Contes populaires de toutes les Bretagne
(II, p. 176-194) sous le
titre de la Princesse Marcassa . Le thème de ce récit se
retrouve dans la tradition slave. Dans le domaine celtique, il offre des
ressemblances avec certains textes anciens. L’eau qui guérit est comparable à
l’eau de la Fontaine de Barenton, dédiée primitivement au dieu solaire Bélénos.
Le Merle au Bec d’Or fait penser aux Oiseaux de Rhiannon de la tradition galloise,
dont « le chant réveille les morts et endort les vivants ». Mais
comme dans tous les contes qui se réfèrent à une lointaine mythologie celtique,
le héros ne peut réussir sa mission sans le concours – et l’amour – d’une
femme. Il faut noter aussi le thème de l’auberge : il rappelle étrangement
l’Île des Rieurs, épisode du récit irlandais la Navigation de
Brân (J. Markale, l’Épopée celtique d’Irlande , p. 33) et plusieurs
épisodes des Romans de la Table Ronde, notamment celui du Val sans Retour, où l’on
voit des chevaliers oublier leur mission et vivre dans les plaisirs d’un lieu
enchanté.
LE FILLEUL DU ROI
Il était une fois un roi de Bretagne qui voyageait beaucoup
sur les chemins de son royaume. Un jour qu’il était fatigué, il s’arrêta, pour
se reposer, dans la maison d’un pauvre bûcheron. Or la femme du bûcheron venait
de donner naissance à un fils. Le roi de Bretagne voulut être le parrain de
l’enfant et lui donna le nom d’Efflam.
Quand le baptême fut fait, et que le roi se fut reposé, il repartit.
Mais avant de quitter la maison, il dit au bûcheron :
— Voici un anneau d’or pour mon filleul. Lorsqu’il sera
assez grand, tu pourras me l’envoyer. Je le reconnaîtrai à cet anneau et je
m’occuperai de lui.
Et le roi reprit son voyage à travers les chemins, qui, à
cette époque, étaient si étroits et si délabrés qu’il fallait mettre des jours
et des jours pour voyager.
Quand le garçon fut assez grand pour voyager seul, le
bûcheron lui dit :
— Voici venu le temps pour toi d’aller trouver le roi
de Bretagne. C’est ton parrain, et il m’a promis qu’il s’occuperait de toi.
Prends donc cet anneau et va te présenter au palais.
Efflam partit sur le chemin. Mais comme il n’aimait pas
voyager sans compagnie, il demanda à l’un de ses camarades, nommé Tual, de venir
avec lui jusqu’à la ville.
Or, Tual était jaloux d’Efflam. Il se disait qu’Efflam avait
bien de la chance, et que lui-même aurait bien voulu être le filleul du roi.
Une nuit, il ne put y tenir : pendant qu’Efflam dormait, il lui déroba son
anneau, jeta Efflam dans un puits et se dirigea tout seul vers la ville. Là, il
demanda à être reçu par le roi.
Le roi reconnut l’anneau et fit bon accueil à celui qu’il
croyait son filleul. Il lui fit donner de beaux vêtements et le confia aux
meilleurs précepteurs qu’il put trouver.
Cependant Efflam n’était pas mort. Il avait pu se tirer du
puits où Tual l’avait jeté. Il s’en était allé sur le chemin en direction de la
ville. Là, il avait appris que le roi avait auprès de lui son filleul, et il
comprit que son compagnon avait profité de la situation. Il se garda bien
d’aller trouver le roi : comment aurait-il pu prouver que c’était lui le
vrai filleul ? il n’avait plus l’anneau. Alors, il demanda s’il y avait du
travail au palais du roi et on lui répondit que le jardinier avait besoin d’un
aide. Il alla donc trouver le jardinier et celui-ci l’engagea immédiatement.
Un jour, le roi se promenait dans le jardin en compagnie de
celui qu’il croyait son filleul. Ils passèrent devant un puits. Le roi
dit :
— Voici un puits qui est si profond que personne n’en a
jamais atteint le fond. Je voudrais quand même savoir ce qu’il y a dedans.
Le faux filleul venait juste de reconnaître Efflam qui
travaillait non loin de là. Il dit au roi :
— Pourquoi ne demanderiez-vous pas à cet aide-jardinier
d’aller au fond du puits pour voir ce qu’il y a dedans ?
Le roi suivit le conseil. Il alla trouver Efflam et lui
ordonna de descendre dans le puits afin de venir lui raconter ce qu’il aurait
vu dedans.
Efflam avait bien compris que Tual était à l’origine de
cette demande. Mais il ne dit rien et descendit dans le puits. Ce ne fut pas
facile : il devait s’accrocher aux pierres et faire bien attention de ne
pas glisser. Il atteignit cependant le fond et fut tout surpris de voir qu’il
n’y avait pas d’eau. Au contraire, il y avait un jardin
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