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Bombay, Maximum City

Titel: Bombay, Maximum City Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suketu Mehta
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pratiques d’extorsion. Quelques récalcitrants qui refusaient de payer ont été tués. Les discours prononcés à cette occasion composent un curieux mélange de soumission servile et de menace voilée. Les Bombayites comparent volontiers leur police à Scotland Yard. Combien de fois n’ai-je entendu, dans mon enfance, que nos services de police étaient « les meilleurs au monde après Scotland Yard » – probablement une formule qui résumait en les déformant les résultats d’une enquête conduite en Occident. Les hors-la-loi eux-mêmes reprennent cette phrase comme s’il s’agissait d’une vérité établie. Le peu recommandable Amol, que des policiers ont un jour attaché à deux pneus suspendus en l’air avant de le battre sauvagement, me le répète avec une fierté évidente : « Les flics de Bombay sont les meilleurs après Scotland Yard. » Les choses semblent d’ailleurs avoir encore progressé, puisque lors de ce meeting entre hommes d’affaires et représentants de la loi d’aucuns affirment que nos forces de l’ordre « surclassent les services de Scotland Yard ». Pourtant, les patrons grands et petits ne décolèrent pas. En représailles, ils menacent de ne plus verser à l’administration fiscale du Maharashtra les taxes sur les produits commercialisés.
    Pendant ce temps, la population qui continue de vaquer à ses affaires se persuade de la réalité de la menace. Les gros titres des journaux et les fictions cinématographiques arrangent les gangsters autant que les flics : les premiers parce qu’ils y gagnent en envergure (ils vivent de la peur, après tout, ils en font leur miel) ; les seconds parce que l’opinion leur concède désormais le pouvoir suprême, le droit de vie et de mort en l’absence de procès. Je crois comprendre ce qui se passe : la ville s’évertue à s’imaginer plus violente encore qu’elle n’est.
     
    Un soir, le commissaire suppléant s’est proposé de me raccompagner en voiture jusqu’à Nepean Sea Road. Je lui raconte l’entrevue avec Salaskar. Ajay traite d’« exterminateurs » les spécialistes de la rencontre que sont Salaskar ou Pradeep Sharma et Pradeep Sawant. « Les flics qui font bien leur boulot s’attachent à recueillir les indices et à les interpréter, ils s’obstinent à reconstituer l’ensemble du puzzle. Ces gens-là, dit-il à propos des spécialistes de la rencontre, ce sont des tueurs à gages. Ils reçoivent leurs ordres d’un chef de bande qui veut décimer le gang adverse. » Il a entendu dire que Gawli avait commandité l’exécution de certains de ses hommes, qu’il considérait comme des rivaux potentiels. À cet égard, chaque rencontre organisée par Salaskar ou Pradeep Sharma « s’achève sur un énorme point d’interrogation. Contrairement à ce qu’ils faisaient sans doute il y a quelques années, ils ne peuvent plus dégommer tous azimuts ».
    Ajay a beau être à la tête d’une des six équipes spéciales, il n’a pas la réputation de ses collègues. Pour mener ses enquêtes, il exploite cependant non sans succès la peur qu’inspirent les noms de Salaskar, de Sharma et de Sawant. Tous les suspects que je l’ai vu interroger dans son bureau ont pu croire à un moment ou un autre qu’ils allaient être éliminés sans autre forme de procès. Ajay surveille ses hommes de près et tient le compte exact des coups mortels qu’ils tirent. Il leur refuse la liberté de tuer à discrétion. « Je l’ai dit à tous ceux qui sont sous mes ordres : pas de rencontre sans que le commissaire principal et moi-même en soyons informés. Tant que nous n’avons pas donné le feu vert, c’est non. Il y en a eu vingt-trois dans la juridiction depuis que je suis en fonctions. » En moins d’un an, donc.
    Comment vit-il cette responsabilité ? Ces décisions qu’il est amené à prendre – supprimer un homme ou l’épargner – requièrent « du courage », répond-il. « Ça tient parfois à un fil. L’officier qui décide des rencontres doit avoir beaucoup de force morale. »
    A-t-il lui-même déjà tué quelqu’un ?
    « Pendant les émeutes, on a riposté, répond-il prudemment, en choisissant ses mots. Il y a eu quatre incidents de ce genre, et six tués. On vivait un soulèvement. J’étais commissaire adjoint à la circulation. Quand la situation est devenue incontrôlable à Mahim, mon supérieur m’a dit de ramener le calme là-bas. J’y suis allé. »
    Cela

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