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Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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plus. Je rendis grâce aux dieux
invisibles qu’il ait parlé avant moi, car je me mordais la langue jusqu’au sang
depuis un bout de temps.
    — Quelle que soit la faute de Tiron, à part les
esclaves qui en ont vu d’autres, nous sommes les seuls à être au courant – c’est-à-dire,
tant que la fille tiendra sa langue. C’est une affaire entre toi et lui. Tu la
régleras après le procès. En attendant, il suffit de veiller à le tenir éloigné
d’elle. Comme dit Gordien, garde ton souffle et ta colère pour ce qui en vaut
la peine : la défense de Sextus Roscius, par exemple. La seule chose qui
importe maintenant, c’est de savoir ce que Tiron lui a dit et comment l’information
est passée à nos ennemis.
    — Et pourquoi la fille a choisi de trahir son père,
soupirai-je. Tu en as peut-être une idée, Tiron ?
    Le jeune homme regardait son maître comme pour solliciter la
permission de parler ou même de respirer. Cicéron parut sur le point de faire
un nouvel éclat. Il se contenta de sortir dans l’atrium, les bras croisés comme
pour contenir sa rage.
    — Eh bien, Tiron ?
    — Je n’arrive toujours pas à y croire, murmura-t-il. J’espère
encore me tromper. C’est seulement quand tu as dit que quelqu’un ici même avait
trahi, je me suis dit : « Ce n’est pas moi, je n’ai rien dit à
personne », et puis j’ai pensé à Roscia…
    — … à qui tu avais parlé de moi la première fois que j’avais
interrogé Sextus Roscius.
    — Oui.
    — Et le lendemain, Glaucia et une autre brute à la
solde de Magnus arrivaient chez moi pour m’intimider, tuer ma chatte, et me
laisser un message en lettres de sang. Oui, il semble que ta Roscia soit à l’origine
des fuites.
    — Mais pourquoi ? Elle adore son père. Elle ferait
n’importe quoi pour lui venir en aide.
    — C’est ce qu’elle t’a dit ?
    — Oui. Et c’est pourquoi elle me pressait de questions
sur l’enquête. Sextus Roscius l’oblige à quitter la pièce lorsqu’il discute
affaires. Il ne fait aucune confidence à sa mère ni à sa fille. Elle ne
supportait plus de rester dans l’ignorance.
    — De sorte qu’avant, après ou pendant vos petits
intermèdes, elle t’interrogeait sur la défense de son père.
    — Oui. Mais tu présentes nos relations sous un jour si
artificiel et sinistre.
    — Oh, non, je suis sûr que Roscia est douce comme de l’or
poli.
    — Tu en parles comme d’une actrice. (Il coula un regard
vers Cicéron.) Ou d’une prostituée.
    — Elle n’a rien d’une prostituée, Tiron, tu devrais
savoir la différence !
    Je ris de le voir rougir, comme s’il s’attendait à ce que je
mentionne Electra, pour couronner le tout. Non, les motivations d’une
prostituée sont toujours transparentes, claires dans leur noirceur même, elles
ne trompent qu’un imbécile, ou qui veut être trompé. (J’allai lui poser la main
sur l’épaule.) Mais il arrive que le sage se laisse tromper par les apparences,
par la jeunesse, l’innocence et la beauté. Surtout s’il est jeune et innocent
lui-même.
    Tiron loucha vers l’atrium. Cicéron était loin.
    — Est-ce tout ce qu’elle voulait de moi,
Gordien ? Me tirer les vers du nez ?
    Je me rappelai l’air de la fille dans la réserve et son
corps arqué par le désir. Je me rappelai l’étincelle dans les yeux de Lucius
Megarus au souvenir de son séjour dans la maison d’Ameria.
    — Non, ce n’était pas
tout. Si tu veux dire qu’elle n’a rien ressenti auprès de toi, j’en doute fort. La
loyauté n’est jamais entièrement pure, ni la tromperie.
    — Ces renseignements, intervint Rufus, peut-être les
a-t-elle communiqués innocemment elle-même. Elle peut avoir un confident, un
esclave que Chrysogonus aurait placé là et qui la questionne comme elle a
questionné Tiron.
    — Je ne pense pas. Arrête-moi si je me trompe, Tiron.
Jusqu’à présent, tu n’as réussi à la voir qu’en accompagnant l’un d’entre nous
au cours d’une visite chez Cæcilia Metella. Correct ?
    — Oui… fit-il d’une petite voix, comme s’il anticipait
la question suivante.
    — Mais quelque chose me dit que Roscia t’a proposé un
rendez-vous – demain ?
    — Oui.
    — Et demain est déjà là, dis-je en regardant le jardin
où Cicéron reprenait le contrôle de lui-même.
    La lumière avait viré du rose à l’ocre et blanchissait à vue
d’œil. Déjà, la fraîcheur de la nuit s’évaporait.
    — Où et

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