FBI
tirer dessus s’ils quittent leur chambre. « On vous attend », lui répond DeLoach.
Énervé, le numéro trois du Bureau fait un tour d’inspection autour du motel. Il croise le SAC de Jackson, Roy K. Moore, qui monte la garde dans sa voiture. DeLoach lui demande de faire venir des renforts. De retour dans sa chambre, il a du mal à trouver le sommeil. Ce ne sont pas les autres coups de fil anonymes qui le tiennent éveillé. Il espère que l’argent que le FBI s’apprête à verser aux deux informateurs sera un bon investissement.
Quelque temps plus tard, un jeune agent du FBI en poste à Washington reçoit l’ordre de son supérieur d’acheminer un colis jusqu’au SAC de Jackson. Il a pour consigne de ne jamais se séparer du paquet. « Et si tu dois aller aux toilettes, tu as intérêt à le prendre avec toi », lui lance son supérieur. Le jeune agent s’exécute. Arrivé à Jackson, il remet le paquet à Joe Sullivan, qui le remercie avant de le congédier. Le coursier n’a découvert que quarante-quatre ans plus tard la nature de son colis. « Si j’avais su, dira-t-il, j’aurais pissé dans mon pantalon plutôt que d’aller aux toilettes ! »
Les négociations avec les deux informateurs commencent1. Elles sont compliquées. D’abord, il y a la question de la somme : c’est 5 000 dollars de plus que ce qu’avait annoncé Al Rosen à Hoover. « Ce n’est pas trop cher payé pour résoudre une des plus grosses affaires du pays », souligne Cartha DeLoach. Mais le FBI veut bétonner le dossier : en plus des trois corps, les agents fédéraux veulent les noms des assassins, et des témoignages qui puissent tenir la route devant un jury d’assises. Les informateurs refusent de dénoncer leurs camarades et n’ont aucun désir de témoigner en public. Si le FBI veut la vérité, il devra la trouver ailleurs. C’est à prendre ou à laisser. Le FBI prend. Il n’a pas le choix. Pas de corps, pas d’affaire…
À la fin du mois d’août, Joe Sullivan et John Proctor ont enfin l’information qu’ils recherchent : les trois hommes ont été enterrés dans un barrage situé sur la rivière qui traverse le ranch Old Jolly, à Neshoba County. Al Rosen informe aussitôt Cartha DeLoach : « Nous avons décidé de ne pas nous précipiter tout de suite avec des pelleteuses mécaniques pour commencer à retourner la terre, explique DeLoach. Sullivan était convaincu que l’information était solide, mais nous n’avions aucun moyen de la vérifier. Les informateurs étaient certains de connaître l’emplacement des corps, mais ils se trompaient peut-être. Peut-être même avaient-ils été eux-mêmes induits en erreur. »
Alors le Bureau temporise, reprend tout à zéro. Tout le monde est interrogé une nouvelle fois. En vain. Le 2 août au petit matin, des dizaines d’agents du FBI dirigés par Joe Sullivan investissent le ranch Old Jolly et s’arrêtent devant un barrage. Il croule sous la végétation : visiblement, personne ne l’a curé depuis longtemps. Le soleil va se lever. Les conditions sont propices à une reconnaissance aérienne. Joe Sullivan dépêche deux de ses agents auprès du commandant de la base navale aéroportée la plus proche. Ils sont de retour quelques heures plus tard à bord d’un hélicoptère qui survole l’endroit. Sullivan et ses hommes ne sont pas devant le bon barrage ; il y en a un autre un peu plus loin. Sullivan et les autres agents y courent. Ce barrage-là est énorme. Ils n’en viendront jamais à bout sans machines.
Le 4 août au matin, un convoi composé de voitures du FBI, d’une pelleteuse et d’un bulldozer déboule au ranch Old Jolly. Joe Sullivan remet un mandat de perquisition au propriétaire. À 15 heures, la pelleteuse tombe sur les cadavres des trois jeunes gens. La prudence étant de mise, Sullivan prévient Cartha DeLoach en se servant d’un code : il parle de la découverte de gisements de pétrole. Pendant ce temps, au pied du barrage, un agent du FBI photographie longuement les cadavres. C’est John Proctor, l’homme par qui les informations sont venues. Il sait que son travail est loin d’être terminé. Reste encore à identifier les coupables, à les arrêter et à les déférer devant les tribunaux.
Pour cela, il est besoin de deux choses : de la sueur et de la chance.
Dans la chaleur de l’été du Mississippi – le thermomètre dépasse souvent les 40 degrés –, les agents du FBI remontent
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