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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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cheik de Chebreïss.
    Le 14 juillet, il passe la nuit à Chadour, puis, dès le lendemain, reprend la route du Caire. Il presse la marche – une marche épuisante sous l’écrasant soleil – tandis que l’on massacre allègrement des villages entiers « afin, nous dit encore le soldat François, de donner un exemple terrible à ce pays demi-sauvage et barbare ».
    Le 19, Bonaparte se trouve à Wardan – ou Ouârdan. Bourrienne qui se tient à quelque distance de son général – il se trompera en situant la scène plus tard – voit Bonaparte parler à Berthier, puis à son aide de camp Julien, et surtout à Junot. Bonaparte est pâle, plus pâle que de coutume. Il y a même, remarquera Bourrienne « quelque chose de convulsif dans la figure, d’égaré dans son regard ». À plusieurs reprises, il se frappe la tête. Soudain, le visage défait par la colère, blême, Bonaparte s’avance vers lui et lui lance, « d’une voix altérée » :
    — Vous ne m’êtes point attaché. Les femmes !... Joséphine !... Si vous m’étiez attaché, vous m’auriez informé de tout ce que je viens d’apprendre par Junot : voilà un véritable ami. Joséphine !... Et je suis à six cents lieues... Vous deviez me le dire !... Joséphine !... M’avoir trompé !... Elle !... Malheur à eux ! J’exterminerai cette race de freluquets et de blondins !... Quant à elle ! Le divorce !... Oui, le divorce ! Un divorce public, éclatant !... Il faut que j’écrive... Je sais tout !... C’est votre faute ! Vous deviez me le dire !
    Il sait tout, en effet, et il a affreusement mal
    — Eugène l’écrira à sa mère : « Il a été affecté plus que je ne le croyais de cette conversation. Tous les mots que j’ai entendus (reviennent) à ce que Charles est rentré dans ta voiture jusqu’à trois postes de Paris, que tu l’as vu à Paris, que tu as été aux Italiens avec lui dans les quatrièmes loges, qu’il t’a donné son petit chien, que même il est en ce moment près de toi ; voilà en mots entrecoupés tout ce que j’ai pu entendre. »
    Quels que soient les sentiments qui l’animent, Bonaparte doit faire taire son coeur et reprendre la poursuite des Mameluks. Le 20 juillet, il peut annoncer au Directoire : « Nous avons marché pendant huit jours, privés de tout, et dans un des climats les plus brûlants du monde. Au matin, nous aperçûmes les Pyramides. Au soir, nous nous trouvâmes à six lieues du Caire, et j’appris que les vingt-trois beys, avec toutes leurs forces, s’étaient retranchés à Embâbeh, qu’ils avaient garni leurs retranchements avec plus de soixante pièces de canon. »
    Un écrasant spectacle s’offre aux yeux éblouis de l’armée, à l’aube du 21 juillet – 3 thermidor an VI – : d’un côté les pyramides, colossaux et majestueux triangles qui scintillent sous le soleil, de l’autre, derrière le Nil et les remparts, les trois cent cinquante minarets du Caire et, coiffant le tout, la citadelle de Saladin. Douze mille fellahs occupent Embâbeh, plusieurs dizaines de milliers de combattants grouillent dans la plaine, tandis que devant le fleuve occupé par les canonnières d’Ibrahim, la longue ligne de six mille Mameluks étincelants qui s’apprêtent à charger. Bonaparte a-t-il alors dit :
    — Soldats, du haut de ces Pyramides, quarante siècles vous regardent ?...
    En tous les cas, l’armée occupant un front de plusieurs kilomètres, le fameux discours ne fut assurément entendu que par quelques unités ! Les officiers donnent l’ordre : À vos rangs ! En un instant les hommes sont disposés en carré sur six rangs de profondeur, prêts à soutenir le choc. L’ennemi fonce. Lorsqu’il est à cinquante pas, une grêle de balles et de mitraille l’accueille. Le carnage est affreux. Bientôt, les Mameluks en fuite se jettent dans le Nil L’effroyable boucherie s’achève dans le fleuve. « Le combat, racontera un combattant ennemi – Nicolas le Turc – n’avait pas duré plus de deux heures – mais quelles heures de terreur indescriptible ! Les gens sanglotaient, se frappaient le visage en hurlant : « Malheur à nous ! Nous voici prisonniers des Français ! »
    Les quarante siècles peuvent maintenant contempler un extravagant spectacle. Un gigantesque bazar s’établit sur le champ de bataille ; on dépouille, on vend, on troque. « Les uns, nous dit un témoin, se coiffent de turbans, tout sanglants encore ; les autres se drapent fièrement dans des pelisses

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