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Bombay, Maximum City

Titel: Bombay, Maximum City Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suketu Mehta
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certaine proportion d’emplois.
    Sa tactique consiste à réagir sur-le-champ, et avec force, à l’actualité. Sous son impulsion, le thème de l’Hindutva donne lieu à une véritable doctrine raciale, mais en réalité il l’a emprunté aux nationalistes hindous du RSS {86} et du BJP. À l’écouter, les événements sont des faits isolés ; il ne cherche ni à les mettre en rapport ni à les expliquer à l’aide d’une théorie ambitieuse ou modeste.
    En 1984, il a invité l’ancien dirigeant communiste S.A. Dange à parler dans un meeting de son parti. Dange était certes un adversaire déclaré du Sena, mais les deux hommes se respectaient dans la mesure où ils estimaient défendre l’un et l’autre les droits des travailleurs, et parce qu’ils avaient tous les deux fait partie du mouvement Samyukta Maharashtra. Quand il prit la parole, Dange exposa crûment le fond de sa pensée : « Le Shiv Sena n’a pas de théorie. Or, faute de théorie, aucune organisation ne peut survivre. »
    Le lendemain, Thackeray riposta : « C’est pure arrogance de sa part de prétendre que le Sena n’a pas de théorie et qu’une organisation qui n’a pas de théorie ne peut pas survivre. Dans ce cas, comment se fait-il que la nôtre survive depuis maintenant dix-huit ans ? » Puis, portant le coup fatal qui sapait à la base l’argument du vieux communiste, il ajouta : « Et comment se fait-il que votre organisation soit finie, elle qui avait une théorie ? »
    Le Sena a survécu et prospéré grâce précisément à cette absence de théorie, ou plus exactement parce qu’il a su s’adapter à des théories fluctuantes : pour l’heure il soutenait vaguement le capitalisme, mais au début des années quatre-vingt Thackeray ne jurait que par le « socialisme pratique ». Depuis toujours le Sena se raccroche à la dernière théorie en vogue : tour à tour et simultanément, il fut anticommuniste, fasciste, socialiste, contre les immigrés ; aujourd’hui il est spécifiquement anti-musulman et pro-hindou. Pourquoi s’embarrasser d’une théorie quand la praxis fait l’affaire ? Ce qui plaît à Bal Thackeray, ce sont les résultats.
    Moi aussi, parfois, je brûle de passer à l’action. La nuit, après une dure journée où j’ai dû me traîner dans la ville grouillante, partagé entre la colère et la frustration à cause des délais administratifs, des blocages politiques, pour trouver le sommeil je m’octroie des pouvoirs dictatoriaux : j’abolis la loi sur les baux locatifs ; je ferme le centre-ville aux voitures ; je nomme des juges compétents à la Haute Cour et d’un revers de main je balaie les dossiers en souffrance. Je transfère la mairie à New Bombay, le gouvernement de l’État à Pune. Je démolis les usines, j’ouvre des parcs, des écoles, et surtout je construis des logements : des milliers et des milliers d’immeubles de six étages, avec un terrain de jeux pour six immeubles. Un immense Levittown {87} pas cher et vite bâti, avec d’infimes modifications du schéma. Tous ceux qui vivent déjà sur place auront un toit. Les autres ne peuvent pas venir s’installer tout de suite ; je vais m’employer à leur trouver de la place. Pour ces vastes projets, je me passerai de l’aval des légistes. Je sais ce que je dois faire, je n’ai pas besoin de consensus. Assez parlé, à présent. Je vais agir – ça m’aide à m’endormir.
     
    Si le parti du Congrès fut porté au pouvoir au Maharashtra en 2000, c’est entre autres parce qu’il avait promis que le rapport de la commission Srikrishna ne resterait pas lettre morte. Mensonge. Selon Amnesty International, « plus de quatre ans après la publication du rapport de la Commission, en 1998, le gouvernement du Maharashtra n’a pris aucune décision importante pour mettre ses recommandations en œuvre ».
    La commission citait nommément trente et un policiers coupables d’avoir tué des innocents, soutenu un des camps en présence, négligé leur devoir ou participé activement aux troubles. En 2001, dix-sept de ces hommes ont été officiellement inculpés, mais en 2003 aucun n’avait été jugé. Dix d’entre eux ont même bénéficié d’une promotion. La plupart des émeutiers ont été inculpés en raison de la loi « sur la prévention des troubles à l’ordre public et des activités terroristes » que la presse s’accorde en général à trouver « draconienne ». Au total, deux mille

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