C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
problème sérieux se pose : celui des voitures. Depuis le début de l’opération, dans différents garages spécialisés, on en a loué beaucoup. Hélas, presque toutes étaient proches de l’agonie : carrosserie semée de trous et bosses, pneus lisses, batteries hors d’usage. On finit par dénicher les deux voitures indispensables à l’opération. Événement exceptionnel, elles sont en parfait état de marche.
Le 7 mai, l’équipe se retrouve autour de Harel. Il confirme que l’enlèvement aura lieu le 10. Commence alors, dans un climat de tension compréhensible, la veillée d’armes. L’équipe se rencontre dans différents cafés. Non loin de Tira , on loue une quatrième maison. Son nom de code : Elazar . Mais alors même que l’heure H approche, l’équipe constate que certains éléments du matériel dont on a préalablement dressé la liste font défaut. Harel décide aussitôt de remettre l’enlèvement du 10 au 11 mai. Entre les différentes « planques » dont on dispose, il faut maintenant faire un choix définitif : c’est à Tira que l’on conduira Eichmann.
Le 11 au matin, il pleut. Depuis deux jours il fait froid, un peu le temps de novembre en Europe. Isser Harel convoque dans un restaurant Gabi, Ehud, Kenet et Mensahe qui vont former le commando opérationnel. À 14 heures, le déjeuner s’achève. Poignées de main plus insistantes que d’habitude. On se souhaite mutuellement bon courage. Le moral est à son zénith.
16 h 30. On se retrouve à Tira . Les hommes changent de vêtements, se munissent de faux papiers – spécialement fabriqués pour eux – et du matériel nécessaire.
18 h 30. Les deux voitures « en état de marche » partent de Tira . Kenet est au volant de la première. Dans la seconde que conduit Ehad, le médecin a pris place. Dans la sacoche accrochée à son bras se trouvent le matériel et les ingrédients nécessaires à « l’opération ». Les voitures roulent de conserve vers la rue Garibaldi. L’opération est prévue pour 19 h 40.
19 h 35. Les voitures arrivent sur place. La première s’arrête, l’avant tourné vers la maison de Klement, dans la rue Garibaldi elle-même, à une dizaine de mètres de la route 202. L’un des agents saute à terre, vient relever le capot et, comme s’il s’essayait à déceler une panne, se penche vers le moteur. Un autre agent le rejoint et, semblant aider le premier, se penche à côté de lui vers le capot ouvert. Deux autres agents – dont Kenet – sont restés à l’intérieur de la voiture.
La seconde voiture attend sur la route 202, entre le pont et le coin de la rue Garibaldi, à une trentaine de mètres de la première. Là aussi, deux agents sont penchés vers le moteur. Le lecteur dira que cela fait beaucoup de voitures en panne près de chez Eichmann. Aucune importance puisque toutes les voitures tombent en panne à Buenos Aires !
Voici le bus de 19 h 15. Celui que Klement emprunte chaque jour. Il n’en descend pas . Probablement a-t-il manqué son bus habituel. Il suffit d’attendre le suivant. Le voilà. Klement ne s’y trouve pas . Et pas davantage dans le troisième ni dans le quatrième !
Le plan prévoit que, si Klement n’arrive pas à l’heure accoutumée, on attendra jusqu’à 20 heures. Or il est 20 heures. La nuit est tombée. Un vent froid souffle. Kenet sort de la voiture, interroge Gabi :
— Il faut encore attendre, répond celui-ci.
Il dira plus tard qu’il était décidé à attendre jusqu’à 20 h 30. À ce moment précis, un nouvel autobus s’arrête près du kiosque. Et, cette fois, un homme en descend ! Ehud, placé non loin de là, scrute la silhouette qui s’avance. À n’en pas douter, c’est Klement. Enfin ! Il est 20 h 05. Ehud se met à courir. Ezra le voit, rabat le capot. Ehud saute dans la voiture, allume les phares. Marchant de son pas posé, Klement tourne le coin de la rue Garibaldi.
De la première voiture, Kenet voit quelqu’un marcher sur le bord de la route. La nuit empêche de le reconnaître. Quelques secondes plus tard, l’homme s’est approché suffisamment pour que Kenet puisse chuchoter triomphalement :
— C’est lui !
Il se penche vers l’oreille de Gabi :
— Il a une main dans la poche. C’est peut-être un revolver.
Klement arrive à la hauteur de la voiture. Eli lui barre le chemin :
— Momentito !
Klement s’arrête, recule d’un pas.
Eli saute sur lui. Les deux
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