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Camarades de front

Camarades de front

Titel: Camarades de front Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sven Hassel
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le téléphone et prit la place de la servante. Elle tirait énergiquement sur son voltigeur.
    Le S. S. la fixa avec insistance. Son assurance semblait décroître devant la petite femme grasse aux yeux brutaux qui le toisait avec indifférence.
    – J’ai dit cinq doubles.
    Tante Dora, lentement, retira son cigare et lui souffla la fumée dans la figure : – Non.
    Tout le monde leva la tête. Le « non » de Tante Dora avait éclaté comme un coup de carabine. Le légionnaire découvrit ses dents. Il se leva aussi et prit le tabouret voisin de celui qu’occupait l’oberschar.
    – Un type à la coule ? demanda-t-il à Tante Dora en indiquant l’homme d’un signe de tête.
    – Non, mais certainement bête.
    – Qui est bête ? Hé, souteneur femelle ? cria le S. S.
    Tante Dora lui souffla de nouveau la fumée dans la figure.
    – Toi. Si tu avais été malin, il y a longtemps que toi et tes types vous auriez filé d’ici.
    De l’arrière-boutique sortit Trude qui fit un signe imperceptible à Tante Dora et eut un regard empreint de joie maligne vers les S. S. Leur chef se redressa avec fureur.
    – Tu menaces, vieille peau ? Il est grand temps que tu viennes faire un tour chez nous. Je m’occuperai de. toi personnellement, ma grosse !
    Ses gars rirent bruyamment et Fun d’eux posa sa mitraillette sur le bar. Le légionnaire la poussa négligemment, ce qui la fit tomber sur le sol avec fracas.
    – Espèce de pou ! cria le S. S.
    Tante Dora lança un regard à Trude laquelle, de nouveau, hocha la tête.
    – Assieds-toi et ramasse ton flingue, commanda le S. S. à son homme. – Il se tourna vers Tante Dora. – Et ces doubles ? Faut-il aller les prendre ?
    – Vous n’aurez rien, dit Tante Dora en garant une bouteille sur l’avant-dernier rayon.
    – Tu dis ? Tu refuses de nous servir ? – un S. S. se glissa sans bruit derrière le bar. – Obéis, punaise, ou gare à ta tête !
    Le feldwebel au permis de chasse se leva en titubant et s’approcha du bar.
    – Il y en a qui veulent se battre, fumiers de S. S. ?
    Le S. S. lui jeta un regard indifférent : – File, crapaud !
    Le feldwebel, de plus en plus titubant, colla son visage tout près de celui du S. S. : – Je vois que tu me cherches, fumier de S. S. !
    L’homme ne donna qu’un coup de crosse de son revolver et le feldwebel tomba comme une masse. Un filet de sang lui coulait du nez.
    – Ça suffit ! gronda Tante Dora en posant son cigare. Si vous ne disparaissez pas tous les cinq en vitesse, vous allez recevoir une tournée dont vous vous souviendrez. – Elle jeta la mitraillette loin du bar. – Cet endroit est un bar, pas un arsenal. – Elle se mit à astiquer fébrilement le comptoir en jetant des regards anxieux vers la porte.
    Le légionnaire ouvrit la bouche. – Boucle-la ! souffla Tante Dora, et occupe-toi de tes oignons.
    – Par Satan ! tonna le oberschar. Vieille putain, on va te faire ton affaire et ta trogne, tu vas voir ce qu’elle va devenir !
    Il donna un coup de pied au feldwebel inanimé, ce qui fit sauter son pansement. Une longue cicatrice toute fraîche apparut. Elle s’était ouverte en plusieurs endroits ; on voyait la chair rouge que traversait un drain. Une fille se pencha sur le blessé : – Hans ! Oh ! le pauvre Hans ! – Et elle tira avec peine dans une des petites niches.
    Les S. S. rirent et le chef haussa les épaules.
    – Emportez cet abruti en partant, on le passera à tabac. Et maintenant la bière, ou on va voir !
    A œ moment précis,. le Belge qui se tenait à la porte toussa discrètement. Tante Dora leva vivement la tête et sourit. Un petit homme noir venait d’entrer, avec tin cache-nez blanc autour du cou, des gants blancs et un imperméable gris. Ses yeux étaient bizarres, opalescents comme ceux des morts.
    Tante Dora alluma un nouveau cigare, claqua des doigts et dit :
    – Bonsoir, Paul.
    Le petit homme fit un signe de tête : – Heil Hitler !
    Ses souliers grinçaient. Sans se presser, il mit une cigarette dans un long fume-cigarette en argent à embouchure d’ivoire que les S. S. regardèrent hypnotisés, et il désigna du bout de la cigarette l’oberschar juché sur un tabouret.
    L’oberschar se troubla. Il ne savait pas exactement ce qu’il devait faire. Se lever et présenter un rapport, ou simplement crier : – Ta gueule ! ce qu’il aurait aimé faire. Mais la voix était trop familière, elle rappelait la caserne ou les sombres

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