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Bombay, Maximum City

Titel: Bombay, Maximum City Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suketu Mehta
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« ville polynucléaire », avec des zones commerciales implantées au-delà de South Bombay, à Bandra-Kurla, Andheri ou Oshiwara. La plus belle réserve de terrains encore disponibles à Bombay correspond cependant aux zones industrielles : quelque deux cents hectares idéalement situés, occupés par des usines dont très peu sont encore en activité. Ces espaces sont aujourd’hui piquetés de structures sveltes et brillamment colorées, très postmodernes dans leur conception mais parfaitement hors contexte, mal assorties aux chawls de deux ou trois étages, perdues au milieu des bananiers, des rues étroites et des toits des usines qui ondulent à perte de vue. Ce sont pour la plupart des résidences « de standing ». Quelques milliers de personnes vivent aujourd’hui sur les lieux où des millions d’autres travaillaient autrefois. J’ai visité un appartement, dans un de ces immeubles, et j’ai été consterné de découvrir le manque d’imagination dont témoignait son agencement : des pièces exiguës éclairées par des fenêtres plus grandes que la moyenne, complètement inadaptées à un pays où le soleil est l’ennemi numéro un la plus grande partie de la journée.
    Les ouvriers ne pensent pas qu’il est révolu, le temps où Bombay était un grand centre industriel ; de leur point de vue, il faut rouvrir les usines, les moderniser. Le gouvernement a élaboré un projet pour les sites de production : transformer un tiers d’entre eux en logements pour les classes défavorisées et les ouvriers licenciés ; permettre aux propriétaires de vendre un autre tiers de ces installations pour en faire des zones résidentielles ou commerciales, tout en consacrant une partie des recettes à la modernisation des usines ; réserver le dernier tiers à la mairie pour un usage public. À ce jour, les usines emploient toujours quarante mille personnes. Leurs responsables jouent la montre et attendent que les travailleurs meurent ou partent à la retraite. Pourtant, avancent ces derniers, le gouvernement ayant cédé ces terrains pour créer des emplois, leurs actuels propriétaires ne peuvent pas en disposer à leur guise. Les ouvriers qui ont accepté de prendre leur retraite avant l’heure empochent un ou deux lakhs, mais cet argent s’évapore vite et quand ils n’en ont plus ils se retrouvent rickshaw wallahs {93} , alcooliques ou délinquants. Avec la loi sur les baux locatifs, ce problème est celui qui pèse le plus lourdement sur l’administration municipale, et c’est aussi le plus désolant. Comment rendre un tant soit peu justice à ceux qui ont construit la ville, dès lors que la ville n’a plus besoin d’eux ?
    Rahul envisage également toute une série de « micro-mesures ». Il devrait être possible de convaincre les entreprises privées d’investir dans l’embellissement de la ville où elles font des affaires ; ou d’améliorer la communication entre la municipalité et les citoyens par le biais d’outils tels que la Charte du citoyen, précisant ce que les gens sont en droit d’attendre des autorités locales. Rahul voudrait avant tout « un vrai plan d’ensemble ». Ceux qui existent sont loin de réaliser cette ambition, insiste-t-il en me donnant l’exemple des échangeurs : le Shiv Sena en a construit cinquante-cinq pour résoudre les problèmes de circulation, mais le résultat laisse pour le moins dubitatif. La plupart de ces passerelles jetées au-dessus des carrefours se trouvent en banlieue, et comme il n’y a pas eu de travaux sur les voies d’accès au centre-ville, leur seul intérêt est de précipiter plus vite les automobilistes dans les embouteillages.
    Bombay est ingérable, incapable d’adaptation rapide. La ville s’est bâtie sur le textile, or les temps ont changé et il faut maintenant la repenser sur la base bien différente de l’information. Ceux qui vivent ici depuis des générations ont du mal à se faire à l’idée que cette agglomération pourvoyeuse de cinq millions d’emplois pourrait reposer sur quelque chose d’aussi immatériel que l’information : pas même des bouts de papier palpables, simplement des flashs lumineux évanescents sur les écrans d’ordinateur. La classe ouvrière vit encore au XIX e  siècle ; ses représentants organisent des manifestations monstres contre la nouvelle économie. Bombay pourrait vivre et prospérer si ses dirigeants étaient à même de convaincre leurs administrés de

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