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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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remet purement et simplement aux mains des Américains la défense de l'Europe, nucléaire ou conventionnelle. Ça ne sert à rien de faire l'Europe, si elle ne doit pas disposer de sa défense et par conséquent de sa politique. »
    Dès ce moment, il est clair qu'il mêle inextricablement, dans son attitude à l'égard de la Grande-Bretagne, la question économique, la question politique et la question nucléaire.

    « Nous ne pouvons pas céder »
    Au Conseil des ministres du 8 août 1962, on reparle de la Grande-Bretagne et de son entrée dans le Marché commun.
    Couve a une vertu étonnante : c'est un brise-lames. Il est superbe de froideur autour d'un tapis vert. Il n'a pas son pareil pour arrêter les élans de ses interlocuteurs. « J'ai déjà dit... Il est inutile de répéter... »
    « Parmi les Six, résume Couve, comme toujours, nous sommes les seuls à avoir une ligne déterminée. Le problème est de faire entrer la Grande-Bretagne dans le Marché commun aux conditions du Marché commun, et non d'adapter le Marché commun aux conditions du Commonwealth. Nous sommes soutenus sans aucune défaillance par la Commission, gardienne du traité de Rome.
    « Les Allemands et les Hollandais sont partisans de l'entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun, même si ça doit changer le traité de Rome. Ils nous sont sournoisement hostiles. Les Italiens sont partisans de l'entrée de l'Angleterre, en essayant de ne pas changer le traité. Les Belges n'ont pas de position du tout. Ce sont des gens insupportables.
    GdG. — Cette négociation est très complexe. Le ministre des Affaires étrangères l'a très bien conduite. Nous restons le principal intéressé pour l'agriculture, qu'il nous faut moderniser en lui assurantdes débouchés. C'est un problème national de premier plan. Il nous faut faire démarrer notre agriculture comme notre industrie a déjà démarré. Le Marché commun doit nous y aider.
    « Si l'Angleterre ne se prête pas à cette nécessité pour notre agriculture, le Marché commun a beaucoup moins d'intérêt pour nous. Nous ne pouvons pas céder. Que, jusqu'en 1970, nous acceptions une transition, ça se conçoit ; mais à condition d'aboutir à ce que le Marché commun soit un tout, avec l'agriculture notamment ; qu'il n'y ait pas de brèche. La politique des Anglais, c'est qu'il y ait une brèche par laquelle beaucoup de choses pourront passer.
    « Que se produira-t-il ? Les conservateurs veulent être ceux qui auront fait entrer le Marché commun dans le Commonwealth. Macmillan, lui, serait prêt à faire entrer l'Angleterre dans le Marché commun sans conditions. Mais il doit faire face à une situation très complexe, qui est difficile à maîtriser.
    « Un traité de commerce entre la Grande-Bretagne et le Marché commun n'est pas inconcevable ; il peut être avantageux pour les deux parties. Faire entrer la Grande-Bretagne dans le Marché commun, c'est autre chose. C'est à elle de se décider, autrement dit d'accepter les sacrifices que cela comporte. Dans les conditions politiques où elle se trouve, ça lui sera difficile, si même ça lui est possible.
    « Il y a tout le poids du Commonwealth, de la tradition, et des courants qui jouent dans la conjoncture pour renverser un gouvernement conservateur.
    « Ne souhaitons pas de mal à Macmillan, qui est un allié sincère de la France. Mais nous ne pouvons pas sacrifier à cette sympathie un intérêt français fondamental.
    « Nous ne changerons pas notre position. »
    1 À Paris, les 29 et 30 juin 1958.
    2 Après le rejet par les Six, à l'instigation de la France, de la « grande zone de libre-échange » qui devait absorber le Marché commun, les Britanniques avaient constitué une « petite zone de libre-échange » avec la Suisse, la Suède, l'Autriche, le Danemark, la Norvège et le Portugal. Le Royaume-Uni et le Danemark s'en détachèrent en 1972 et le Portugal en 1985, pour rallier la CEE.

Chapitre 5
    « IL NE FAUT JAMAIS SE PROSTERNER»
    Élysée, 8 août 1962
    Au milieu de tant de soucis, de déceptions et d'espoirs, de Gaulle s'est accordé une récréation en offrant un déjeuner intime à Eisenhower, de passage à Paris. Présents, autour du général et de Mme de Gaulle : l'ambassadeur des États-Unis, le général Gavin, et sa femme ; Étienne Burin des Roziers ; l'aide de camp; Monique et moi. Dans la cour d'honneur, la musique de la garde républicaine a laissé passer chacun de nous sans broncher. Nous

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