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4 000 ans de mystifications historiques

4 000 ans de mystifications historiques

Titel: 4 000 ans de mystifications historiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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fleuves Limay et Neuquen au nord. Peut-être un ethnologue familier de l’Amérique du Sud soupçonnerait-il qu’il s’agit du territoire des Araucans, Indiens du Chili central comprenant les tribus des Mapuches et des Puelches.
    Mais on peut douter que beaucoup de professeurs d’histoire connaissent celle de l’Araucanie. Dans ce cas, ils sauront qu’un natif de Soumeil, en Périgord, Antoine Tounens, fut au XIX e siècle roi de ce pays et qu’il fonda une dynastie toujours vivante. Le dernier représentant à notre connaissance fut, en 1961, Philippe d’Araucanie. Notre excellent confrère Jean Raspail  (31) était, en 1981, consul d’Araucanie à Paris.
    L’histoire de ce pays laisse rêveur à juste titre. Par certains aspects, elle évoquerait la gigantesque mystification d’un mégalomane, tandis que par d’autres, elle suscite l’admiration. Elle suggère aussi que la frontière entre le virtuel et la réalité est parfois ténue.
    *
    Antoine Tounens naît en 1825 dans une famille de propriétaires terriens aisés, liés par des mariages à d’autres familles de la région. Ils sont d’ancienne souche et se réclament de Tonentius Ferreolus, sénateur gallo-romain et préfet du Prétoire, leur ancêtre, au V e siècle ; chef d’une famille romanisée d’Auvergne, il aurait fondé la ville de Tonontium, l’actuelle Tonneins. Premier clerc d’un avoué de Périgueux, Tounens en racheta la charge et ajouta une particule à son nom. Ces détails sont souvent révélateurs : l’ambition anime notre héros.
    La France de l’époque est tourmentée : après la chute de la monarchie de Juillet et le coup d’État du 2 décembre, le sentiment règne chez les républicains, les bonapartistes et les légitimistes confondus que seules l’action et l’audace protègent de la décadence. On ne sait quelles lectures marquèrent Antoine de Tounens ; membre de la loge maçonnique de Périgueux, Les Amis persévérants, il eut plus d’une occasion d’écouter des conférences de voyageurs. Il avait lui-même déjà voyagé et connaissait ainsi l’espagnol.
    Ce qu’on sait en revanche est que son voyage fut longuement organisé : il avait préparé les « sceaux du royaume » avant son départ. Il vendit donc son étude et s’embarqua.
    L’Araucanie, jadis nommée Rapel, avait une longue histoire : seuls de tous les peuples indigènes d’Amérique du Sud, ses quelques 460 000 habitants avaient vaillamment résisté aux tentatives des Incas de les assujettir et ceux-ci avaient fini par reconnaître leur indépendance. Quand les Espagnols avaient débarqué, au milieu du XVI e siècle, c’étaient les Incas qui avaient été défaits. Jusqu’alors victorieuses tout au long de leur avancée dans ces terres inconnues, les troupes de Pizzarro étaient parties à la conquête de l’Araucanie. Mais, surprise, elles rencontrèrent une farouche résistance. Ainsi, les troupes de Pedro de Valdivia, maître du nouveau Chili et fondateur de Santiago, sa future capitale, avaient subi une défaite cuisante aux mains des armées araucaniennes commandées par le Gran Toqui Caupolican. Valdivia y avait perdu six mille hommes et il avait lui-même été tué. Les colonies fondées par les Espagnols avaient été désertées et détruites, à l’exception de La Serena et de Concepcion.
    Quelques trêves n’avaient jamais mis vraiment fin à la guerre entre les conquistadores et les Araucans, célébrée par un célèbre poème épique castillan, La Araucaria , d’Alonso de Ercilla y Zuniega. Ce ne fut qu’en 1785 que le roi d’Espagne Charles III, suivant l’exemple de la France, appliqua une politique d’apaisement et reconnut l’indépendance de l’Araucanie. Des échanges d’ambassadeurs eurent même lieu.
    Mais, en 1818, le démantèlement de l’Empire espagnol d’Amérique mit de nouveau l’Araucanie en danger. Le Chili indépendant ne s’estimait pas lié par les accords conclus entre l’Espagne et les tribus locales et il encouragea ses colons à s’établir en Araucanie. De nouveaux conflits éclatèrent.
    Ce fut alors qu’Antoine de Tounens débarqua. Il était venu sur un navire de guerre français, ce qui indique que Napoléon III n’avait pas été hostile à son entreprise. L’empereur portait, en effet, ses regards sur le Nouveau Monde que venait d’abandonner l’Espagne.
    *
    Avec un aplomb extraordinaire, Tounens rendit visite au Toqui Magnil, le chef national lors

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