Dissolution
avantages,
monsieur.
— Les papistes aimeraient que personne ne la lise. Mais
pour revenir à la question du monastère, j’ai lu qu’un grand nombre de méfaits
y ont été commis par le passé. Des abominations entre moines. »
Copynger renâcla de dégoût.
« Et je suis persuadé que ça continue ! Le
sacristain, le frère Gabriel, c’était l’un des coupables, et il est toujours là.
— Quelqu’un de la ville était-il impliqué ?
— Non. Mais il y a chez eux non seulement des sodomites
mais aussi des fornicateurs. Des servantes originaires de Scarnsea ont subi
leurs répugnants attouchements. Aucune femme de moins de trente ans n’accepte d’aller
travailler pour eux. Pas depuis qu’une petite a disparu sans laisser de trace.
— Vraiment ?
— Une orpheline de l’asile des pauvres qui était allée
travailler pour l’infirmier. Il y a deux ans. Elle revenait de temps en temps à
la ville jusqu’à ce qu’un beau jour elle cesse de le faire. Quand on a posé des
questions, le prieur Mortimus a déclaré qu’elle avait volé des calices en or
avant de s’enfuir. Joan Stumpe, la gouvernante de l’orphelinat, est convaincue
qu’il lui est arrivé malheur. Mais c’est une vieille commère et il n’y avait
aucune preuve.
— Elle travaillait pour l’infirmier ? demanda Mark
avec une certaine inquiétude.
— Oui. Le lutin noir, comme on l’appelle. Comment peut-on
donner ce poste à un homme de cet acabit ? On croirait que tous les
Anglais ont du travail… »
Je réfléchis quelques instants.
« Pourrais-je m’entretenir avec cette dame Stumpe ?
— Il faudra prendre ce qu’elle raconte avec un grain de
sel. Elle devrait se trouver à l’asile en ce moment. Comme il y a distribution
d’aumônes au monastère demain, elle doit être en train de s’y préparer.
— Eh bien ! battons le fer pendant qu’il est chaud ! »
m’écriai-je en me levant. Copynger envoya un valet chercher nos manteaux.
« Monsieur, dit Mark au magistrat comme nous attendions,
en ce moment il y a une jeune fille qui travaille pour l’infirmier, une
certaine Alice Fewterer.
— Ah oui ! je m’en souviens.
— Je crois comprendre qu’elle a dû travailler parce que
la terre de sa famille a été clôturée pour y mettre des moutons. Je sais que
les juges de paix supervisent les lois sur les clôtures. J’aimerais savoir si
tout s’est déroulé dans la légalité ? Et si l’on pourrait faire quelque
chose pour elle… »
Copynger le prit de haut.
« Je suis bien placé pour savoir que tout s’est déroulé
dans la légalité, jeune homme, puisque cette terre m’appartient et que c’est
moi qui l’ai clôturée. La famille occupait la terre depuis longtemps en vertu d’une
copie du rôle, et le bail expirait à la mort de la mère. Il me fallait démolir
cette bicoque et faire paître des moutons sur le terrain si je voulais en tirer
quelque profit. »
Je fis les gros yeux à Mark.
« Je suis sûr que vous avez tout fait selon les règles, monsieur,
répondis-je pour l’amadouer.
— Ce qui rapporterait quelque chose à la ville, reprit
Copynger en fixant sur Mark un regard glacial, serait de fermer le monastère, de
fiche à la porte toute cette engeance et de détruire ces bâtiments bourrés d’idoles.
Et si la ville doit supporter un fardeau supplémentaire sous la forme d’une
masse de larbins d’abbaye au chômage, je suis sûr que messire Cromwell
trouverait normal que certaines des terres du monastère soient attribuées à des
citadins de premier plan.
— En parlant de lord Cromwell, il tient beaucoup à ce
que, pour le moment, l’on garde ces événements secrets.
— Je ne m’en suis entretenu avec personne, monsieur, et
aucun des moines n’est descendu en ville.
— Bien. On a aussi enjoint à l’abbé de ne pas en parler.
Mais certains des serviteurs du monastère ont sans doute des connaissances à
Scarnsea. »
Il secoua la tête.
« Très peu. Eux et les habitants de la ville ne se fréquentent
pas, ces derniers n’aimant pas plus les larbins d’abbaye que leurs maîtres.
— Ça se saura tôt ou tard. C’est dans la nature des
choses.
— Je suis persuadé que vous résoudrez vite ce problème »,
fit-il. Il sourit et ses joues s’empourprèrent. « Puis-je indiquer à quel
point je suis honoré de rencontrer quelqu’un ayant parlé de vive voix à lord
Cromwell ? Dites-moi, monsieur, comment il est, en
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