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Hiéroglyphes

Titel: Hiéroglyphes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Dietrich
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capitaine
anglais avait pu s’évader en attirant l’attention,
par la fenêtre de sa cellule, d’une femme influente avec
qui il couchait alors. Un procédé selon mon cœur,
que j’admirais sans réserve.
    Dix-huit
mois après, Astiza et moi bénéficiions de la
même hospitalité, sous l’égide du curieux
geôlier obséquieux, adipeux et omniprésent
Jacques Boniface, qui avait réjoui Sir Sidney avec ses
légendes des chevaliers du Temple.
    On
nous y avait conduits dans un véhicule pénitentiaire
dont les fenêtres grillagées nous avaient permis
d’entrevoir Paris. La ville était sinistre en ce mois de
décembre, les gens énervés, les nuages lourds.
Plusieurs gardiens nous surveillaient à tour de rôle,
comme des animaux. Un bien triste moyen de présenter à
mon Astiza la belle cité française. Tout lui était
étranger, les clochers de la grande cathédrale, les
clameurs des marchés aux fruits et aux légumes, le
concert de hennissements ininterrompus de la circulation urbaine et
la hardiesse des femmes enveloppées de velours ou de fourrures
stratégiquement écartées pour dévoiler le
sein ou la jambe.
    Humiliée
d’avoir dû se montrer nue ou presque pour permettre aux
secrétaires de copier la clef, Astiza se taisait. Quand on
pénétra dans la cour de la prison, je remarquai les
têtes qui guettaient l’arrivée de nouveaux
pensionnaires. Dont celle d’une rousse incendiaire qu’un
certain bail de location associait à des souvenirs moroses.
Mon ancienne propriétaire ? Ça me paraissait
impossible, et pourtant…
    Datant
du XIII e  siècle,
cette prison du Temple était un étroit château,
plutôt laid, dont le toit pyramidal s’élevait à
une soixantaine de mètres. Les cellules s’ouvraient sur
des galeries desservies par un escalier en colimaçon érigé
au centre. Le fait qu’elle fût presque vide parlait en
faveur de l’efficacité révolutionnaire. On avait
infiniment moins incarcéré que guillotiné sous
la Terreur.
    Parlant
de prisons, j’en avais vu de bien pires. Astiza et moi étions
autorisés à faire le tour du parapet qui couronnait le
toit trop haut juché pour que l’on pût envisager
de sauter sur le trottoir ou de descendre le long de la muraille
extérieure. Et la nourriture était bien meilleure que
dans certains des khans que j’avais parfois honorés de ma clientèle, à
Jérusalem. On était en France, après tout, pays
réputé pour sa gastronomie. En dehors du fait que nous
ne pouvions pas sortir, et que Napoléon, avec l’aide de
Silano, comptait certainement toujours dominer le monde, j’aurais
presque apprécié la tranquillité du séjour.
Il n’y a rien comme la chasse au trésor, les anciennes
légendes et les batailles révolues pour vous faire
apprécier une bonne petite sieste.
    Mais
le Livre de Thot, ou plus exactement son absence, nous attirait
toujours, et Boniface était un bavard intarissable qui adorait
commenter les machinations d’une cité sous pression,
constamment sur le pied de guerre. Complots et conspirations se
succédaient, d’après lui, toute cabale requérant
son contingent de « muscle militaire » pour
tenter de renverser le gouvernement. Le Directoire de cinq
politiciens éminents était constamment remodelé
par les deux Chambres législatives. Quant au Conseil des
Anciens et au Conseil des Cinq-Cents, c’étaient de
pompeuses assemblées qui portaient des manteaux romains, se
livraient à des trafics éhontés et gardaient
toujours un orchestre à portée de la main pour
agrémenter leurs sessions de chants patriotiques. L’économie
était un désastre, l’armée quémandait
des subsides, la moitié de la France occidentale couvait une
rébellion alimentée par l’or britannique et la
plupart des généraux avaient un œil sur le champ
de bataille, l’autre sur la capitale.
    « On
a besoin d’un chef, disait notre geôlier. Tout le monde
en a soupé de la démocratie. Vous êtes chanceux
d’être là, Gage, à l’abri du
tintamarre. Quand je descends en ville, je ne suis jamais bien
rassuré.
    —  Quel
dommage !
    —  Et
pourtant personne ne veut d’un dictateur. Peu souhaitent le
retour du roi. On doit préserver la République, mais
qui peut tenir les rênes de ces assemblées turbulentes ?
C’est comme essayer de domestiquer les chats des rues. Il nous
faudrait la sagesse d’un Salomon.
    —  Vraiment ? »
    On
soupait dans ma cellule. Boniface avait agi de même, au temps
de Smith,

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