Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986
Parti socialiste. Il n'est pas mécontent, finalement, d'être la cible de tout le monde, de la gauche à la droite, de Georges Marchais à Valéry Giscard d'Estaing.
« Je les embêterai encore », répond-il suavement lorsque je lui dis que les analyses de Georges Marchais et de Giscard passent par son élimination.
Il laisse encore tomber : « Moi, je n'ai rien !
– Vous n'avez que vous, lui dis-je, ce n'est pas si mal... »
Retour à Paris dans la nuit, directement de Montsauche. Arrivée à 2 heures du matin.
18 octobre
Convention du Parti républicain où je rencontre Jacques Douffiagues 17 . Il me semble préoccupé par la tournure actuelle du giscardisme : « Il faut revenir à l'esprit de 1974, insiste-t-il, c'est-à-dire redonner une coloration réformiste à notre action. »
Il ne cache pas qu'il y a beaucoup de points d'accrochage à l'intérieur du Parti républicain. Entre les vieux et les jeunes, cela va de soi : quels points communs entre les anciens Républicains indépendants et les jeunes giscardiens d'aujourd'hui ? À propos du service national, du salaire de la mère de famille, de la taxe sociale sur le chiffre d'affaires, tout a posé problème entre les anciens et les modernes – mais pas seulement : aussi entre les libéraux et les sociaux, les réformateurs et les réactionnaires. Le giscardisme n'est pas homogène, il faut bien que les uns et les autres en prennent leur parti.
Reste l'affaire de la représentation proportionnelle qui revient à tous les instants, parce que ce serait effectivement, pour les amis de Giscard, la seule façon de reprendre une autonomie complète vis-à-vis du RPR dont ils craignent tout. Aujourd'hui, le Parti républicain, convaincu de la nécessité de dédramatiser la situation entre giscardiens et chiraquiens, a adopté une position mi-chèvre, mi-chou : « Le PR souhaite une réforme électorale pour une plus juste représentativité de toutes les tendances de l'opinion, mais aussi la constitution de majorités basées sur des idées communes. »
Après lui, je rencontre un curieux personnage, Michel Pinton, responsable des études électorales. Je dis curieux personnage, car il détonne dans le milieu giscardien ambiant : il ne sourit pas, ne cherche pas à plaire, il arbore une mine toujours sombre. Il est là pour faire de la comptabilité électorale à six mois des législatives, et il joue avec ses petits chiffres, voilà tout. Selon la Sofres, Démocospie, l'institut Harris ou l'IFOP, me dit-il, les projections nationales donnent le RPR et les Républicains indépendants au coude à coude : 21 % pour les giscardiens, 20 % pour les chiraquiens. Mais il s'agit là de projections nationales. Dans les circonscriptions, me dit-il, les équilibres ne seront peut-être pas ceux-là. En tout cas, l'essentiel est d'obtenir plus d'élus que le RPR. Sur ce point, sa démarche est claire, sans fioritures.
« Évidemment, convient-il, la prime aux sortants va aux députés RPR : face à eux, nous ne devons pas apparaître comme des diviseurs, mais incarner le renouvellement. »
Quant aux « primaires » entre RPR et giscardiens, il lui semble, comme à chacun, qu'il vaudrait mieux qu'elles ne soient pas « sauvages » : « Le pluralisme organisé, oui ; la cacophonie, non. »
Lorsque je lui demande s'il a des problèmes avec les centristes pour les investitures, il me répond qu'il n'y a de lutte entre le CDS et les giscardiens que dans des circonscriptions où le RPR est trop faible ou absent. Ailleurs, nécessité fait loi : lorsque le candidat gaulliste est fort, CDS et giscardiens s'accordent sans trop de difficulté.
Et les radicaux de droite ? Il est direct : « Pour l'instant, je n'ai pas vu de listes de candidats radicaux sérieux, j'entends : excédant la vingtaine. »
Sur 490 circonscriptions, évidemment, c'est peu. Pas assez pour menacer Chirac.
Propos recueillis auprès d'André Diligent 18 , centriste s'il en est, quelques heures après la fin de la convention du Parti républicain. Carré, épais, avec cette élocution lente qu'ont les gens du Nord même lorsque – c'est son cas – ils sont avocats, il a une rondeur, une onction toute « catho ». Il paraît que, dans la vie publique locale, il est beaucoup plus agressif qu'il n'en a l'air contre les « socialo-communistes » ! (C'est Pierre Mauroy qui m'a dit ça à plusieurs reprises.)
« De Gaulle m'a appris une chose, me
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