Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
Vom Netzwerk:
pourtant exilé à quarante lieues de Paris par une manière de lettre de cachet signée par le « petit polisson ».
    La République est déjà un souvenir. Un homme de l’ancienne cour bavardait un jour avec Lucien Bonaparte et lui parlait de la Normandie et du Languedoc, « les plus belles provinces du royaume ».
    — Vous m’excuserez, dit-il à Lucien, c’est une vieille habitude.
    — Oh ! vous n’avez pas besoin d’excuse, répondit le frère du Premier consul avec esprit, cela est tout simple, je me surprends bien quelquefois à parler de république.
    Pour Bonaparte qui se considère déjà l’égal des rois – en attendant d’être leur maître –, la France doit retrouver au plus vite sa place en Europe. Et celle-ci ne peut être que la toute première. Le ministre de la République à Stockholm n’ayant pas été invité avec la famille royale de Suède à un dîner donné en l’honneur de la naissance du Prince héritier – dîner auquel l’ambassadeur d’Angleterre, le prince de Gloucester, avait été convié – le Premier consul s’approcha aux Tuileries de l’envoyé suédois en lui disant à haute voix, de manière à être entendu de tous :
    — Votre Roi a-t-il oublié que la Suède n’est qu’une puissance de troisième ordre ? Faut-il l’en faire souvenir, et lui rappeler qu’il ne saurait traiter avec trop d’égards le représentant d’un État comme la France ?
    On le prend encore de plus haut avec le prince de Reuss qui se décide, après dix années, « à reconnaître la République française ». Tel était d’ailleurs le premier article du traité, en marge duquel Talleyrand, imperturbable, traça ces mots : « Et la République française est en chemin de faire la connaissance avec le prince de Reuss. »

    Bonaparte va-t-il s’installer à Versailles ? Il trouve le château « un monstre affreux » – l’admirable palais paraissait alors aussi démodé que, pour les Parisiens d’aujourd’hui, les anciennes entrées du Métropolitain. Aussi Napoléon préfère-t-il le château de Saint-Cloud, point « moderne » assurément, mais plus à l’échelle humaine. C’est là qu’il fera ses premiers pas de souverain et que J.F. Reichardt, le compositeur allemand républicain, l’a vu, revêtu de son « petit uniforme vert à parements rouges, gilet assez long en drap bleu, culotte de soie noire, bas de soie blancs, petit tricorne à la main, un court sabre de dragon au côté. Il s’est mis à causer avec la première dame qui s’est trouvée à sa portée, lui a fait quelques compliments et des questions qui, d’après ce que j’ai pu entendre moi-même, ou apprendre par d’autres, ont invariablement porté sur le climat de son pays, sur le voyage, sur la durée du séjour à Paris. Son sourire n’a pas varié pendant toute l’audience... Deux préfets du palais, plus petits que Bonaparte, se tenaient à ses côtés ; l’un demandait à la dame que Bonaparte allait aborder son nom, son pays, et le Premier consul la saluait d’une inclination de tête avant de lui parler... Il était amusant d’observer que les sourires les plus gracieux, les mines les plus séduisantes allaient à l’adresse du Premier consul. Quand il approchait, les plus belles embellissaient et les plus impressionnables, surtout parmi les Polonaises, avec leur tête penchée d’un petit air langoureux, leurs grands yeux clairs et expressifs fixés alternativement sur le héros, ou levés au plafond, étaient charmantes... »
    Nombreux sont alors les étrangers qui, en tremblant d’abord quelque peu, viennent visiter cette France nouvelle, dont les frontières leur sont fermées depuis dix années, cette fille turbulente de l’Europe qui a osé jeter au monde la tête d’un roi ! Leurs récits sont d’autant plus précieux que, en abordant la France consulaire et son chef, ils ont un peu la mentalité de l’explorateur découvrant une peuplade inconnue. Sir John Dean Paul pénètre à la Comédie-Française au moment où le Premier consul va se retirer : « C’est un petit homme, comme chacun le sait, écrit-il en parlant de Napoléon, mais son visage respire l’intelligence, et ses yeux reflètent un esprit peu commun. Ses cheveux plats sont sans poudre, et taillés très courts. » De son côté, l’écrivain allemand Kotzebue décrit ainsi le Consul à vie, spectateur à ce même Théâtre-Français : « Il conserve une attitude sérieuse et tranquille, et ne donne

Weitere Kostenlose Bücher