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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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menaçant. Il y a tout de même des limites de rentrer à n'importe quelle
heure.
     
    Quand son mari se
leva une heure plus tard, elle lui demanda d'ajouter du charbon dans la
fournaise. Gérard obtempéra en ronchonnant avant d'aller se raser dans les toilettes.
Il revint dans la cuisine quelques minutes plus tard et s'alluma une cigarette
avant de s'asseoir dans sa chaise berçante. À lui aussi, le café matinal
manquait cruellement le dimanche matin.
     
    — As-tu vu à
quelle heure ton gars est rentré? attaqua Laurette en déposant son gâteau dans
le four.
     
    — Non, je
dormais.
     
    — A deux heures
du matin, maudit verrat! Est-ce qu'il prend la maison pour un hôtel, lui?
     
    — C'est pas la
fin du monde, temporisa Gérard, ennuyé par la perspective d'une scène imminente.
     
    — Bonyeu, Gérard!
As-tu pensé à l'exemple qu'il donne aux autres?
     
    — Écoute. Il va
avoir dix-neuf ans cet été. C'est plus un enfant. En plus, on sait qu'il boit
pas et qu'il fume pas.
     
    Qu'est-ce que tu
veux qu'il lui arrive? Laisse-le souffler un peu. Arrête de le couver. Il a
peut-être trouvé une fille...
     
    — On sait ben.
Pour toi, c'est normal. Il pourrait arriver n'importe quoi à un des enfants, tu
dirais rien.
     
    — Achale-moi pas
le matin quand je viens juste de me réveiller, lui ordonna son mari en élevant
la voix. Je suis pas d'humeur à t'entendre me crier par la tête.
     
    Au même moment,
Jean-Louis entra dans la cuisine.
     
    Comme chaque
dimanche, il désirait assister à la basse messe pour ne pas avoir à supporter
le long sermon du curé Perreault.
     
    — Tiens! T'es
déjà debout, toi, fit sa mère en scrutant le visage endormi de son fils.
     
    — Je vais à la
basse messe, se contenta de dire Jean- Louis.
     
    — Si je me trompe
pas, ça t'a pas fait une nuit ben longue, lui fit remarquer sa mère d'une voix
mordante.
     
    320 LE TEMPS DES
FÊTES
     
    — Je sais pas,
mentit le jeune homme. J'ai pas regardé l'heure quand je me suis couché.
     
    — Moi, je peux te
le dire, reprit sa mère. Il était deux heures du matin. Veux-tu ben me dire
d'où tu sortais à cette heure-là?
     
    — De chez Jacques
Cormier, avoua son fils en s'assoyant près de la table. On a travaillé toute la
soirée le dernier chapitre de mon livre de comptabilité et à onze heures, on a
décidé d'aller manger des hot-dogs sur la Main. Après, on est revenus chez eux
et on a jasé un bout de temps. Quand je suis parti, les petits chars passaient
plus. Ça fait que j'ai été obligé de revenir à pied.
     
    — Où est-ce qu'il
reste, ce Cormier-là? demanda son père.
     
    — Sur Beaudry,
proche de De Montigny. Ça fait une sacrifice de bonne marche.
     
    — Il a quel âge,
ce gars-là? lui demanda sa mère.
     
    — Trente et un,
trente-deux ans. Je sais pas exactement.
     
    — Et sa femme dit
rien de te voir traîner chez eux deux ou trois soirs par semaine depuis deux
mois? reprit Laurette.
     
    — Il est pas
marié, m'man.
     
    Laurette assimila
l'information et n'ajouta rien. Elle ne pouvait tout de même pas reprocher à
son enfant préféré d'avoir plus d'ambition que tous les autres réunis. Elle
devinait qu'il ne voulait pas d'une petite vie terne comme celle de son père.
Comme il n'avait jamais eu de talent, elle comprenait qu'il lui faille
travailler encore plus fort que les autres pour obtenir le poste en
comptabilité qu'il désirait tant.
     
    — J'espère, en
tout cas, que ça achève ces études-là, fit Gérard. On commence à trouver que tu
rentres pas mal 321 tard pour un gars de ton âge. Nous autres, on doit penser
aux plus jeunes et à l'exemple que tu leur donnes.
     
    — Oui, oui, p'pa,
j'ai presque fini, déclara Jean-Louis.
     
    Dans quinze jours,
je vais passer mon entrevue.
     
    Laurette fit un
signe discret à son mari de laisser tomber. Le père et le fils quittèrent la
maison pour l'église quelques minutes plus tard. A leur lever, les autres
furent attirés dans la cuisine par la bonne odeur du gâteau aux épices en train
de cuire dans le four.
     
    — C'est une vraie
torture de nous faire sentir ça un dimanche matin quand on est obligé de
jeûner, dit Denise en s'étirant.
     
    — Vous allez
pouvoir en manger au dessert à midi, dit sa mère. J'espère que vous vous
rappelez que ceux qui vont trouver la fève et le pois vont être le roi et la
reine de la journée et auront rien à faire jusqu'à demain matin.
     
    — Moi, je me
rappelle surtout

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