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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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l’accepterait comme un allié précieux et respecté. Mar ! Pas un mot de lui non plus… Il ne pouvait en parler à personne, et chaque heure qui passait redoublait à présent son angoisse. Il pouvait presque sentir que son destin était déterminé par des forces qui échappaient à son contrôle, hors d’atteinte et même entièrement inconnues de lui. Mar comptait-il utiliser Haraldr à ses fins ? Ou bien d’autres éléments du pouvoir avaient-ils pris en main les fils de son avenir et de celui de ses cinq cents fidèles ? Deux jours plus tôt il était un dieu triomphant. Maintenant, il attendait au pied des murailles de la Ville impériale comme les mendiants devant sa propre porte – pareil à un enfant pleurant pour le sein de sa mère.
    — Haraldr Nordbrikt ! Haraldr Nordbrikt ! Il faut que vous parliez à Euthymios.
    La Marmotte lui tirait la manche.
    Haraldr sortit son épée du fourreau et en vérifia l’éclat et le tranchant à la lumière de la lampe à huile qu’on venait d’allumer.
    — Est-ce qu’Euthymios est un marchand ? Ou l’agent d’un propriétaire terrien ? Ou un contrôleur des impôts ? Ou une pute ? S’il est l’un d’eux, je vais essayer le fil de mon épée sur sa gorge.
    — Non, non, Haraldr Nordbrikt, absolument pas. Vraiment. C’est Euthymios. Le seul Euthymios. Vous ne pouvez pas imaginer ce que représente sa venue ici. Vite, Haraldr Nordbrikt, vite !
    L’homme qui s’avança d’un pas saccadé était grand et visiblement osseux sous sa robe raide de soie couleur prune. Il se déplaçait de façon si étrange que pendant un instant Haraldr se demanda si ce n’était pas une des créatures de métal de l’empereur. Ce caractère artificiel était accusé par le visage de l’homme : jamais Haraldr n’avait vu autant de fards sur la peau d’un homme ou d’une femme. Comme si Euthymios avait été laqué et trempé dans de la cire. Ses longs cheveux dorés paraissaient à peine plus réels – avaient-ils été filés dans du cuivre ?… Et sa barbe pointue, de la même couleur, comme sculptée au burin. Il parla aussitôt en grec, sans attendre d’y être invité, et ses mots parurent sortir d’un grand entonnoir de fer-blanc.
    — Haraldr Nordbrikt, massacreur de Sarrasins, auprès de qui le bouillant Achille, le subtil Ulysse et même toute l’armée des Achéens à la puissante gloire ne sont que brumes fantômes brûlées par l’oubli dans l’éclat solaire de ta renommée ! Levez-vous, ô anciens résidents de l’Olympe, un homme qui vit parmi nous est le digne successeur de votre Héraclès ! Lève-toi, ô Chrétienté, pour embrasser ton champion ! Lève-toi, ô firmament qui illumines nos misérables vies. Un nouveau luminaire vient de prendre sa place en ton sein.
    Euthymios s’avança, se prosterna à terre et passa les bras autour des bottes neuves d’Haraldr.
    — Haraldr Nordbrikt, je vous salue avec autant de félicité qu’il en faut pour dépasser l’immense édifice de vénération déjà consacré à votre immortelle mémoire !
    Haraldr ne comprit que des bribes de ce discours. On lui avait parlé d’Ulysse, d’Achille et d’Héraclès, héros des Grecs de l’Antiquité, et il connaissait les mots fantôme et solaire. Mais il n’avait pas besoin de traduction pour comprendre qui était cet Euthymios. Il avait enfin rencontré un scalde romain.
    — Dis-lui que je le remercie pour son poème, lança Haraldr à la Marmotte. Malheureusement, j’ai déjà Ulfr et Thorfinn qui me servent de scaldes, et sans doute Grettir avant longtemps. En outre, étant donné son allure, je n’aurais pas les moyens de l’entretenir. Mais dis-lui bien que son poème plairait beaucoup à Odin, le patron de nos poètes.
    — Non, non, Haraldr Nordbrikt, c’est Euthymios. L’organisateur des plaisirs et des jeux, le chef d’une armée de joie. Et il t’offre l’un de ses spectacles, représenté à l’Hippodrome et dans tout l’empire. Théâtre. Danse. Chant. Comédie. Drame. Une création spéciale pour te distraire et distraire tes hommes. Crois-moi, Haraldr Nordbrikt, c’est l’honneur le plus précieux.
    * *
*
    — Merci, Nicétas.
    Maria, d’un geste plein de grâce, chassa l’eunuque qui s’avançait, alarmé. Il s’inclina et se retira dans la villa. Maria se tourna vers Giorgios.
    — Comment m’as-tu trouvée ?
    Giorgios avait le visage rouge après sa course sur l’escalier de marbre.

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