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Amours Celtes sexe et magie

Titel: Amours Celtes sexe et magie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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la même fortune et la même naissance que son mari, elle est sur le pied d’une complète égalité. Elle peut établir de sa propre autorité tout contrat présumé avantageux pour le couple, et donc pour la famille tout entière. Le consentement du mari n’est nécessaire qu’en cas de contrat jugé défavorable pour l’un ou pour l’autre. Parallèlement, la femme a le droit d’exiger l’annulation de tous les contrats passés par le mari et concernant sa fortune à lui, mais qu’elle jugerait désavantageux. Le couple repose alors sur un partage équilibré des responsabilités.
    Mais lorsque l’épouse est inférieure par le rang qu’elle occupe dans la hiérarchie sociale, et si sa fortune est inférieure à celle de l’homme, ses droits sont beaucoup plus réduits   : elle est alors soumise au bon vouloir du mari. Ainsi s’explique la fameuse dispute entre le roi et la reine de Connaught, dans le récit de La Razzia des bœufs de Cualngé , à propos de l’évaluation de leurs biens réciproques. La reine s’aperçoit qu’il lui manque quelque chose d’essentiel, en l’occurrence un taureau plus ou moins divin, alors que le roi en possède un équivalent. Cette infériorité – momentanée – de la reine Maeve débouche alors sur une guerre inexpiable entre le Connaught et l’Ulster, où se trouve le taureau, le « Brun de Cualngé », convoité par la reine afin de rétablir, du moins provisoirement, l’équilibre de son couple. L’affaire se conclut d’ailleurs sur un match nul, le taureau du roi Ailill et celui de Maeve disparaissant l’un et l’autre après un combat à mort.
    Par contre, lorsque la femme est propriétaire de plus de biens que n’en possède son mari, c’est elle qui est nettement le chef de famille, sans aucune contestation possible. L’autorité du mari est à peu près nulle et sa marge de manœuvre considérablement amoindrie. On l’appelle fer fognama , c’est-à-dire « homme de service », ou encore fer for banthincar , « homme sous puissance de femme ». Dans de nombreux récits épiques, c’est souvent la situation du roi Ailill, qui n’a absolument rien à objecter aux décisions que prend son épouse, la reine Maeve. Cet état de fait, parfaitement légal, est incontestablement la marque d’une situation privilégiée de la femme mariée, non seulement maîtresse de son propre destin, mais aussi du destin de son mari, et par voie de conséquence, de celui de la famille. Il s’agit sans doute là du souvenir d’un état social antérieur où la femme jouait un rôle plus considérable dans la vie quotidienne. Il est peut-être hasardeux de prononcer en pareil cas le mot de « matriarcat », mais cela y ressemble singulièrement. Il faut admettre que les peuples celtes, indo-européens et donc régis par un système patriarcal, se sont trouvés confrontés, lors de leur arrivée en Europe occidentale, à des populations autochtones dont les structures sociales étaient nettement gynécocratiques. Il a donc fallu trouver un moyen terme, et convenir d’un compromis entre deux idéologies par principe opposées l’une à l’autre.
    La situation est à peu près la même au pays de Galles et en Bretagne armoricaine, du moins jusqu’au XII e  siècle, où l’influence anglo-normande devient prépondérante sur les coutumes et les institutions locales. Mais les vieilles règles celtiques persistent toujours à travers des adaptations plus ou moins provisoires. Le cartulaire de l’abbaye de Redon, qui date du IX e  siècle, et qui constitue un document des plus précieux pour la connaissance de cette époque quelque peu obscure, donne ainsi des exemples de femmes mariées qui possédaient des biens propres et pouvaient en disposer à leur gré et même les aliéner sans le consentement du mari. De plus, les femmes bretonnes pouvaient régner, si elles appartenaient à une lignée royale, et surtout si elles étaient élues, c’est-à-dire choisies comme représentantes de la communauté. Et elles pouvaient associer leurs époux à la royauté dont elles étaient les uniques détentrices. Elles avaient également la possibilité d’hériter elles-mêmes des biens familiaux si elles n’avaient pas de fils.
    Le souvenir de ce matriarcat primitif (le terme étant pris sous toutes réserves) se manifeste encore dans la préférence accordée à la famille de la femme en cas de succession, lorsque le mari vient à disparaître, et

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