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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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des canons de beauté différents. Cette mosaïque par exemple. Un homme et une femme marchaient devant un portique élégant, l’architecture était impressionnante, les formes humaines rayonnantes des gloires de la chair, les feuilles vertes et dorées, derrière les bâtiments, semblaient s’agiter sous la brise. Cela rappela à Michel la belle Antioche où, par les nuits chaudes, on sentait encore les anciennes débauches de la sensualité. Quelle différence avec les formes d’art austères, atténuées, que l’on voyait aujourd’hui à Rome : l’espace sans air ne laissait respirer que l’esprit, non la chair. Il regarda son oncle. Les orbites profondes de Joannès étaient vides, les paupières repliées sur les iris mortels. Que pouvait-il savoir de l’Ancienne Rome, cet eunuque au pénis minuscule, réduit à un vestige ? N’était-il pas aveugle à la beauté, à la splendeur autour de lui ? Mais pourquoi, dans ce cas, vivait-il au milieu des échos d’un monde païen qu’il ne pourrait jamais atteindre, même par l’imagination ? La raison en était évidente. Pendant son séjour au monastère, Joannès en était venu à mépriser l’Église et même ses symboles. Et c’était la raison pour laquelle le Pantocrator, dont Michel avait entendu la voix au milieu des hosannas des séraphins dans l’église Sainte-Sophie, avait décrété que Joannès, moine sans foi, devait mourir.
    — Mon oncle, je suis desséché. Puis-je vous attendre dans le bain de vapeur ?
    Joannès acquiesça d’un signe sans ouvrir les yeux. Son énorme tête ballottait. « Même la bête à sept têtes a ses instants de repos », se dit Michel. Il se leva et entra dans la vaste salle voûtée qui contenait la baignoire chaude pour la toilette et la piscine froide pour la nage. Éclairées par des candélabres, les mosaïques des murs, qui représentaient toutes des scènes séculières, prenaient un caractère sacré, et Michel comprit que même en ce lieu le Pantocrator était avec lui et le guidait. Il vit la boîte de bois sur le rebord de marbre de la baignoire. Quelle ruse habile ! Un conspirateur idiot aurait apporté le savon en présent. Il avait agi de façon plus subtile, plus complexe. Le césar était assez habile pour gouverner Rome, ceci en donnait la preuve. Même si Joannès le soupçonnait, il ne s’attendrait jamais à cela. À la strangulation peut-être, ou à un poignard dissimulé dans une serviette.
    Idiot. Quand Joannès mourrait, il comprendrait pendant un instant à quel point il avait été idiot de fixer d’un regard ironique les yeux qui le plongeaient dans les lacs de feu.
    Michel entra dans la piscine. « Reste à distance, surtout quand les convulsions commenceront à attirer les serviteurs. On le verra mourir sans que personne ne le touche. » Il nagea, puis se laissa flotter. L’eau était si vivifiante, il se sentait si alerte. Allait-on le couronner de nouveau ? Oui, c’était forcé. Il ne serait plus seulement césar mais empereur, basileus, autocrator. Sa main dans celle du Pantocrator. Michel s’aperçut qu’il avait une érection et il caressa son membre qui durcissait. Il aimait ces caresses soyeuses, furtives. Il se rappela (comme souvent) les corrections que son père lui avait données quand il s’était aperçu que le césar – Michel avait toujours été le césar, n’est-ce pas, de même que le Christ avait toujours été le Seigneur – se caressait au bain public d’Amastris, l’établissement sale, bon marché auquel ils étaient obligés d’aller, en apportant leurs propres seaux, leur savon graisseux et leurs serviettes de toile sale. Son père Stéphane, le calfateur de bateaux, ne l’avait pas simplement taloché, il avait lancé son poing puant de poix sur le visage du césar. Et il avait tout raconté au chantier naval, où on l’avait soulevé au-dessus du baquet nauséeux de poix à calfater en le menaçant de la lui couper. Et ensuite, ils la lui avaient passée au goudron. Oui, son père et les hommes lui avaient passé le membre au goudron pour qu’il ne puisse plus le toucher. C’était diablement chaud, et le césar s’était enfui à la maison et avait tout raconté à sa mère (le Pantocrator et lui aimaient tellement leur mère, ils se ressemblaient sur ce point). Elle l’avait conduit au bain et lavé elle-même, comme quand il était plus petit. Elle avait touché son membre et l’avait nettoyé. Et ensuite, elle

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