Ce jour-là
qu’ils se rendent compte de ce qui se passe », observa Charlie.
Le plan de la mission au point, nous avons commencé les répétitions.
L’hélicoptère, un Black Hawk, amorça sa descente au-dessus de la forêt de pins de Caroline du Nord et vint se placer en vol stationnaire. D’où j’étais assis, les jambes dans le vent à l’extérieur de la portière gauche de l’hélicoptère, je voyais une reproduction grandeur nature des quartiers de Ben Laden. Niché dans un secteur éloigné de la base, le périmètre d’exercice avait été construit en contreplaqué, grillages et conteneurs.
Je me laissai glisser par la corde jusque dans la cour et me dirigeai vers la double porte de C1. Tout autour de moi, mes coéquipiers fonçaient vers leurs objectifs. Le grondement des moteurs, au-dessus de nos têtes, rendait les échanges verbaux difficiles, mais, au bout de trois jours, nous n’avions plus besoin de parler. Toute la mission était mémorisée. En dehors de quelques contacts de contrôle, la radio restait silencieuse. Chacun savait ce qu’il avait à faire. Nous avions des années et des années d’expérience, si bien que tout se déroulait sans accroc. La cible ne posait pas plus de problème que des centaines d’autres auxquelles nous avions déjà donné l’assaut.
L’objectif de ces répétitions était moins de nous entraîner que de convaincre Washington que nous étions capables de réussir la mission.
Le niveau des détails, sur la copie grandeur nature, était impressionnant. Les équipes de construction de la base avaient planté des arbres, creusé un fossé autour du périmètre, et même amené de la terre pour simuler les champs de pommes de terre qui entouraient les lieux au Pakistan.
Au bout de quelques répétitions, nous leur avons demandé s’ils ne pouvaient pas ajouter le balcon du deuxième étage et déplacer certains portails pour être plus proches encore de l’original.
À la répétition suivante, les changements étaient effectués.
L’équipe de construction ne demanda jamais d’explications et ne nous répondit jamais non. Ils rappliquaient et procédaient aux changements demandés. Nous n’avions jamais été traités ainsi. Plus trace de bureaucratie. Nous avions besoin de quelque chose ? Nous l’avions. On ne nous posait pas de questions. Bien loin de la situation à laquelle nous avions dû faire face en Afghanistan.
Restait cependant une inconnue dans notre périmètre de simulation : les intérieurs. Nous ne savions pas du tout comment ils étaient agencés. Ce n’était pas un souci majeur. Nous avions des années d’expérience de ces situations. Nous n’avions aucun doute que nous pouvions venir à bout de ce problème ; tout ce qu’il nous fallait, c’était d’être débarqués sur place.
À la porte du conteneur qui simulait C1, je parcourais chaque fois l’intérieur des yeux avant d’entrer. J’ignorais si, pendant la mission, Ahmed al-Kuwaiti serait armé ou ceinturé d’explosifs. Nous partions du principe que tous les hommes – Ben Laden, Khalid et les deux frères Kuwaiti – vendraient chèrement leur peau.
Après avoir répété le scénario idéal, nous avons passé en revue toutes les variantes. Au lieu d’atterrir dans le périmètre, nous touchions terre à l’extérieur et donnions l’assaut de là. Ou alors nous traquions les hommes qui tenteraient de fuir avant l’assaut.
Chacune des possibilités était répétée jusqu’à l’écœurement. Jamais nous ne nous étions autant préparés pour un objectif, mais c’était important. La mission n’était pas compliquée, mais ce supplément de préparation donnait plus de cohésion au groupe formé d’hommes venus d’équipes différentes.
Après la dernière répétition, nous nous sommes retrouvés au centre des opérations. Jay était là, avec une mise à jour.
« Nous retournons chez nous et lundi prochain nous repartons à l’ouest pour une autre semaine d’entraînement et une analyse complète de la mission », dit Jay.
Je levai la main.
« La mission a été approuvée officiellement ?
— Non. Nous attendons encore la réponse de Washington. »
Je me tournai vers Walt. Il roula des yeux. Le même genre de douche écossaise que nous avions subie lors de l’opération Capitaine Phillips , une succession d’accélérations et de temps morts.
« Je suis prêt à parier qu’on ne va pas y aller », dit Walt quand nous avons
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