Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
Vom Netzwerk:
le pouvoir. Pourrons-nous empêcher quelque autre général à la tête de quatre régiments réguliers, alors que Scribonianus n’en dispose que de deux, de se faire nommer concurremment empereur et de marcher sur Rome   ? Et même si Scribonianus parvenait à ses fins, ce que je tiens pour hautement improbable, qu’adviendrait-il de Vinicianus   ? Se contenterait-il de plier le genou devant le hautain Scribonianus   ? Ne lui a-t-il pas promis son soutien à la condition expresse que l’Empire serait partagé entre eux   ? Et dans ce cas, ne devons-nous pas nous attendre à un nouveau duel à mort, comme jadis celui qui opposa Pompée au Dieu Jules César, ou encore entre Marc-Antoine au Dieu Auguste   ? Non, seigneurs. Dans cette affaire, notre loyauté, notre gratitude et notre intérêt vont de pair. Nous devons loyalement soutenir Tibère Claude César, si nous voulons mériter les remerciements de notre pays, l’approbation des Dieux et nous féliciter, plus tard, de voir Vinicianus et Scribonianus voués au châtiment suprême que méritent les traîtres.   »
    Rufrius prit alors la parole   : «   Je trouve regrettable que l’éventualité d’une trahison de la part des soldats de la Garde ait pu être évoquée dans cette enceinte. Je suis leur commandant et repousse l’idée qu’un seul de mes hommes puisse faillir à son devoir envers l’empereur. Rappelez-vous, seigneurs, que ce sont les gardes qui, les premiers, appelèrent Tibère Claude César, maintenant Père de la Patrie, à prendre le commandement en chef de l’Armée, alors que notre assemblée hésita quelque temps à ratifier leur choix. Il ne convient donc guère à un sénateur de mettre en doute la loyauté des gardes. Non, de même qu’ils furent les premiers à saluer empereur Tibère Claude César, de même ils seront les derniers à déserter sa cause. Et s’il nous arrivait au camp la nouvelle que le Sénat aurait décidé d’offrir le commandement suprême à toute autre personne… dans ce cas, seigneurs, je vous en préviens   : ou bien vous décidez de fortifier cet édifice du mieux que vous pouvez, en accumulant barricades de bancs et amas de pavés, ou bien vous suspendez les séances sine die et vous vous dispersez dans toutes les directions.   »
    Ainsi, me fut unanimement votée la confiance et le Sénat m’autorisa à écrire à Scribonianus pour l’informer qu’il était suspendu de son commandement et sommé de rentrer sans délai à Rome pour y expliquer sa conduite. Mais Scribonianus ne reçut jamais ma lettre. Il était déjà mort.
    Je vais vous conter ici ce qui s’était passé. Ayant réussi, du moins le pensait-il, à se rendre populaire auprès de ses troupes grâce au relâchement de la discipline, à l’institution de divers loisirs et distractions et à l’augmentation, à ses frais, de la ration de vin, Scribonianus avait rassemblé les 7e et 11e régiments dans l’amphithéâtre de l’endroit, et leur avait annoncé que sa vie était en danger. Leur ayant lu la lettre de Vinicianus, ou du moins de nombreux passages, il leur demanda s’ils se rangeraient à ses côtés dans la tentative qu’il allait faire pour délivrer Rome d’une tyrannie qui menaçait d’égaler en arbitraire et en cruauté celle de Caligula. «   Il faut rétablir la République, cria-t-il. Seule la République offre la véritable liberté.   » Il avait secoué, selon le dicton, tout le sac de semences et quelques graines parurent aussitôt germer. Dans ses intonations le commun des soldats perçut le tintement de l’argent. Or ils aiment l’argent et il leur parut particulièrement injuste qu’un chef aussi généreux pût être sacrifié à ma colère ou à ma jalousie. Ils l’acclamèrent à grand bruit, de même que Vinicianus, qui avait jadis commandé le 11e régiment. Ils jurèrent de les suivre tous les deux jusqu’au bout de la terre, si besoin était. Scribonianus leur promit à chacun dix pièces d’or sur-le - champ, plus quarante autres à leur arrivée en Italie, et cent autres encore le jour où ils entreraient victorieusement dans Rome. Leur ayant donc remis leurs dix premières pièces, il leur ordonna de regagner le camp et de se tenir prêts à l’embarquement. Le signal du départ serait donné dès que les navires arriveraient d’Italie et que les troupes levées dans le pays seraient rassemblées. Mais Scribonianus avait commis une grave erreur en sous-estimant

Weitere Kostenlose Bücher