4 000 ans de mystifications historiques
les bolcheviques demandent aux Alliés de les aider à préparer les conditions d’un armistice avec les Allemands.
Alors commence un étonnant jeu de dupes : les Alliés prennent une position contraire : ils adressent un message personnel au général Doukhonine, commandant en chef des armées russes, pour lui demander de « maintenir son armée face à l’ennemi commun ». Il est, en effet, impératif pour eux de maintenir la pression sur l’Allemagne et la Russie sur le front oriental. Doukhonine tente de publier une proclamation dans ce sens, mais le Conseil des commissaires du peuple le relève de ses fonctions. Cinq jours plus tard, il adresse une demande d’armistice à l’Allemagne et à l’Autriche-Hongrie. Elle est immédiatement acceptée et les représentants des trois pays, ainsi que ceux de la Bulgarie et de l’Empire ottoman, se retrouvent le 15 décembre à Brest-Litovsk, une ville de Biélorussie, à la frontière polonaise.
Les combats cessent et les troupes des deux camps demeurent sur leurs positions.
Allemands, Austro-Hongrois et Ottomans sont conscients de l’extrême vulnérabilité des bolcheviques, qui ne peuvent rester au pouvoir que si les hostilités sont suspendues ; ils ne sont pas en mesure de soutenir l’énorme effort que la guerre impose au pays. Les armées russes, déjà partiellement démobilisées, sont démoralisées. Les Allemands et leurs alliés entendent bien tirer le meilleur parti de la situation.
Fin décembre, toutefois, la conférence est ajournée, en raison des exigences de Trotsky. Celui-ci demande, en effet, l’évacuation des territoires occupés par les Allemands et les Austro-Hongrois, afin que ceux-ci ne procèdent à aucune annexion de fait. Mais les Allemands ne l’entendent pas de cette oreille. La conférence est ajournée une autre fois, le 7 janvier 1918. Les Allemands ouvrent alors des pourparlers avec l’Ukraine, à laquelle les bolcheviques ont concédé l’indépendance le 2 novembre 1917. Furieux, les bolcheviques quittent la conférence. Le 11, estimant l’armistice rompu, les Allemands reprennent les hostilités et ils avancent sans rencontrer de résistance notable : leurs troupes se déplacent d’ailleurs en train. Le 9 février, ils concluent la paix avec le jeune État d’Ukraine. Fin février, les Allemands, qui traversent les provinces baltes sans problème, sont à moins de cent cinquante kilomètres de Petrograd.
Le couteau sur la gorge, les bolcheviques sont contraints d’accepter les conditions des puissances centrales. Ils sont aux commandes d’un navire en perdition. Le 3 mars 1918, ils acceptent les conditions des Allemands et des Austro-Hongrois, renoncent à la Pologne, aux provinces baltes et à la Courlande, et ils reconnaissent l’indépendance de la Finlande. Le traité de Brest-Litovsk est enfin signé.
Pendant ce temps, les Alliés assistent à cette débâcle en proie à une rage froide. La défection de la Russie bolchevique renforce considérablement l’Allemagne : de fait, Ludendorff va dégager du front oriental cent quatre-vingt-douze divisions, soit vingt de plus que les Alliés.
Telle est la situation en 1918.
*
Débarrassés de la guerre, les bolcheviques n’en mènent pas large pour autant. Ils sont arrivés au pouvoir par un quasi-miracle, grâce à la dislocation de l’appareil politique russe, aggravée par la fuite de Kerensky, à la suite du retentissant échec de son cabinet sur tous les fronts. « J’ai pour moi le désordre, c’est mieux qu’une grève générale », déclare Trotsky, qui a pu s’emparer de Petrograd avec un millier d’hommes ; et c’est sur cette base qu’il va prétendre gouverner un pays qui s’étend de l’Oural à l’extrême pointe de l’Asie ; Lénine sait mieux que lui la vulnérabilité de l’entreprise. Les Armées blanches, en effet, menacent d’anéantir le fragile appareil bolchevique qui se met en place. Fin septembre 1919, ces armées contre-révolutionnaires contrôlent un territoire gigantesque, dix millions de kilomètres carrés. Celles du sud, commandées par le général Denikine, sont à quelques jours de marche de Moscou, et celle de l’ouest, commandée par le général Ioudenitch, approche de Petrograd après avoir repoussé la 7 e armée soviétique et poursuivent leur avancée.
Le 5 octobre 1919, Ioudenitch atteint Poulkowa, dans les faubourgs de Petrograd, et il est près d’emporter la ville, fort des
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