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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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pour Mauroy, la fin du chemin.
    Présage qui ne m'a pas trompée : j'ai cassé le talon (haut) de l'unique paire de chaussures emmenée à Rome. C'est en claudiquant que j'ai rejoint dans la Ville Éternelle la suite du Premier ministre qui ne l'était pas, lui, éternel.
    Heureusement, les magasins de chaussures ne manquent pas à Rome, notamment près de l'ambassade de France. Moins d'une demi-heure plus tard, j'avais réparé le mal. C'est idiot, mais à partir de cet incident, ce voyage commençant mal, j'étais sûre qu'effectivement les jours de Mauroy étaient comptés ! Car pas question d'un Mauroy IV, comme il y eut, l'année dernière, in extremis , un Mauroy III !
    À Rome, Gilles Martinet l'accueille chaleureusement. Lui aussi, apparemment, pense que si Mauroy revient un jour à Rome, ce ne sera plus en qualité de Premier ministre.
    Au Palais Farnèse, je retrouve, en dehors des « mauroyistes » qui l'ont accompagné, Marcel Rigout 5 qui me raconte le dernier comité central du PC, après les européennes, au cours duquel, ô miracle, cette instance a désavoué les conclusions du bureau exécutif. Rigout me dit que, depuis qu'il est au PC, il n'a jamais vu ça !
    Entre Georges Marchais, dont la moitié des membres du comité central demande le départ, et Charles Fiterman, la lutte est ouverte. Lucien Sève, le fidèle, est pourtant le premier à stigmatiser les « conservateurs » du Parti : « Nous allons mourir de soif à deux pas de la source ! » dit-il.
    Traduction : nous avons gagné en 1981, nous sommes tout à côté du pouvoir, et même au pouvoir. Et nous allons maintenant le perdre.
    Dans l'avion qui nous ramène de Rome, nous parlons longuement avec Marcel Rigout. Il dénonce pêle-mêle la langue de bois des dirigeants communistes, l'erreur de stratégie du PCF qui n'a jamais voulu fédérer des courants, qui a cru qu'il pouvait les dominer sans les entendre : « Nous sommes des cons, vous entendez, des cons ! », répète-t-il aux journalistes médusés.
    Il est émouvant, disert, sympathique. Cela sent le sapin.

    17 juillet
    Effectivement, c'était le dernier voyage du Premier ministre. Il a démissionné aujourd'hui. Coup sur coup, en cinq jours, Mitterrand a retiré le projet de loi sur l'éducation d'Alain Savary, qui avait été adopté en première lecture à l'Assemblée fin juin et avait mis des centaines de milliers de personnes dans la rue. Annonce qui a surpris d'autant plus que le président de la République avait dit et redit qu'il ne le retirerait pas. Il faut croire que la mobilisation des tenants de l'école privée, qu'il ne pensait pas aussi massive, à plusieurs mois des élections législatives, l'a fait réfléchir. Et reculer.
    Il a annoncé, pour faire bonne mesure, un référendum sur l'article 11 de la Constitution, c'est-à-dire un référendum sur la procédure du référendum. Il faut l'inventer !
    Il a accepté le départ de Mauroy, pris à contrepied par l'abandon de la loi Savary. Et précipité celui des communistes du gouvernement. De ce côté, pas de surprise : c'était une question de jours.
    Mitterrand regrettera Mauroy.
    Laurent Fabius arrive, il est déjà installé, comme s'il avait fait cela toute sa (courte) vie 6 .
    Sans doute est-ce le grand coup annoncé par Mitterrand. Maurice Faure avait parlé d'un référendum, Mitterrand choisit d'en faire un autre, mais la volonté est la même : tenter de reprendre la main avant les législatives, qu'il juge mal engagées. Mieux vaut périr tout de suite ou gagner tout de suite : telle est la stratégie retenue.
    L'astuce du référendum suffira-t-elle ? Ne risque-t-on pas d'être trop habile ? En tout cas, une nouvelle page de l'ère Mitterrand s'est ouverte.

    1 er  août
    La loi autorisant la publicité sur les nouvelles radios locales privées est enfin passée au Journal Officiel . C'est fou ce qu'il a fallu de temps pour démontrer que la réforme de 1982 accordait beaucoup de choses aux radios privées, sauf la possibilité de vivre ! Fou de voir aussi comment la décision a été prise de leur permettre de faire de la pub légale.
    Au début, en 1982, Fillioud était pour, Mauroy était contre, pour éviter que ces radios ne deviennent commerciales. « Pas de radio-fric », avait dit le Premier ministre. Fillioud, évidemment, s'est rangé à la position gouvernementale qu'il n'était pas parvenu à influencer. À l'argument que la Haute Autorité a avancé dès

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