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Vidocq - le Napoléon de la Police

Vidocq - le Napoléon de la Police

Titel: Vidocq - le Napoléon de la Police Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie-Hélène Parinaud
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marchandise. »
    Pêle-mêle, les condamnés sont
poussés dans la cour des fers. Ils n’auront droit de garder que quelques pièces
de monnaie et un morceau de pain. Vidocq a pris ses précautions, évidé ses
centimes pour y cacher dans chacun un louis d’or et dans la miche de pain,
débarrassée de sa mie, dissimulé un pantalon, une chemise, un mouchoir et des
chaussons.
    Comme les autres, il est entièrement
dévêtu et ses habits vendus sur le champ à des fripières qui sans lui accorder
un regard, disputent férocement le prix avec les gardes. En moins d’une heure,
cent vingt hommes sont debout dans le froid, nus comme des vers. On leur rase
le crâne. Sa chevelure blonde de Viking tombe aux pieds de Vidocq. Ce n’est pas
seulement une précaution sanitaire. À une époque où les hommes portent des
favoris, quelqu’un de vingt-deux ans et de chauve serait vite repéré.
     
    Après la tonte, la fouille. Les anus
des prisonniers sont hâtivement sondés pour vérifier qu’ils n’y cachent ni lime
ni ressort. Le troupeau grelottant est poussé jusqu’au comptoir du fourrier qui
jette à chacun son uniforme de voyage, des hardes de toile à serpillière.
Enfin, armés de nerfs de bœuf, les gardes-chiourmes les conduisent par groupe
de trente jusqu’à « l’arête ». De longs cordons d’anneaux d’acier
répandus sur les pavés. On va les ferrer avant de les conduire au bagne. Les argousins,
le plus souvent des Auvergnats se chargent de surveiller l’opération et
d’escorter les bagnards une fois enchaînés. Le reste du temps, entre deux
voyages, ils sont porteurs d’eau ou livreurs de bois et charbons.
    On accouple les détenus, par taille.
On leur pose un collier de fer, « la cravate », rivé à froid par des
bagnards à coup de masse. C’est un moment très délicat car le moindre faux
mouvement, le plus petit sursaut, du patient ou de l’opérant, peut suffire à
faire éclater le crâne comme une coquille. Ce carcan, relié à des menottes et à
l’anneau qui enserre la cheville, est lui-même fixé au long ruban de fer où
sont rattachés vingt-trois hommes. Le montage oblige les forçats, lorsqu’ils
veulent avancer, à bouger les mêmes membres ensemble, d’un seul mouvement.
C’est « la chaîne ».
    Vidocq aujourd’hui n’en est plus
qu’un maillon. Avant de monter dans la « diligence », la longue
charrette qui les conduit à Brest, les condamnés passent au milieu de la foule
des curieux qui ont obtenu des billets de faveur pour assister au départ des
bagnards. Beaucoup de jolies femmes qu’accompagnent quelques noceurs, guettent
sur les visages des condamnés, des traces de larmes ou d’épouvante. Vidocq, lui
redresse la tête et s’efforce de sourire. Le bagne, c’est sûr, il s’en
évadera !

IV L’évasion
    Vingt-deux jours d’un voyage infernal
où les villageois se distraient de leur passage en jetant aux bagnards des
pierres et des insultes :
    « T’as soif ? T’inquiète
pas. Là où tu vas, tu manqueras pas d’eau ! »
    Durant le trajet, Vidocq défile le
bas de son maigre costume pour en tresser les fils d’une manière étrange. Comme
il se le met chaque soir sur la tête, ses compagnons de chaîne pensent qu’il se
confectionne un bonnet. En fait, c’est une perruque. Personne ne peut passer
inaperçu la tête rasée.
    Lorsque les détenus arrivent à Brest
et qu’on les attache sur les tolas, sorte de plancher de bois incliné, servant
de lit à vingt-quatre condamnés à la fois, il se jure à lui-même :
« Je n’y resterai pas huit jours ! »
     
    Revêtu de la casaque et du bonnet
écarlate des forçats, enchaîné nuit et jour, Vidocq observe les sentinelles,
note la fréquence des rondes, repère toutes les issues possibles. Sa conclusion
est implacable : on ne peut s’évader, donc il le fera !
    Première difficulté s’assurer le
silence de son compagnon de fers. Les forçats dorment ensemble, mangent dans la
même gamelle, tirent la même chaîne. Impossible de faire quoi que ce soit sans
que l’autre n’y participe. Pas trop veule, sensible à l’argent, condamné à
vingt-quatre ans de bagne pour avoir volé des poules, il accepte de ne rien
voir et de ne rien dire.
    Tandis que les bagnards partent pour
désinfecter les vaisseaux du typhus ou travailler aux magasins de goudron,
Vidocq après avoir scié sa manicle de fer à la limite de la rupture et s’être
vêtu des habits cachés dans sa miche

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