Thomas Jefferson , librairie académique Didier et Cie, Paris, 1871.
     
    4 Institué par Édouard III en 1348. La devise de cet ordre de chevalerie anglais est : « Honni soit qui mal y pense. »
     
    5 Ministre de la Justice du gouvernement colonial.
     
    6 Kipling. Poèmes choisis par T.S. Eliot . Traduit de l'anglais par Jules Castier, Robert Laffont, Paris, 1949.
     
    7 1831-1915. Il participa, à bord de la corvette britannique Challenger , avec l'amiral sir Edward Belcher (1825-1877), à la première croisière scientifique autour du monde. En 1875, il dirigea l'expédition en Arctique du Discovery et de l' Alert et fut contraint d'hiverner au point le plus septentrional alors atteint par un navire. Entre 1876 et 1878, il releva le tracé des côtes de l'Arctique, au cours d'une expédition en traîneaux. En 1882, on lui confia une mission océanographique dans les mers du Sud, à bord de l' Alert . On lui doit plusieurs ouvrages scientifiques sur les mers arctiques.
     
    8 La haute bourgeoisie.
     

4.
     
    En débarquant à Soledad, Pacal eut le sentiment que toute l'île avait pris le deuil. Les débardeurs, d'ordinaire si exubérants, portés aux lourdes plaisanteries, aux quolibets et aux chansons grivoises, se taisaient et vaquaient en silence aux travaux du port. Tous ceux qu'il rencontra montrèrent une sincère affliction. Au mât des navires de la flotte Cornfield, le pavillon était en berne et, au-dessus du parterre fleuri du Loyalists Club, l'Union Jack flottait à mi-mât. Fish Lady resterait une figure emblématique dans l'histoire de l'île.
     
    Pacal se fit conduire chez son père par le gérant du club. Ce mulâtre avait eu, autrefois, plus de chance que Lamia et Sima. Il devait son sobriquet – Sharko – à la morsure que lui avait naguère infligée un requin.
     
    À Malcolm House, le jeune homme trouva Charles Desteyrac consterné.
     
    – Sans Lamia, je n'aurais jamais construit ni pont ni phare. Dès mon arrivée à Soledad, il y aura trente ans l'an prochain, elle fut le bon génie qui, toujours, m'aida dans mes entreprises. Quelle sépulture pour Fish Lady que l'estomac d'un requin ! Et ce brave Sima ! dit Charles.
     
    Ottilia était absente. Maîtrisant son chagrin, elle passait ses journées au milieu des insulaires de Buena Vista, desquels Lamia avait été la bienveillante souveraine. Ma Mae, ses filles et quelques autres domestiques voulaient encore espérer un miracle.
     
    – P't'ê'te que not'e lady a été ramassée par un bateau et qu'on nous la rendra, disait la vieille cuisinière, désœuvrée depuis qu'elle n'avait plus de repas à préparer.
     

    À Cornfield Manor, Pacal vit son grand-père accablé mais, comme toujours, d'une parfaite dignité. Il portait, noué sous son col, une large cravate de soie noire et, au salon, le portrait de Lamia jeune fille, peinte par sir Thomas Lawrence quand elle avait quatorze ans, était barré de crêpe.
     
    Le lord avait longtemps entretenu, par jeu plus que par réel antagonisme, des rapports conflictuels avec sa sœur, jusqu'au jour où, devenue l'épouse d'Edward Carver, elle avait acquis un nouveau statut. Depuis la mort de son vieil ami, l'estime qu'il portait à la veuve du major ne l'empêchait pas de traiter encore Lamia de sorcière, mais le ton hargneux était devenu affectueux. Ces dernières années, Fish Lady séjournait souvent au manoir et Simon Leonard se rendait à Buena Vista pour des parties de tir aux oiseaux de mer, ce qui donnait lieu à compétition entre le frère et la sœur.
     
    – Je ne la voyais, certes, pas mourir dans son lit comme une vieille femme rance. Pas avant moi, surtout, qui suis son aîné. Elle a dû périr noblement dans un dernier duel avec le requin, son ennemi de toujours, dit-il à Pacal.
     
    Quelques jours plus tard, lord Simon demanda au pasteur Russell de célébrer l'office des morts à la mémoire de la disparue. À l'issue de la cérémonie, il se rendit avec les intimes au Cabo del Diablo, au large duquel avait été vu pour la dernière fois le voilier de lady Lamia. Dans leurs barques formées en cortège, les pêcheurs d'éponges s'éloignèrent du rivage et ce fut l'amputé, à peine remis de