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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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n’ai plus
d’enfants. Je suis seule pour toujours… Je vis comme une bête
fauve. Moi qui étais née pour le bonheur, qui pouvais rencontrer un
honnête homme, devenir une bonne mère, élever ma famille, rendre
mon homme heureux, eh bien ! je suis devenue La
Veuve !…
    La Veuve – ou plutôt Jeanne Mareil – s’arrêta
brusquement, les dents serrées ; son regard brillait d’une
lueur étrange.
    – Voici comment j’ai commencé à me
venger, continua-t-elle au bout d’un long silence farouche. Après
son mariage avec celle qu’on appelait la baronne Clotilde, Hubert
d’Anguerrand retourna à Paris. Trois ans s’écoulèrent. Puis,
brusquement la baronne Clotilde revint s’installer seule au château
où Hubert n’apparut plus qu’à l’automne de chaque année, au moment
des grandes chasses. Des ans passèrent encore. Trois enfants
étaient nés au château d’Anguerrand. L’aîné s’appelait Gérard.
    – Celui qui m’a payé pour tuer son
père ! gronda Jean Nib.
    – Oui !… Le deuxième s’appelait
Edmond…
    – Celui-là, je ne le connais pas, dit
Jean Nib. Mais ce doit être un rude sacripant, puisqu’il est le
fils d’un tel père et frère d’un tel frère !…
    – La dernière, enfin, s’appelait
Valentine…, continua La Veuve. Moi, je vivais toujours avec le
comte de Damart, qui était devenu une sorte de régisseur général
des biens du baron. Je le voyais tous les jours. Mais souvent, le
soir, il me quittait pour tenir compagnie à la baronne Clotilde… À
l’époque dont je vous parle, le petit Gérard avait treize
ans : on l’élevait à Paris, dans un pensionnat. Edmond avait
huit ans et Valentine trois ans. Ma petite Suzette avait aussi
trois ans alors ! ajouta la Veuve, dont les traits se
contractèrent brusquement. Ensuite ?… Il arriva ceci que, de
plus en plus, Hubert d’Anguerrand se détachait de sa femme. Il ne
venait plus au château qu’un mois par an. Et mon amant, le comte
Louis de Damart, était, pour ainsi dire, le maître dans ce domaine.
Il me racontait combien la baronne était triste d’être ainsi
délaissée, et cela me vengeait déjà, cela m’aidait à prendre
patience… Le soir, parfois, je guettais sur le chemin qui va de
Segré au château. Je sentais que mon heure approchait…
    "Un soir de décembre, par un temps de froid
noir, je vis, de loin, arriver un cavalier : à sa taille, à sa
carrure, à son air fier et rude, je reconnus Hubert d’Anguerrand…
C’était lui, en effet ! Contre son habitude, il venait passer
les fêtes de Noël au château. Il arrivait sans avoir prévenu
personne. En le voyant, je ne sais ce qui me passa par la tête… Je
ne sais quelle voix me cria que le moment était venu… ou
jamais !… Je me plantais résolument sur la route, et quand il
fut à ma hauteur, je saisis la bride de son cheval en
disant :
    « – Bonsoir, monsieur le baron
d’Anguerrand !…
    « Il y avait des années et des années que
le baron Hubert ne m’avait vue. Et pourtant, dans la nuit qui
venait, il me reconnut tout de suite ; il sauta à bas de son
cheval, et je vis qu’il était pâle comme un mort. Il me saisit les
poignets et me dit, dans la figure : « C’est vous,
Jeanne ? C’est vous ?… Oh ! c’est toi !… Tu
veux donc enfin de moi, puisque tu m’appelles !… » Il
tremblait. Je lui répondis : "Non, monsieur le baron. Je ne
veux pas de vous pour une raison bien simple : c’est que je
veux être fidèle à mon amant… » Il eut un soupir pareil à
celui du bœuf qu’on assomme et bégaya : « Ainsi, vous
n’avez pas voulu de moi, par fierté… et vous avez un amant !…
quelque paysan… »
    – « Non, monsieur le baron, mon
amant, comme vous, porte un titre… Mon amant est comte, comme vous
êtes baron ; il s’appelle Louis de Damart : c’est votre
meilleur ami !… »
    « Hubert ne dit rien. Mais je l’entendis
grincer des dents. Il fit un mouvement pour s’élancer à cheval. Je
le retins et lui criai :
    « – Savez-vous, monsieur le baron,
pourquoi je vous ai arrêté et pourquoi je vous ai dit que j’avais
un amant qui s’appelle Louis de Damart ?… C’est que mon amant
me trompe !…
    « – Tant mieux ! Puisses-tu souffrir
dans ton cœur ce que j’ai souffert dans le mien !…
    « – J’ai compté sur vous pour me venger,
monsieur le baron !…
    « – Moi ?… Folle ! Triple
folle !… Moi, te venger ?…
    « – Vous !

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