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Azincourt

Azincourt

Titel: Azincourt Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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à
ceux de mes hommes qui me rapportent leurs doigts. Bien des paysans de
Normandie et Picardie manquent de doigts parce que mes hommes trichent,
ajouta-t-il avec un sourire carnassier. Sais-tu qu’elle est ma fille ?
    — Je le sais.
    — Et la plus jolie de
toutes ! J’en ai neuf, que je sache, mais une seule de mon épouse. Mais
celle-ci (il regarda Mélisande qui n’avait pas baissé son arbalète), celle-ci,
j’ai voulu la protéger du monde.
    — Je le sais, répéta Hook.
    — Et elle devait prier pour mon
âme, mais il semble qu’il me faille engendrer d’autres filles si mon âme doit
être sauvée. (Mélisande cracha quelques mots qui ne le firent que sourire
davantage.) Je t’ai mise au couvent parce que tu étais trop jolie pour être
troussée par quelque serf puant et trop mal née pour épouser un gentilhomme.
Mais il semble que tu aies malgré tout trouvé le paysan, ajouta-t-il avec un
regard méprisant à Hook. Le fruit a été cueilli, mais quoi qu’il en soit tu es
toujours mienne.
    — Elle est à moi, dit Hook.
    — Que dois-je faire
alors ? continua Lanferelle sans lui prêter attention. Te ramener au
couvent ? Allons, tu ne tireras point, dit-il en voyant Mélisande lever un
peu son arbalète.
    — Je le ferai, dit Hook.
    C’était une menace creuse, car il
n’avait aucune flèche à son arc.
    — Qui sers-tu ? demanda
Lanferelle.
    — Sir John Cornewaille,
répondit fièrement Hook.
    — Sir John ! fit
Lanferelle. Ah, en voici, un homme. Sa mère dut coucher avec un Français !
J’aime bien sir John ! Mais qu’en est-il de ma petite novice, hein ?
    — Je détestais le couvent.
    — Tu y étais en sûreté, se
rembrunit Lanferelle. Tout comme ton âme !
    — En sûreté ! protesta
Mélisande. À Soissons ? Toutes les nonnes y furent violées ou tuées !
    — Le fus-tu ? demanda
Lanferelle d’un ton menaçant.
    — Nicholas l’a empêché,
dit-elle en désignant Hook. Il l’a tué.
    Les yeux noirs s’attardèrent un
instant sur Hook puis revinrent sur Mélisande.
    — Alors que veux-tu ?
demanda-t-il, comme agacé. Un époux ? Quelqu’un qui veille sur toi ?
Que dis-tu de celui-ci ? demanda-t-il en désignant son écuyer. Peut-être
devrais-tu l’épouser. Il est bien né, mais point trop. Sa mère était fille de
sellier.
    L’écuyer, qui ne comprenait
manifestement pas cette conversation en anglais, regardait Mélisande d’un œil
vide. Il ne portait pas de casque, mais un simple camail sur sa grosse tête au
nez écrasé marquée par la petite vérole. Mélisande fit une grimace et débita en
français quelque chose qui amusa son père.
    — Elle dit qu’elle veut
demeurer avec toi, traduisit Lanferelle. Mais tout dépend de mon bon vouloir.
Encore faut-il que je te laisse la vie.
    Hook songea qu’il pourrait se jeter
sur Lanferelle et lui enfoncer la pointe de corne de son arc dans la gorge,
quand une voix résonna dans sa tête. « Non ». Ce n’était qu’un
chuchotement, mais il reconnut sans peine la voix de saint Crépinien qui
s’était tue pendant si longtemps. Hook faillit tomber à genoux de
reconnaissance. Son saint était revenu. Lanferelle sourit.
    — Songeais-tu à m’attaquer,
Anglais ?
    — Oui, avoua Hook.
    — Et je t’aurais tué. Peut-être
le ferai-je, d’ailleurs. (Il se détourna vers la route où attendaient les
chariots au-delà des arbres. Des cris s’élevaient et des flèches sifflaient.)
Combien êtes-vous là-bas ?
    Hook pensa mentir, mais se
ravisa : Lanferelle finirait par découvrir la vérité.
    — Quarante archers.
    — Pas d’hommes d’armes ?
    — Aucun.
    Lanferelle haussa les épaules avec
indifférence.
    — Alors vous capturez Harfleur,
et ensuite ? Vous marcherez sur Paris ? Rouen ? Tu l’ignores.
Mais je le sais. Vous marcherez. Votre Henry n’a pas dépensé autant pour
s’emparer d’un port minuscule. Il lui faut davantage. Et quand vous marcherez,
Anglais, nous serons sur vous, de toutes parts comme loups sur brebis, et vous
mourrez les uns après les autres. Et ma fille mourra parce que tu seras trop
faible pour la protéger ?
    — Je l’ai protégée à Soissons,
dit Hook. Pas vous.
    La colère fit trembler le visage de
Lanferelle et son épée vacilla un instant.
    — Je l’ai cherchée, se
défendit-il.
    — Pas assez, rétorqua Hook. Car
moi je l’ai trouvée.
    — Dieu l’a conduit à moi, dit
Mélisande.
    — Oh, Dieu ? ironisa
Lanferelle. Tu

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