Dissolution
de
quoi il s’agit ?
— Rien qu’une soutane qui ne semble pas fournir l’indice
que j’espérais, ainsi qu’une épée. Je fais vider l’étang pour voir ce qu’il
peut contenir d’autre.
— Une épée ?
— Oui. Je crois que c’est celle qui a tué le commissaire
Singleton. Il y a la marque du fabricant qui devrait permettre d’en connaître l’origine,
mais il me faudrait retourner à Londres pour suivre cette piste.
— N’y allez pas, monsieur, s’il vous plaît ! s’écria-t-elle
d’un ton soudain suppliant. Je vous prie de me pardonner si j’ai été insolente,
mais ne partez pas ! Seule votre présence ici me protège.
— Je crains que vous n’exagériez mon pouvoir, dis-je
avec tristesse. Je n’ai pas réussi à sauver Simon Whelplay. Or à cause de cette
neige il me faudrait au moins une semaine de voyage pour gagner Londres, et je
ne dispose pas de tout ce temps. »
Son visage rayonna de soulagement. J’osai me pencher pour lui
tapoter le bras.
« Votre foi en moi me touche. »
Elle retira son bras mais sourit.
« Peut-être avez-vous trop peu confiance en vous, monsieur.
Peut-être que dans d’autres circonstances… S’il n’y avait pas Mark… » Elle
ne termina pas sa phrase, baissant la tête d’un air pudique. J’avoue que mon
cœur battait très fort. Nous restâmes silencieux sur la butte quelques instants.
« Je pense que nous devrions rentrer, fis-je, sans
essayer d’atteindre la rivière. J’attends un message du juge. Et, Alice, je
vais faire quelque chose pour vous, je vous le promets. Et… merci pour ce que
vous m’avez dit.
— Et vous pour votre aide. » Elle fit un bref
sourire puis reprit le chemin des marais. Le retour fut plus aisé. Nous n’avions
qu’à mettre nos pieds dans nos propres empreintes. Marchant derrière elle, je
contemplais sa nuque et faillis une fois tendre la main pour la toucher. Je me
dis que les moines n’étaient pas les seuls à se ridiculiser et à devenir aisément
hypocrites.
Une gêne s’était emparée de moi et nous n’échangeâmes que de
rares paroles. Mais le silence était en tout cas plus chaleureux qu’à l’aller. Elle
me quitta dans la salle de l’infirmerie, me disant qu’elle avait des tâches à
accomplir. Le frère Guy était en train de panser la jambe du gros moine. Il
leva les yeux.
« Déjà de retour ? Vous avez l’air gelé.
— En effet. Alice m’a beaucoup aidé. Je lui en suis très
reconnaissant.
— Vous dormez mieux ?
— Beaucoup mieux, grâce à votre efficace potion. Avez-vous
vu Mark ?
— Je l’ai croisé il y a quelques instants. Il a regagné
votre chambre. Prenez la potion encore quelques jours », me lança-t-il
comme je quittais la salle. Je me demandais si je devais parler à Mark de ma conversation
avec Alice. Je suivis le couloir et ouvris la porte de notre chambre.
« Mark, je suis allé… » Je m’arrêtai net, regardant
à l’entour. La pièce était vide. Puis me parvint une voix, venant de nulle part,
semblait-il.
« Monsieur ! À l’aide ! »
24
« A u
secours ! »
Il y avait une note de panique dans le cri étouffé de Mark
dont la voix, à ma grande perplexité, paraissait désincarnée. Puis je vis que
le placard avait été un peu déplacé. Regardant derrière, j’aperçus une porte
dans le mur lambrissé. Je parvins à grand-peine à tirer le placard.
« Tu es là, Mark ?
— Je suis coincé ! Ouvrez la porte, monsieur !
Dépêchez-vous ! Il risque de revenir ! »
Je tournai avec difficulté la poignée qui était vieille et
rouillée. Puis il y eut un déclic et la porte s’ouvrit, laissant passer un
courant d’air froid et humide. Mark surgit de l’obscurité, débraillé et couvert
de poussière. Je scrutai les ténèbres quelques instants avant de le regarder à
nouveau.
« Sangdieu ! que s’est-il passé ? Qui risque
de revenir ? »
Il prit bruyamment plusieurs inspirations.
« Quand je suis passé de l’autre côté, j’ai refermé la
porte derrière moi avant de me rendre compte qu’on ne pouvait pas l’ouvrir de l’extérieur.
J’étais pris au piège. Il y a un petit trou dans la cloison. Quelqu’un nous
avait bien déjà espionnés… C’est par là que je vous ai vu entrer dans la
chambre, alors j’ai crié.
— Raconte-moi ce qui s’est passé depuis le début. »
Au moins, pensai-je, la frayeur l’a guéri de son humeur boudeuse. Il s’assit
sur le
Weitere Kostenlose Bücher