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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
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était parfaitement immobile, figée d’intérêt, n’agitant son éventail que par intervalles de peur de créer diversion. À ses côtés, le baron de La Hontan semblait saisi de la même fascination.
    Ce qui avait débuté sur une note sereine avait toutefois viré en confrontation. Il apparut en effet que les nations alliées ne prisaient pas la politique de pacification que Frontenac menait à l’égard des Iroquois. Une réaction unanime que Louis n’avait pas prévue. On lui reprochait d’avoir laissé la vie à des Agniers à Schenectady, alors que les Iroquois brûlaient des Français à petit feu dans leurs villages; d’avoir interdit aux alliés de lever la hache de guerre contre les Iroquois après le massacre de Lachine, ce qui leur avait causé de nombreux désagréments et des pertes d’hommes; d’avoir tenté de négocier avec l’ennemi sans les intégrer dans l’alliance, ce qui les avait forcés à vouloir se rapprocher à leur tour des Iroquois pour n’être pas seuls à porter le poids de la guerre. Ils savaient tout des récentes ambassades de Frontenac chez les Iroquois et cela les inquiétait grandement.
    Puis Atherihata, un des considérables chefs christianisés du Sault-Saint-Louis, prit à son tour la parole en s’adressant, cette fois, aux Outaouais.
    â€” Nous avons eu vent des messages « sous terre » que vos braves ont envoyés aux Iroquois, comme il est aussi parvenu à nos oreilles que vous avez décidé de renoncer à rejoindre leur chaîne d’alliance. Mais éclairez-nous, frères alliés, et dissipez le nuage de défiance qui obscurcit nos cœurs. Pourquoi avoir traité avec l’ennemi sans la participation de notre Père commun, Onontio – et l’orateur de se tourner vers Frontenac en le montrant de la main –, et comment êtes-vous disposés, maintenant, à son égard et au nôtre?
    La balle était dans le camp outaouais. Leur porte-parole, un grand et beau guerrier, se leva lentement et vint se placer bien en évidence devant le gouverneur général, entre les deux rangées de participants. L’homme portait pour tout attirail un cache-sexe de peau et de longs colliers. Son visage, ses jambes et son torse étaient recouverts de tatouages colorés à motifs géométriques. Les quelques femmes présentes agitaient fébrilement leur éventail tout en le dévorant des yeux. Il parla d’abondance, ne lâchant jamais le wampum qu’il tenait devant lui.
    â€” Ouvrez grands vos yeux et vos cœurs avant de nous condamner et faites un peu attention à la conduite qu’on a tenue avec nous. Vous jugerez ensuite si nous avions tort. Après nous avoir engagés dans la guerre contre l’Iroquois, on nous a obligés à cesser toute hostilité, puis sans nous éclairer davantage, on nous a fait reprendre la hache. Nous ne comprenions rien à ces revirements et étions également surpris du peu de vigueur de la riposte française à Lachine. Nous avons vu les Français défaits et embarrassés à se défendre. Inquiets à l’idée que notre Père nous abandonne et soit incapable de nous secourir, nous avons cru devoir songer à notre sécurité et à celle de nos femmes et de nos enfants. Ce printemps encore, Onontio nous mettait le casse-tête dans les mains, bien qu’il ait envoyé le chevalier d’O à Onontagué. Depuis, ni l’officier ni ses compagnons ne sont revenus et des négociations qui se sont poursuivies pendant plusieurs lunes n’ont donné aucun résultat. Nous sommes ici pour nous instruire de la véritable volonté d’Onontio. Quelles sont donc ses intentions? Notre Père veut-il une vraie guerre avec l’Iroquois et est-il prêt à nous appuyer si nous levons à nouveau la hache contre les Cinq Nations? Ou nous abandonnera-t-il à la première occasion si les Iroquois acceptent de faire la paix avec lui?
    Des murmures d’approbation fusèrent de tous côtés. Il fallait une bonne dose de courage pour dire les choses aussi franchement. Louis ne rétorqua pas, mais il invita les autres sachems à parler aussi à cœur ouvert. Quand Le Baron, un chef huron, prit la parole, on l’écouta posément.
    â€”

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