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Fatima

Fatima

Titel: Fatima Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
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parlait. Muhammad approuva d’un signe.
    — Tu as raison, convint-il paisiblement. Mais il ne faut pas leur en vouloir. Ma protection n’est pas l’affaire de mes compagnons. Contre les mauvais, Allah fait ce qu’il doit, comme Il le doit. Et je t’ai, toi. Je ne m’inquiète pas, et toi non plus tu ne dois pas te faire de souci. Tout ira bien. Même demain devant le grand marché. Ils ne porteront pas la main sur moi, tu le sais.
    — Tu te trompes ! Ils se moquent de ton dieu. Ils ne croient pas à Ses punitions. Yâkût et Abu Sofyan veulent te couper la gorge, et si personne ne les en empêche, ils le feront !
    Le rire de son père fut étrangement serein.
    — Fatima, ma fille, je ne vais nulle part sans que Quelqu’un me protège. Et mieux que ne le ferait une tunique de fer. Celui qui me protège te protège, toi aussi. Aie confiance. Dors et repose-toi. Tu as fait ton devoir.
    Il esquissa une dernière caresse sur le front blessé de sa fille et souleva la lampe. La courte mèche se balança et la flamme jeta des ombres houleuses tout autour de la pièce.
    — Sois aimable avec Abu Bakr, ajouta-t-il, et respecte ce qu’il dit. Il ne pense qu’à mon bien. Quoiqu’il ne soit pas un guerrier comme toi.

Le Bédouin Abd’Mrah
    Il faisait à peine jour. Les contours des maisons et des arbres se fondaient dans le brouillard. Fatima avançait lentement, s’appuyant sur un bâton trouvé dans la cour. Plus elle marchait, plus la douleur de sa cheville devenait supportable. L’emplâtre de la tante Kawla s’avérait efficace, mais serrer la main sur le bâton n’en était pas moins une torture.
    Après avoir dépassé les murs du cimetière, elle s’engagea sur la route de Mina. Tout était encore figé dans le silence de l’aube. Seuls les oiseaux semblaient être éveillés. Dans ce monde endormi, le moindre mouvement lui paraissait suspect. Elle se retournait sans cesse, craignant de découvrir Ashemou, Abdonaï ou Zayd, ou même des servantes, lancés à sa poursuite.
    La route demeurait vide.
    Elle avait pu s’échapper sans que personne ne s’en aperçoive. Après la visite de son père, la maisonnée, agitée par les discussions sans fin autour de la menace qui pesait sur le Messager, avait été longue à trouver le sommeil. Avec un peu de chance, ils dormiraient tous jusqu’à ce que le soleil brille dans le grand tamaris de la cour.
    Bientôt, dressés tels des bras de géant dans l’air pâle de l’aube, les palans soutenant les énormes gourdes de cuir des puits d’al Bayâdiyya apparurent derrière un pli de roche. Sur une centaine de pas, la route contournait des colonnes de basalte d’un pourpre presque noir, puis ce serait la « vallée des Bédouins », comme on l’appelait à Mekka.
    Lorsqu’elle y parvint, Fatima en eut le souffle coupé.
    Elle ne passait sur cette route qu’à l’occasion des voyages à Ta’if, au début et à la fin de l’été. La plupart des Bédouins avaient alors depuis longtemps replié leurs tentes pour conduire leurs troupeaux dans les pâturages d’altitude, ou n’en étaient pas encore revenus.
    Aujourd’hui, avec la proximité du grand marché, on eût cru que tout ce que les montagnes et le désert du Hedjaz comptaient de Bédouins s’était assemblé au-dessus de Mekka.
    Fatima n’avait pas imaginé qu’il pût y avoir tant et tant de tentes. Par dizaines, tantôt elles s’alignaient en dessinant de véritables rues, tantôt, dispersées et chaotiques, elles cernaient des enclos de fortune où se massaient des troupeaux de petit bétail attendant la tonte ou des élevages de jeunes chameaux. Ainsi qu’un immense manteau de toile sombre et chaleureux, elles recouvraient à perte de vue les pentes douces au pied de la montagne. Une ville entière.
    Fatima réprima le réflexe de se retourner une dernière fois pour surveiller la route derrière elle.
    La nuit précédente, après que son père fut passé la voir dans sa chambre, l’angoisse l’avait étreinte. Tout obstiné et confiant qu’il voulait être dans son Dieu, son père courait à la mort. Yâkût avait prévu son mauvais coup pour le lendemain. Or elle-même serait incapable de manier une lame. Abu Bakr, comme son père l’avait admis, n’avait rien d’un guerrier. Tamîn non plus. Pas même Zayd.
    Muhammad irait sur le parvis du grand marché et s’y ferait trancher la gorge. Elle voyait la scène comme si elle se déroulait devant ses yeux.
    Peut-être

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