C'était De Gaulle - Tome I
Il faudrait organiser des débats contradictoires, comme c'est déjà le cas dans les radios périphériques.
GdG. — Écoutez, nous n'avons pas besoin d'être tous les jours en campagne électorale ! Que les Français ne se laissent pas aller à leur manie du dénigrement ! Quand on se gratte, on finit toujours par s'irriter. Le jour où nous aborderons l'élection qui compte plus que toutes les autres, l'élection présidentielle, alors nous donnerons autant de temps au débat que dans les autres pays démocratiques. Mais, d'ici là, ne nous mettons pas dans une guérilla permanente ! Personne ne peut nous y obliger !
« L'autre jour, un de vos journalistes de télévision 3 a posé le principe selon lequel l'ensemble des journalistes de la RTF doivent représenter les diverses tendances de l'opinion. Le critère de l'opinion le moins contestable, ce sont les dernières élections législatives. À ce compte, l'aréopage des journalistes RTF devrait être un reflet de l'Assemblée nationale (à nombre égal, sur 480 journalistes, il faudrait 260 gaullistes, etc.) Seulement, les journalistes de la RTF représentent l'opinion telle qu'elle s'est exprimée aux élections de 46, de 51 et de 56 ; c'est-à-dire que la gauche exerce toujours sa domination. Nous sommes encore loin du compte, pour qu'ils représentent l'opinion de l'actuelle législature ! »
« Et pourquoi pas la publicité ? »
Après un silence, il m'interroge sur le financement de la télévision.
GdG : « Pourquoi ne peut-elle pas lancer un emprunt ?
AP. — Les Finances s'y opposent absolument, je n'ai jamais pu passer outre ; même le Premier ministre a dû s'incliner.
GdG. — Et pourquoi pas la publicité ?
AP. — C'est un casus belli avec la presse écrite. Déjà, la presse régionale fera tout son possible pour nous faire renoncer à créer les stations régionales.
GdG. — Ne renoncez surtout pas !
AP. — Nous n'avons aucune ressource autre que la redevance, c'est-à-dire une taxe parafiscale, et il n'est pas question de l'augmenter dans le climat actuel de lutte contre l'inflation.»
Le Général garde le silence. Son optimisme naturel s'est heurté une fois de plus aux dures réalités. Tout n'est pas possible tout de suite.
« Pourquoi le générique représente-t-il des rotatives ? »
Salon doré, 30 avril 1963.
Le Général : « Pour votre réforme du Journal télévisé 4 , vous avez bien fait. Il y a davantage d'images, moins de bavardages, moins de persiflage. Mais méfiez-vous. Les mauvaises habitudes, comme les mauvaises herbes, cherchent toujours à reprendre le dessus.
« Pourquoi le générique qui présente le Journal télévisé représente-t-il des rotatives en train d'imprimer un journal ? La télévision n'est pas à la remorque de la presse écrite ! Elle devrait même lui donner le ton. Qu'on montre des caméras si vous voulez, mais pas des rotatives ! C'est absurde ! (Rire.)
(Comme il a raison ! Il ne partage pas le complexe d'infériorité des gens de télévision à l'égard de la presse écrite. Il sent que la télévision se suffit à elle-même et dominera de plus en plus.)
« Je regarde régulièrement, poursuit-il, en veine de confidences, les trois journaux quotidiens. Le meilleur de beaucoup, c'est celui de 23 heures, parce qu'il n'y a pas de présentateur, il n'y a que des images. Le pire est celui de 13 heures, parce qu'on ne voit que le présentateur. La télévision n'est pas la radio, c'est le cinéma à domicile. Le présentateur, à supposer qu'il soit indispensable, ne devrait pas faire plus que des transitions de quelques secondes.
« Pourquoi toujours montrer ce milieu frelaté ? »
« Pourquoi n'y aurait-il pas de reportages sur nos grandes Écoles : Normale, Polytechnique, Agro, Navale, Saint-Cyr, Centrale, etc., et aussi les écoles commerciales et techniques ? Ce serait une bonne façon de montrer la jeunesse qui cherche à se dépasser, le pays qui monte. C'est tellement plus vrai et plus important que vos histoires de blousons noirs ! Et puis, les grandes émissions dans le genre "Cinq colonnes à la une" devraient être davantage consacrées à la France en marche. Elles font à peu près exclusivement appel au catastrophique et à l'extravagant. On laisse de côté les réalités françaises qui marqueront le plus ce temps aux yeux des historiens du siècle prochain :les progrès scientifiques et techniques, l'expansion économique, l'aménagement du territoire, les
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