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Dans l'intimité des reines et des favorites

Dans l'intimité des reines et des favorites

Titel: Dans l'intimité des reines et des favorites Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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auprès de sa maîtresse jusqu’à la fin de l’année, occupé aux seuls jeux de l’amour…

9
    Henri de Navarre renonce à faire assassiner sa femme
    Il est tout de même agréable d’être deux.
     
    Paul Adam
     
    M me  de Gramont avait alors trente-six ans. Plantureuse, sensuelle, le tétin avantageux, l’œil vif et la fesse bien dessinée, elle possédait tout ce qui pouvait plaire au Béarnais. Intelligente, elle savait partager ses joies et ses colères ; maternelle, elle le soignait et l’appelait « petiot » ; généreuse, elle lui donnait l’argent de ses coupes de bois pour financer l’armée protestante.
    Lui l’aimait, la tenait au courant de ses projets, lui disait ses espérances, et leur vie, depuis sept ans, était en tout point celle d’un couple régulier. Mais en décembre 1588, lorsque la mort du duc de Guise le rapprocha du trône [77] , Navarre vit une lueur d’amertume dans les yeux de sa maîtresse et comprit ce qui attristait la belle Corisande.
    — Vous m’avez aidé dans tous mes combats, il est juste, mon âme, que vous soyez reine lorsque je serai roi !
    Encore fallait-il rendre possible ce mariage promis sous l’empire de la passion ; car, si M me  de Gramont était veuve, Henri était marié.
    Le divorce ? Il n’y songeait pas, la procédure étant trop longue et trop compliquée. Mais il envisageait, avec un cynisme aimable et sain, de se rendre veuf.
    Pourtant, avant d’entreprendre quoi que ce fût, il voulut demander l’avis de quelques amis. S’adressant à d’Aubigné et au vicomte de Turenne, il leur confia son dessein d’épouser M me  de Gramont et leur fit part de la promesse qu’il lui avait faite.
    — Croyez-vous que j’aie raison de vouloir ce mariage ? leur demanda-t-il.
    « Il s’agissait, nous dit Dreux du Radier, de la démarche la plus considérable de sa vie. Turenne, qui connaissait la vivacité des sentiments de Henri, n’osa les choquer. Il prétexta la nécessité d’un voyage à Marans et partit le lendemain. Assez honnête homme pour ne pas donner un mauvais conseil à son maître, il n’eut pas la force de lui en donner un bon. D’Aubigné, resté seul chargé de l’emploi dangereux d’être sincère, s’en acquitta sans détour [78] . »
    En effet, l’aide de camp du roi de Navarre rapporte, dans son Histoire , les propos qu’il tint au Béarnais. Les voici : « Je ne prétends point que vous renonciez à votre passion. J’ai été amoureux : je sais ce que vous souffririez ; mais servez-vous-en, sire, comme d’un motif qui vous excite à vous rendre digne de votre maîtresse, qui vous mépriserait si vous vous abaissiez jusqu’à l’épouser. Il faut que vous soyez aut Coesear, aut nihil  ; que vous vous rendiez dans votre conseil que vous abhorrez ; que vous donniez plus de temps que vous ne faites aux affaires nécessaires ; que celles qui sont essentielles aient la préférence sur les autres, surtout sur le plaisir. Le duc d’Anjou est mort, vous n’avez plus qu’un pas à faire pour monter sur le trône. Si vous devenez l’époux de votre maîtresse, le mépris que vous ferez rejaillir sur votre personne vous en fermera le chemin sans ressource [79] . »
    Navarre avait l’esprit trop juste pour ne pas reconnaître la sagesse de ces propos. Il remercia d’Aubigné et lui donna sa parole qu’il n’épouserait pas, en tout cas, la comtesse avant deux ans.
    L’aide de camp connaissait suffisamment son maître pour savoir qu’avant ce terme une nouvelle favorite aurait remplacé la belle Corisande.
    — Voilà une sage résolution, dit-il en s’efforçant de ne pas sourire.
    Après cette conversation, le Béarnais devint extrêmement prudent avec M me  de Gramont. S’il la culbutait toujours avec cette saine ardeur qui faisait l’admiration des dames, du moins ne lui parlait-il plus de mariage. La belle avait ses espions. Elle sut vite d’où venait ce changement d’attitude et devint l’ennemie mortelle de d’Aubigné. Mais celui-ci pouvait être satisfait : il avait évité bien des ennuis au royaume.
    En effet, on se demande ce qui se serait passé l’année suivante si Henri de Navarre, déjà mal vu à cause de sa religion, avait dû, en outre, imposer son ancienne concubine comme reine de France.
     
    En empêchant ce mariage, d’Aubigné ne rendait pas seulement un grand service au pays, il sauvait aussi la reine Margot, plus ou moins promise à

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