Ce jour-là
cuit. Le doute s’insinuait. Je commençai à m’inventer des excuses à la noix, du style que j’étais mal préparé parce que j’avais été sur le terrain avec mon unité au lieu de m’entraîner.
« Trente secondes. »
Il me manquait encore dix mouvements pour atteindre le chiffre minimal. Un autre type, à côté de moi, l’avait déjà dépassé mais continuait à faire ses abdos à un rythme de forcené. J’en avais le tournis, je n’arrivais pas à croire que j’allais rater l’épreuve. C’est là que je me suis repris.
« Dix secondes. »
J’y étais presque. J’avais mal au ventre. Je haletais. La peur remplaçait la fatigue. J’étais en état de choc. Je ne pouvais pas échouer. Hors de question de retourner dans mon peloton sans avoir été au-delà des épreuves physiques.
« Cinq, quatre, trois…»
Les instructeurs dirent terminé au moment où je me redressais pour le dernier mouvement. J’avais dépassé le minimum de deux malheureux abdominaux. J’étais fourbu, mais restaient encore les rétablissements.
J’allai jusqu’à la barre et la peur d’avoir frôlé l’échec m’injecta une nouvelle dose d’adrénaline, si bien que je passai le test sans trop de difficultés.
L’épreuve de natation dans la baie de San Diego était la dernière. L’eau était calme. Nous avions des combinaisons de plongée pour nous protéger du froid. Je partis sur un rythme soutenu. L’un des candidats était nageur dans l’académie navale et il m’a vite dépassé, mais j’étais tout de même deuxième. Je donnais tout ce que je pouvais, mais j’avais l’impression d’avancer lentement.
Lorsque je franchis la ligne d’arrivée, on me dit que j’avais échoué. Tout le monde avait échoué, sauf le nageur de l’académie. Cela mit la puce à l’oreille des instructeurs, qui vérifièrent les horaires des marées. Nous avions nagé à contre-courant.
« On vous fait repasser l’épreuve demain », nous dirent-ils, à mon grand soulagement.
Une partie du défi tenait à nous fatiguer avant les exercices. On n’allait donc pas refaire que l’épreuve de natation. Je savais que j’allais devoir recommencer les abdominaux, je savais aussi, au fond de moi, qu’une nuit de sommeil n’effacerait pas les courbatures.
C’était une question de mental.
Le lendemain, j’étais remonté à bloc et, à force de volonté, j’ai franchi toutes les épreuves. Mes résultats n’avaient rien de fantastique, et je m’inquiétais des commentaires, le lendemain, à l’oral. J’avais à peine dépassé les minima. Le processus était conçu pour sélectionner les meilleurs des meilleurs, et je n’avais pas montré aux instructeurs que j’étais bien préparé.
J’arrivai tôt pour l’entretien, en grand uniforme bleu avec toutes mes décorations. Je m’étais fait couper les cheveux la veille et j’étais rasé de près. J’avais l’air de sortir tout droit du manuel du gradé. C’était l’une des rares occasions où une bonne coupe de cheveux, des souliers brillants et un uniforme bien repassé comptaient vraiment pour un SEAL. Et c’était ça de moins que les instructeurs auraient à me reprocher pendant l’oral.
Derrière une longue table au fond de la salle de conférence, se trouvaient une demi-douzaine de hauts gradés, le psychologue qui nous avait fait passer les tests le deuxième jour et un conseiller de carrière. Je m’avançai et m’assis sur l’unique chaise vide, face à eux.
Pendant trois quarts d’heure, ils m’ont assailli de questions. Je n’avais jamais subi un tel feu roulant. J’ignorais que le panel d’officiers avait déjà parlé à mon chef de peloton et à mon commandant à la SEAL Team Five. Ils avaient déjà une idée de qui j’étais, mais c’était la seule fois où ils allaient m’évaluer en face à face.
Je ne me souviens toujours pas de qui était assis en face de moi pendant cet oral. Pour moi, c’était des hauts gradés qui tenaient mon avenir entre les mains. À moi d’être convaincant.
Mes résultats médiocres dans les épreuves physiques ne plaidaient pas en ma faveur.
« Savez-vous ce qui vous attend ? Savez-vous dans quoi vous vous engagez ? Vous voulez jouer dans la cour des grands et c’est tout ce que vous avez à nous montrer ? »
Je n’ai pas hésité. J’avais compris qu’ils allaient insister sur mes faiblesses et je n’avais qu’une seule chance.
« J’en prends la
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