Comment vivaient nos ancêtres
les pays nordiques, il est donc associé aux fêtes antiques de la lumière, souvent orné de rubans colorés, voire agrémenté de torches largement symboliques. Sa tradition s’est maintenue dans les pays germaniques au point que leurs princes et princesses, lorsqu’ils partaient se marier en Europe de l’Ouest, l’emportaient souvent avec eux. Ce fut ainsi qu’Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, mari de la reine Victoria, l’introduisit en Angleterre au XIX e siècle. Il aurait pu pénétrer aussi en France, mais la tentative de la duchesse de Mecklembourg, belle-fille du roi Louis-Philippe, qui le présenta aux Tuileries en 1840, se solda par un échec. Les Parisiens, soupçonnant quelque habitude protestante, se refusèrent à l’adopter.
Tout va basculer, en 1870, lorsque les Alsaciens, réfugiés en France après la défaite de Napoléon III, veulent reprendre de vieilles coutumes locales : à Sélestat, depuis 1521, des arbres sont chargés d’hosties et de pommes que les enfants se disputent en les secouant. Dès lors les nombreuses fêtes de charité ou de solidarité pour les réfugiés d’Alsace-Lorraine ont toutes leur sapin qui est rapidement adopté par l’ensemble de la France, cocardière et revancharde. Dès la fin du siècle, des dizaines de milliers se vendent ainsi chaque année.
Autre tradition indissociable de Noël, la crèche. Elle fait son apparition dans le sud de la France et de l’Italie. Les santons sont d’abord fabriqués en bois par des artisans de la Forêt-Noire. Vendus à la foire de Toulon, ils deviennent à la Restauration des petits sujets en cire que les marchands italiens vendent aux cris de « Santi Belli ». Leur vogue est à son apogée sous le Second Empire, au moment de la grande amitié franco-italienne qui défend la cause de l’unification de la péninsule.
L’origine de la bûche de Noël est plus ancienne et de tradition beaucoup plus générale. Appelée « tronc », « cosse », « tison », « souche », « tréfoir » selon les régions, elle est installée dans la grande cheminée la veille de Noël, avant la messe de minuit. Elle doit être de dimensions importantes et de bois dur, afin de brûler un temps variant de la durée de la messe à trois ou huit jours, voire jusqu’à la fête des Rois. Traditionnellement, on choisit du bois d’arbres dont les fruits sont consommés et prisés : pommier, prunier, olivier, chêne ou hêtre. Sans doute ce choix a-t-il pour but d’assurer une abondante récolte pour l’année à venir. Parfois, on procède à des libations en versant sur l’écorce du vin ou de l’huile, quand ce n’est pas du sel pour se garantir des esprits et des sorciers, ou même de l’eau bénite. D’autres fois encore, on a soin d’y faire couler quelques gouttes du précieux cierge de la Chandeleur. Charbons et cendres sont dotés, comme ceux de la Saint-Jean, de pouvoirs en tout genre. Précieusement conservés, ils seront volontiers utilisés pour rallumer la bûche de l’année suivante. De nos jours, cette bûche ne subsiste plus guère que glacée ou chocolatée.
Une fois sa bûche allumée, chaque famille se rend à la messe de minuit, à pied ou en char à bœufs, à travers les chemins. Chacun porte à la main une torche, remplacée ensuite par des lanternes. L’église est illuminée. Dans beaucoup de régions, les bergers viennent offrir un agneau à la crèche. Enfin arrive « l’Heure solennelle », chantée à la fin du siècle dernier par le célèbre « Minuit, Chrétiens ! » dont les paroles sont curieusement dues à l’imagination d’un radical, Placide Cappeau. Ce négociant en vins n’était pas encore engagé politiquement lorsqu’il répondit, en qualité de poète, à la commande du curé de Roquemaure, près d’Uzès. Le 24 décembre 1847 fut donc chanté pour la première fois à minuit le célèbre cantique.
De retour de la messe de minuit, nos ancêtres vont à l’étable donner aux animaux la « gerbe de Noël », un foin meilleur qu’à l’ordinaire, afin de remercier les bœufs et les ânes d’avoir réchauffé l’enfant Jésus. S’ensuit le réveillon, souvent assorti d’une oie ou du porc que l’on vient de sortir du saloir. On chante des cantiques de Noël, dont l’énumération exigerait des livres entiers tant ils sont nombreux. On s’amuse et le lendemain, lorsque la météorologie le permet, on joue souvent à la soule sur la place du
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